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La vision sombre de Donald Trump

Couper les investissements dans la recherche et le développement, c'est manquer de vision à long terme. Les plus âgés se souviendront que le Canada a vécu une situation analogue à la fin des années cinquante.
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Dans les manchettes de cette semaine, nous apprenons que le Président Trump est en train de déposer un budget qui serait conforme à sa politique du «America First». Au menu, coupures dans la recherche, aux organismes qui protègent la qualité de l'eau, à l'Environmental Protection Agency (EPA), aux recherches sur la santé et à tout ce qui pourrait aider la lutte aux changements climatiques.Comme le déplorait M. Matt Hourihan, directeur du R&D Budget and Policy Program de l'American Association for the Advancement of Science, c'est catastrophique pour la science et les entreprises en technologie.

Au lieu de travailler de concert avec les autres nations, M. Trump préfère gonfler ses biceps avec un budget militaire démesuré. Cette politique égoïste pèche par une approche à très court terme, incapable de prévoir plus loin que le rapport financier du prochain trimestre. C'est aussi une politique de mauvais voisinage qui prône la loi du plus fort. Lorsqu'il proclame qu'il veut abandonner le programme de dépollution des Grands Lacs, même notre timide ministre de l'Environnement, M. Heurtel, ose exprimer son inquiétude. La renégociation forcée de l'ALÉNA est aussi basée sur un protectionnisme digne des années trente. La conférence de presse avec Mme Merkel démontre son manque de savoir-vivre en présence de la chef d'État d'un pays allié. Et comme politique de mauvais voisinage, je n'ai même pas parlé du mur de la honte avec le Mexique...

Couper les investissements dans la recherche et le développement, c'est manquer de vision à long terme. Les plus âgés se souviendront que le Canada a vécu une situation analogue à la fin des années cinquante. Le nouveau premier ministre conservateur, M. John Diefenbaker, n'aimait pas certains dirigeants de l'industrie aéronautique; il y voyait un nid d'adversaires libéraux. Malgré le fait que les prototypes du nouvel avion supersonique Avro Arrow et son moteur Iroquois étaient techniquement des décennies en avance sur ses concurrents, M. Diefenbaker ordonna d'en détruire tous les prototypes et même les plans. Les 14 525 ingénieurs, concepteurs et techniciens se sont retrouvés au chômage. Les É.-U. les ont attirés et «nos cerveaux» ont formé le noyau de la nouvelle NASA (National Aeronautical and Space Agency) et de son programme spatial.

La minisérie de la CBC The Avro Arrow: Canada's Broken Dream fait allusion à une légende du monde aéronautique canadien. Malgré les ordres formels de M. Diefenbaker, un avion aurait échappé au découpage au chalumeau. Il aurait quitté la piste et aurait «disparu»! Et cette même légende veut que le SR-71, le légendaire «Blackbird» qui a été la fierté de l'aviation américaine pendant trois décennies, ait été en fait un Avro Arrow légèrement modifié... Le président Kennedy avait un projet emballant : aller sur la lune. La NASA, nouvellement formée, a attiré les ingénieurs canadiens au chômage ainsi que des chercheurs allemands, dont Wernher von Braun. N'oublions pas que la recherche du programme spatial a également permis de développer, puis de commercialiser de nombreux articles qui sont dans notre vie quotidienne, comme le velcro et les calculatrices électroniques.

En tant que leader en aéronautique, le Canada aurait pu vendre des milliers de ces avions supersoniques à ses alliés. À cause du manque de vision du premier ministre et de son obstination partisane, il s'est contenté d'acheter des avions de qualité inférieure construits dans d'autres pays. Il a fallu des années de travail acharné pour que l'industrie aéronautique canadienne redevienne une plaque tournante de calibre mondial, grâce à une nouvelle vision.

Trump et ses climatonégationnistes, butés dans leur pensée archaïque, sont déterminés à protéger les industries fossiles et la richesse du 1%, ces richissimes individus que le président Theodore Roosevelt appelait les «malefactors of great wealth». Ils confondent leurs intérêts privés pour le prochain trimestre avec les intérêts à long terme de leur pays. L'application de l'Accord de Paris sur le climat, par exemple, pourrait rapporter aux États-Unis des billions de dollars dans les prochaines décennies. On peut déplorer cette politique d'un pays voisin, mais, on n'y peut pas grand-chose, sauf faire des représentations diplomatiques pour tenter de réduire les dommages collatéraux que leur politique néfaste aura sur nous, comme la pollution des Grands Lacs et la renégociation de l'ALÉNA. La folie trumpiste, c'est comme une mauvaise grippe; ça va passer avec le temps. Déjà, le système immunitaire de la démocratie américaine entre en jeu pour neutraliser ce virus malsain. En attendant, tâchons de tirer notre épingle du jeu en misant sur une occasion d'affaires; attirons ces chercheurs américains au chômage pour y aller à fond de train dans les énergies vertes... et devenir un leader industriel avant que l'économie américaine, affaiblie, revienne au bon sens.

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