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Ottawa lâche l'amiante en montrant le PQ du doigt

Ottawa lâche l'amiante en montrant le PQ du doigt

Ottawa ne s'opposera plus à l'inscription de l'amiante sur la liste des produits chimiques dangereux de la Convention de Rotterdam, a annoncé vendredi le ministre fédéral de l'Industrie, Christian Paradis.

M. Paradis a rappelé que la nouvelle première ministre du Québec, Pauline Marois, avait clairement indiqué son intention d'interdire l'exploitation de l'amiante chrysotile au Québec. « Cette décision aura un impact négatif sur la prospérité future de nos régions. Et pendant ce temps des centaines de travailleurs de notre région sont sans emploi, vivent dans l'incertitude et l'espoir de la réouverture de la mine. Nos travailleurs méritent mieux que d'avoir à se rabattre sur des consultations économiques tel que proposé », a-t-il souligné.

Le gouvernement Harper a donc décidé d'investir jusqu'à 50 millions de dollars dans la région pour aider les collectivités à se diversifier.

Interrogé par un journaliste, M. Paradis a affirmé qu'il continue de croire à l'utilisation sécuritaire de l'amiante. « J'ai grandi ici, j'ai des parents, de la famille immédiate des amis qui ont travaillé dans les mines d'amiante, j'y crois certainement », a-t-il répondu.

Il confirme ainsi la position du gouvernement sur l'utilisation de l'amiante, qu'il rappelait encore en juillet dernier. « Notre gouvernement a toujours prôné l'approche d'une utilisation sécuritaire de la fibre chrysotile non seulement dans l'exploitation, mais dans l'utilisation aussi. C'est une politique qui a été façonnée au cours des 30 dernières années. Il y a moyen d'utiliser cette fibre de façon sécuritaire », avait-il alors déclaré.

La réponse de M. Paradis a toutefois été évasive lorsqu'un journaliste lui a demandé si le gouvernement fédéral comptait placer l'amiante sur la liste des produits dangereux dans les prochains mois ou les prochaines années : « Non, ce que je viens ici d'annoncer c'est que le Canada ne s'opposera plus à l'inclusion du chrysotile à l'annexe III de la Convention de Rotterdam ».

Il a ensuite dû s'expliquer sur ce que cela voulait dire en pratique, l'Annexe III étant la liste des produits chimiques « qui ont été interdits ou strictement réglementés par au moins deux parties pour des raisons de santé ou d'environnement », selon le texte de la Convention. « À chaque deux ans ça revient, il y a des débats à savoir quels produits sont inclus ou non sur la liste. Le Canada par le passé s'est déjà objecté, il y a d'autres pays qui se sont objectés. Et présentement ce que je vous dis, c'est que nous ne nous opposerons pas à l'inclusion du chrysotile à l'Annexe III de la Convention de Rotterdam lors des prochaines rondes », a-t-il précisé.

M. Paradis attaque Mme Marois

Le ministre Paradis a rappelé que l'interdiction d'exploiter l'amiante est de compétence provinciale. Il a souligné que la décision du gouvernement Harper de venir en aide aux travailleurs du secteur est une conséquence directe de la position « sans équivoque » de celle de Mme Marois sur l'amiante.

« Ce que Mme Marois donne comme alternative ce sont des consultations pédagogiques. [...] Il y a un moment où il faut bouger », a-t-il déclaré.

Le gouvernement Harper souhaite ainsi, avec la mesure qu'il a annoncée, « redonner espoir » aux travailleurs de l'amiante « qui vivent dans l'incertitude depuis un an » et dont les prestations d'assurance-emploi s'épuiseront bientôt.

Le maire se réjouit de l'investissement

Le maire de Thetford Mines, Luc Berthold, présent aux côtés de M. Paradis, s'est réjoui de l'annonce du ministre quant à l'aide à la région, remerciant à plusieurs reprises le ministre Paradis et le premier ministre Stephen Harper.

« C'est encore pour nous une option [l'amiante], on est encore dans l'objet de la relance, et ne plus, pendant qu'on va travailler pour faire travailler les employés dans leur mine, on a les outils pour se développer. On a enfin les outils pour diversifier notre économie, pour faire en sorte que la transition se fasse bien », a-t-il affirmé.

Selon M. Berthold, la position du PQ par rapport à l'amiante a créé un climat d'incertitude dans la région. Il a ajouté que les pays qui achètent l'amiante canadien doivent eux aussi « prendre leurs responsabilités » pour l'utiliser de façon sécuritaire.

L'amiante au coeur des débats électoraux

Pendant la campagne électorale québécoise d'août dernier, le Parti québécois a rappelé son engagement à tenir une commission parlementaire qui conduirait à une « décision définitive » sur l'avenir de l'industrie de l'amiante. Il avait aussi promis d'annuler le prêt de 58 millions de dollars consenti par les libéraux aux promoteurs de la mine Jeffrey située à Asbestos, en Estrie, et de réinvestir les fonds prévus dans des projets de diversification économique de la région.

Après s'être rallié à la position du PQ au printemps 2011, l'ancien chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, avait jugé son utilisation sécuritaire au Québec, estimant que l'amiante chrysotile n'était pas un produit dangereux.

La CAQ promettait de son côté d'interdire l'exportation de l'amiante de façon définitive, mais d'honorer le prêt consenti à la mine Jeffrey tout en aidant l'entreprise à se reconvertir.

Québec solidaire prône pour sa part depuis longtemps l'arrêt de l'exportation de l'amiante, ayant même déposé un projet de loi sur la question en décembre 2010.

En juillet dernier, des épidémiologistes de plusieurs régions du monde avaient uni leurs voix pour demander que l'utilisation et l'exportation d'amiante soient bannies à l'échelle mondiale, soutenant que ce minéral ne peut être utilisé de façon sécuritaire.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, plus de 107 000 personnes meurent chaque année en raison de leur exposition à de l'amiante sous n'importe quelle forme.

Un texte de Laila Maalouf, Florence Meney et Paul-Éric Dumontier

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