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La partie se corse pour Kabila en RDC

L'Afrique apprend la démocratie, parfois de manière souple et pacifique et parfois de manière sanglante. Les regards se tournent du côté de la République démocratique du Congo, où le Président Joseph Kabila veut perpétuer sa présidence au-delà de ses deux mandats.
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L'Afrique apprend la démocratie, parfois de manière souple et pacifique et parfois de manière sanglante. Dans ce deuxième cas, l'insistance du président en exercice à se maintenir au pouvoir au-delà des termes fixés par la Constitution ravive la contestation de la population.

L'exemple du Burkina Faso est, sans conteste, le plus emblématique de la nouvelle Afrique qui se cherche une meilleure gouvernance. Les regards se tournent maintenant du côté de la République démocratique du Congo, où le président Joseph Kabila veut perpétuer sa présidence au-delà des deux mandats que lui accorde le texte fondamental de la République.

Normalement, il devrait quitter son palais en 2016. C'est du moins ce que pensent et revendiquent la population et les ténors de l'opposition. Le président pense, quant à lui, que si les mandats sont limités par la Constitution, rien n'empêche de changer cette dernière. Une logique qui a conduit pas mal de pays au chaos.

Il a tenté effectivement de le faire, en modifiant l'article 220 de la Constitution. C'est cette tentative, maintenant avortée grâce à la mobilisation de l'opposition, soutenue par la communauté internationale, qui a mis le feu aux poudres et ouvert la voie à des manifestations qui se sont terminées dans le sang. Les manifestants qui ont scandé le slogan "Touche pas à mon 220", en référence à l'article de la Constitution, objet de cette grande controverse, ne sont pas tous rentrés sains et saufs chez eux. 42 morts à Kinshasa et 4 à Goma, selon la Fédération internationale des Droits de l'Homme.

Comme toute révolution des temps modernes, la contestation congolaise s'est très vite répandue sur les réseaux sociaux, Facebook et Twitter, ralliant à la cause, chaque jour, de nouveaux citoyens. Le gouvernement a cru pouvoir trouver la parade idéale en coupant l'internet fixe et mobile. Il ne restait aux contestataires que les SMS, ils ont été eux aussi coupés. Plus rien ne filtre sur internet, mais c'était sans compter sur les malins qui ont pu dépasser ces interdictions camouflées. Les entrepreneurs en ont souffert plus que d'autres, certaines entreprises ont dû cesser leurs activités basées essentiellement sur internet. C'est ce qui a fait revenir le gouvernement sur sa décision pour rétablir internet, mais seulement le fixe. Le mobile étant le plus utilisé par les consommateurs et plus particulièrement, dans ce cas, les contestataires. Cette redoutable arme politique a finalement été rétablie quatre jours après.

Cette première bataille, remportée par la contestation et donc perdue par le président, n'a pas eu un effet dissuasif sur ce dernier. Il a trouvé un autre biais, une autre manœuvre de guerre, en quelque sorte. Puisque la loi électorale ne peut plus être changée, on peut agir sur le corps électoral. C'est comme ça que le président Kabila a eu l'idée de lier la tenue des élections à l'organisation d'un recensement général de la population pour déterminer le corps électoral.

Or, une opération de cet ordre ne peut pas se dérouler immédiatement, dans un pays aussi grand que toute l'Europe de l'Est, manquant, qui plus est, d'infrastructures. L'opposition y a senti le piège. Une autre manière de contourner la Constitution. Pas question là aussi de céder. Les élections se feront avec le corps électoral existant, le dernier recensement date de 1980. "Lier les élections au recensement équivaudrait à les reporter indéfiniment" a déclaré Geogratias Chimere, professeur de sciences politiques à l'université de Goma. Là aussi la défaite de Kabila était entière et retentissante.

Mais a-t-il au moins changé d'avis? On pourrait comprendre que oui lorsqu'on entend la déclaration du porte-parole de gouvernement Lambert Mendé, disant que Kabila "souhaite respecter la Constitution". Sauf que les observateurs voient dans la nomination d'Evariste Boshap, un supporter déterminé d'un troisième mandat, comme vice-premier ministre, un fait qui contredit ce souhait.

À la longue, le président commence à recenser les défections dans son propre camp. Ancien ministre, Jean-Claude Muyambo Kyassa a quitté la coalition pour devenir une des figures dynamiques de la protestation.

Le gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, dont la popularité n'a cessé d'augmenter, notamment pour avoir développé sa province, a créé les bases de la contestation politique. Si en 2011, Joseph Kabila n'avait pas de sérieux challengers aux présidentielles, il n'en est plus désormais de même pour celles de 2016. Moïse Katumbi est vu comme le plus probable successeur de Kabila à la tête du pays. A son retour de Londres, où il était allé pour des soins, une foule immense l'attendait. Le désormais rival de Kabila y a prononcé un discours qui ne cache rien de sa volonté de se constituer en leader des contestataires. Joseph Kabila ne pouvait pas ne pas réagir. Il a senti que le Katanga qui est aussi sa région natale commençait à lui échapper.

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Avril 2018

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