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Une Espagnole vend ses organes pour garder son toit, une pratique qui inquiète un pays en crise

Vendre ses organes, le phénomène qui inquiète les Espagnols

CRISE - "Une chômeuse espagnole met ses organes en vente". Voici l'histoire qui fait les gros titres de la presse espagnole ce lundi 12 novembre après la publication d'une interview vidéo par le quotidien El Mundo.

À 44 ans, une quadragénaire désespérée confie être prête à vendre tous les organes qui ne sont pas indispensables à sa survie pour pouvoir payer un logement pour elle et sa fille.

"J'ai d'abord mis en vente un rein, maintenant je propose aussi les cornées de mes yeux, un de mes poumons, un morceau de mon foie... Je vends n'importe quel organe de mon corps à qui peut le payer, et je fais cela parce que je suis tout simplement désespérée", raconte la quadragénaire.

Voir le témoignage en espagnol sur le site d'El Mundo

"J'ai besoin d'un logement (...) pour y installer mon foyer, dans un endroit digne", déclare cette femme, le visage dissimulé derrière ses cheveux et une paire de lunettes de soleil. La quadragénaire indique être sans travail et souffrir d'une incapacité à 66% à cause des mauvais traitements que lui a fait subir l'homme avec qui elle a vécu pendant 18 ans et qui veut maintenant la faire expulser de la maison où elle vit avec sa fille.

"J'ai reçu un préavis d'expulsion pour ma fille et moi. Nous n'avons pas de famille, nous ne savons pas où aller", poursuit-elle.

Une petite annonce sur Internet

Selon El Mundo, cette femme a publié, deux semaines plus tôt, une annonce sur Internet pour proposer ses organes.

"Je n'ai pas d'autre moyen pour essayer de sauver ma vie et celle de ma fille. Si avec le temps qu'il me reste à vivre je peux ainsi donner à ma fille la force qui lui permette de sortir de cette situation, bien sûr, je vends mes organes", aurait-elle écrit dans l'annonce sans fixer de prix.

Le quotidien précise qu'elle n'a toujours pas reçu d'offre, mais l'Espagnole aurait déjà pris contact avec un médecin à Melilla (une enclave espagnole sur la côte marocaine) dans la perspective d'un éventuel prélèvement.

"En Espagne, il est pratiquement impossible de faire un prélèvement d'organe suivi d'une transplantation sans que les autorités compétentes ne soient au courant", assure El Mundo, qui précise que la quadragénaire encourrait dans ce cas une peine de 12 ans de prison pour trafic d'organes.

Une pratique qui inquiète... depuis 2 ans

L'histoire de cette chômeuse n'est pas un cas isolé en Espagne. En 2010, la FACUA, une association de consommateurs espagnols, alertait déjà la ministre de la Santé à ce sujet.

Cette organisation relevait un nombre croissant d'annonces pour des organes sur des sites tels que anunciosenred.com, anuncioses.com, blidoo.es, campusanuncios.com, cittys.com, foros.hispavista.com, milanuncios.com, nosolosalud.com, ou encore wanuncios.com. Des citoyens espagnols désespérés y vendaient leurs organes non vitaux pour des prix allant de 14.000 à 250.000 euros et la FACUA faisait d'ores-et-déjà le lien avec la crise économique.

D'ailleurs les auteurs des premières petites annonces ne s'en cachaient pas. "Crise", "hypothèque", "dette", font partie des raisons invoquées par ceux qui tentent de justifier leur geste.

Deux ans plus tard, le gouvernement ibère n'a visiblement pas enrayé le phénomène, comme le montre cette autre annonce d'un espagnol de 42 ans ayant mis un rein en vente sur campusanuncios.com le 7 novembre dernier.

"VENDS rein pour problèmes économiques, 100.000 euros, en bonne santé, aucune maladie, sportif, ne fume pas, ne bois pas, j'ai 42 ans et je vis en Espagne."

Un rein contre 120.000 euros

Les annonces de ce type se comptent par dizaines sur des sites grand public. Pourtant l'Espagne n'est pas le meilleur marché pour ces vendeurs d'organes puisque, en dépit de la crise, le pays est le leader mondial des transplantations.

Plus de 17% des dons européens sont espagnols et le pays compte 35,3 donneurs pour un million de personnes ce qui le positionne en tête du classement du registre mondial des greffes.

Mais si les Espagnols donnent plus que les autres Européens, 5000 personnes sont constamment en attente d'un rein dans le pays. Selon le dernier rapport de l'ONU sur le trafic d'organes, le prix moyen d'un rein sur le marché noir est de 120.000 euros, soit 70 fois le salaire moyen d'un Espagnol.

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