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Assis sur deux chaises hautes dans un fast-food aux allures de café tendance, avec ses couleurs boisées, deux hommes. Un père et son fils, semblerait-il. Le dessert caramélisé terminé, voilà que le jeune homme ferme les yeux, joint ses deux mains l'une contre l'autre et fait un signe de croix. Il est aussitôt emboîté par son père.
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Assis sur deux chaises hautes dans un fast-food aux allures de café tendance, avec ses couleurs boisées, deux hommes. Un père et son fils, semblerait-il.

Le premier, la cinquantaine bien tassée, les tempes grisonnantes, l'allure bedonnante et austère, se tient droit comme un piquet, le journal du jour entre les mains, qu'il parcourt distraitement tout en parlant au jeune homme. Celui-ci, dans la fleur de sa pétillante vingtaine, a les cheveux verts noués en queue-de-cheval et les traits androgynes. Il contemple en salivant son triple cheeseburger dégoulinant et ses frites salées à souhait.

Le père (présumé), n'a rien commandé, pas même un café. Il regarde manger son fils (présumé). Leur conversation est légère, à bâtons rompus et complice. Ils discutent famille, sport et politique. Le garçon engloutit son repas calorique. On aimerait bien savoir comment il métabolise, lui si longiligne dans son pantalon de cuir étroit. Il s'apprête à prendre la parole la bouche pleine lorsque son téléphone cellulaire sonne. Il retire les écouteurs de son lecteur musical qu'il avait gardés tout le long et de ses mains, enduites de gras, colle le combiné sur son oreille percée de multiples trous. Un jeune des temps modernes.

- Excuse-moi Pops, ce ne sera pas long.

En moins de cinq minutes, une soirée est arrangée au téléphone et une confirmation à tous ses «potes» sera envoyée par Facebook. Pourvu qu'il ne soit pas un de ces malheureux, qui se sont retrouvés avec des centaines d'invités, alors qu'une poignée d'entre eux avait répandu la nouvelle sur la Toile sans en avoir mesuré les conséquences. Puis ils reprennent leur discussion. Le fils, tout excité à l'idée de sa super soirée, donne moult détails au père de ce qui s'y passerait. Ce dernier le regarde avec des yeux plein de tendresse et d'amusement.

Le dessert caramélisé terminé, étonnement ! Voilà que le jeune homme s'essuie la bouche, prend une longue gorgée de son soda, baisse la tête, ferme les yeux, joint ses deux mains l'une contre l'autre et fait un signe de croix. Il est aussitôt emboîté par son père, et les deux récitent en chœur, tout bas, une prière de remerciement. Ils refont leur geste en signe de ponctuation de la fin de leur gratitude, se lèvent, le jeune homme vide son cabaret, puis ils s'en vont.

L'aspect insolite de la chose surprend agréablement les fervents croyants. Elle amuse, ou dérange les autres. Au-delà, le plus étonnant demeure la conviction religieuse d'un jeune appartenant à une génération de revendications, de volonté de changement, pour la plupart athée, et qui, de plus, parjure avec des mots tous droits sortis des Évangiles, mais dit merci petit Jésus après avoir bien mangé et bien bu. C'est bien là un petit constat que la génération Y n'est finalement pas si insouciante que ça. Elle qui allie le contemporain et le traditionaliste avec un côté « F... the système» !

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