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Avez-vous un cœur, Madame Benhabib?

Vous semblez oublier que le 29 janvier 2017 n’est pas UN drame, mais LE drame du Québec tout entier.
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Le Québec n’est pas islamophobe et les québécois ne le sont pas non plus, là au moins, nous sommes d’accord.
La Presse canadienne
Le Québec n’est pas islamophobe et les québécois ne le sont pas non plus, là au moins, nous sommes d’accord.

Réplique au billet « Le 29 janvier 2017, un drame et son instrumentalisation » de Djemila Benhabib.

Décidément, Madame Benhabib, si j'avais encore un doute sur votre bonne foi, il vient d'être confirmé. Je n'en reviens pas que vous osiez même songer à écrire un mot sur la tuerie de la Mosquée de Québec? N'avez-vous pas honte? Vos racines algériennes et vos valeurs universalistes ne vous ont-elles pas enseigné à respecter le deuil et le recueillement? Et vous vous faites appeler militante? Militante de quoi au juste? Je ne vois pas d'autre champ dans lequel vous excellez que celui du mépris et de la division.

Le Québec n'est pas islamophobe et les québécois ne le sont pas non plus, là au moins, nous sommes d'accord. En revanche, l'islamophobie existe bien au Québec. Votre billet en est la preuve vivante. Sinon, comment expliquer que vous vouliez court-circuiter aussi violemment, les commémorations du 29 janvier?

Vous semblez oublier que le 29 janvier 2017 n'est pas UN drame, mais LE drame du Québec tout entier.

Peut-être pensiez-vous qu'il suffirait de commencer par «oui, à la commémoration dans le respect de tous et la dignité de chacun» et de qualifier la tragédie de terrible pour voiler votre insensibilité face à la douleur des autres. Vous semblez oublier que le 29 janvier 2017 n'est pas UN drame, mais LE drame du Québec tout entier.

Vous osez pointer du doigt les représentants du CCIQ alors que l'odeur du sang y est encore, vous vous obstinez même à le faire à quelques jours du triste anniversaire ! J'en suis sidérée ! Vous dites que la tentation est grande de faire de la lutte à l'islamophobie LA cause nationale, alors que vous n'avez pas résisté à celle de confisquer les commémorations aux victimes pour froidement servir votre cause. Vous vous rappelez sûrement de cette expression bien algérienne utilisée par les enfants intimidateurs « nel'eb wella n'harrem » (soit c'est moi qui joue, soit je sabote le jeu).

Vous surfez sur l'ignorance et la peur de nos concitoyens pour évoquer un certain marchandage politique pour décréter une journée nationale contre l'islamophobie, mais vous n'apportez aucune preuve, vous qui êtes une scientifique rigoureuse.

Vous demandez qu'on se tienne aux faits, alors commencez par nous donner l'exemple. En quoi la tuerie de la mosquée de Québec est-elle si différente de celle de Charlie Hebdo? Des âmes sont tombées sous les balles dans un lieu « sacré », chacune dans l'exercice de ce en quoi elle croit. Pourquoi êtes-vous indignée pour l'une et pas pour l'autre? Pourquoi êtes-vous révoltée pour l'une et plus réservée pour l'autre. Certains mériteraient-ils de mourir plus que d'autres? Certaines morts seraient-elles plus justifiables que d'autres? Et puis que signifie pour vous, commémorer dans le respect de tous et la dignité de chacun? Où sont le respect et la dignité dans votre discours?

Oui, l'heure est à la rédemption, pas pour l'ensemble des québécois, mais pour celles et ceux qui, comme vous, continuent de semer la division et d'attiser les flammes de la haine. Oui, les québécois rejettent la violence, y compris celle de propos haineux à peine voilés. Détrompez-vous, madame, ce n'est pas parce qu'on a un jour été victime de la violence qu'on en est immunisé !

L'islamophobie est loin d'être un mot fourre-tout

L'islamophobie est loin d'être un mot fourre-tout. Votre tentative de le disqualifier n'échappe pas à l'intelligence de vos semblables, sans compter que vous êtes très mal renseignée. Je porte donc à votre connaissance que l'origine du mot « islamophobie » remonterait à la première moitié du 20 siècle, bien que les racines du phénomène proviendraient de l'époque médiévale. Ce ne sont donc pas les Mollahs iraniens qui l'ont inventé pour empêcher toute critique de l'islam.

Vous serez probablement déçue d'apprendre que ce mot soi-disant fourre-tout a vu le jour dans la sphère intellectuelle française au temps où l'Algérie était une colonie française. Le comble de l'ironie voudrait que cette sphère aujourd'hui, comme vous, tente de le disqualifier. La scientifique que vous êtes, pourrait éventuellement consulter le vaste répertoire de recherches scientifiques pertinentes sur le sujet.

Sachez Madame Benhabib, que les insultes et les agressions perpétrées contre des personnes parce qu'elles sont perçues comme musulmanes, constituent des manifestations de l'islamophobie.

Sachez Madame Benhabib, que les insultes et les agressions perpétrées contre des personnes parce qu'elles sont perçues comme musulmanes, constituent des manifestations de l'islamophobie. La dégradation et la profanation de lieux de cultes, de cimetières ou de biens appartenant à des musulmans en est une autre. Alors, que dire de la tuerie de la Mosquée de Québec ou de la mobilisation contre le projet d'un cimetière musulman, si ce n'est que ce sont des preuves tangibles de l'existence de l'islamophobie chez nous.

Vous accusez la soi-disant gauche multiculturaliste de recycler le terme en question, mais vous ne vous gênez pas pour recycler les amalgames pourtant bien vieillis et amochés par le temps et les pseudo-intellectuels de nos jours. Vous êtes bien loin du débat d'idées avec ce discours, mais j'oublie que vous faites partie de cette classe très sélective des « amoureux de la liberté » qui s'approprie les grandes luttes du siècle. Bien entendu, cette classe est étanche aux musulmans ou devrais-je dire aux islamistes, peu importe, pour vous cela revient au même : islam, islamisme, terrorisme... Des mots auxquels on oppose modernité, liberté, égalité et le tour est joué. N'êtes-vous pas fatiguée de ce jeu, ou êtes-vous vraiment convaincue? Ou serait-ce un « business lucratif » ?

Et que dire de la liberté d'expression? À vous lire, vous seule y avez droit, vous n'hésitez donc pas à condamner le Devoir pour avoir donné la parole à quelqu'un qui ne partagerait pas vos idées. Vous allez jusqu'à jeter la suspicion sur l'origine du financement d'un lieu de culte. Vous évoquez même la préparation de l'opinion publique, comme si vous ne faisiez pas la même chose avec ce discours. Quel culot !

Madame Benhabib, comme vous, je trouve l'instrumentation des commémorations du 29 janvier excessivement indécente et à la limite de la provocation.

Madame Benhabib, comme vous, je trouve l'instrumentation des commémorations du 29 janvier excessivement indécente et à la limite de la provocation. Soyez au moins cohérente faute de pouvoir être rigoureuse; comment voudriez-vous que nous restions, unis, solidaires et lucides, face aux épreuves, suite à vos propos incendiaires? « Ces pyromanes qui veulent faire naître la peur, la suspicion, la détestation, la méfiance des uns vis-à-vis des autres cherchent à fragmenter notre société », ne vous reconnaissez-vous pas là-dedans?!

Paix à votre cœur !

Avril 2018

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