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Gare à cette sainte que je ne saurais admirer!

Dimanche dernier, le pape François canonisait la maintenant « sainte » Teresa de Calcutta. Devant cet acte pontifical et les cris « santa subito » suite à son décès, les détracteurs des positions de l'Église n'ont pas tardé à s'insurger contre la petite sainte de Calcutta.
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Dimanche dernier, le pape François canonisait la maintenant « sainte » Teresa de Calcutta. Il n'a fallu que quelques années de plus que son grand ami Jean-Paul II pour recevoir la même reconnaissance infaillible de l'Église. Devant cet acte pontifical et les cris « santa subito » suite à son décès, les détracteurs des positions de l'Église n'ont pas tardé à s'insurger contre la petite sainte de Calcutta, qui, on le sait, incarnait le radicalisme de l'engagement évangélique.

Dans cette pléthore de calomnies, on note facilement un fil conducteur, la contradiction foncière de la nouvelle sainte avec la doxa d'une certaine intelligentsia qui cherche à légitimer son inertie en décrétant son anathème. Je voudrais ici prendre quelques instants pour répondre aux accusations d'un article publié par le Huffington Post le 3 septembre dernier intitulé : En canonisant Mère Teresa, le Pape proclame une sainte aux parts d'ombre controversées ». Bien que le titre manifeste déjà une attitude dubitative devant la légitimité de la canonisation, le choix du mot « controversées », ce nouveau péché mortel de la morale politiquement correcte, montre d'emblée l'orientation de l'article.

En effet, comment ne pas se méfier de cette petite dame aux apparences inoffensives. Pour nous en convaincre, pourquoi ne pas sortir des boules à mites cette vieille polémique avec le regretté Christopher Hitchens dénonçant l'ancienne mère supérieure d'une trop grande fidélité au Magistère de l'Église. En ce sens, comment ne pas sourire lorsqu'on entend les détracteurs de la vision de l'Église se faire les porte-étendard de sa prétendue véritable interprétation.

Mère Teresa aurait été ainsi « en retard sur les textes officiels de l'Église » cite-t-on comme « encyclique » de référence de l'avant-garde ecclésiale évidemment plus objective que l'enquête doctrinale stricte dont chacune de ses paroles furent l'objet lors de son procès de canonisation tel que demandé par la Congrégation pour la Cause des saints (p.47). Bref, le verdict est donné, la nouvelle sainte ne peut être qu'une imposture puisque sa posture doctrinale fait d'elle une « conservatrice ».

Ce n'est pas tout. Mère Teresa n'aurait également pas voulu laisser ses convictions dans l'anonymat de sa conscience lorsqu'on lui demandait ce qui était derrière sa totale dédication « aux plus pauvres d'entre les pauvres ». Sous son hospice et "Au nom du service, des conversions religieuses étaient effectuées" aurait affirmé le chef du RSS Mohan Bhagwat, un mouvement plusieurs fois critiqué pour sa vision fermée, intolérante et faisant la promotion d'une vision suprématiste hindou à l'intérieur de la société indienne. Il ne faudrait pas se surprendre d'une telle critique venant d'un représentant d'une idéologie anti liberté religieuse, niant le droit de chaque personne en son âme et conscience de choisir sa foi. Ne vous inquiétez pas, pourrait-on lui répliquer. Les possibles conversions des moribonds des mouroirs de sainte Teresa de Calcutta n'auront aucun impact statistique qui pourrait menacer le pouvoir de ceux qui, comme lui, font de la religion un instrument politique.

«La sainteté n'est pas l'équivalent de la perfection et les plus grands saints confessent leurs péchés comme n'importe qui d'autre.»

Sur les maladroites attaques ad personem par association dont l'article est rempli, je dirais simplement que 1000 accusations ne font pas une condamnation. De plus, à voir l'acharnement de ceux qui ne veulent plus croire en la réalité (et non l'idée) de la bonté humaine, la justice aurait eu tôt fait de lui interdire toute opération si l'implication intentionnelle et malveillante de la mendiante mondialement renommée s'était avérée véridique.

Enfin, on se scandalise que la sainte ait pris au sérieux le sens de la souffrance. On se désole que la sainte ait opté pour des règlements d'établissements conformes à la vision chrétienne de la souffrance et de la mort. La mission des institutions de Mère Teresa n'a jamais consisté à opérer des hôpitaux, mais bien à accompagner les mourants dans cette étape ultime au lieu de les laisser mourir dans la saleté des rues polluées d'indifférence; abandonnés qu'ils étaient, et qu'ils sont toujours, à leur propre sort. Répartir les ressources financières de manière à aider le plus de personnes possible fut sans aucun doute le motif premier des politiques budgétaires de la sainte. Entacher la réputation de celle dont le dévouement était total parce qu'elle préférait donner à manger ou héberger plus de personnes plutôt que « d'installer un chauffe-eau » me semble grotesque.

Il est vrai que beaucoup de ceux qui n'osent pas se mettre au service de leur prochain utilisent souvent l'expression « Je ne suis pas Mère Teresa » : sorte de manière humoristique de se déculpabiliser. Il est cependant une autre attitude beaucoup plus hypocrite. Celle qui consiste à ne pas faire son « mea culpa » en dénigrant ceux et celles qui s'engagent sur la voie du service et de l'amour du prochain. La sainteté n'est pas l'équivalent de la perfection et les plus grands saints confessent leurs péchés comme n'importe qui d'autre. Toutefois, le genre d'articles dont je viens de faire la critique participe, je crois, d'un cynisme exacerbé ainsi que d'un pessimisme consommé.

Loin d'aiguiser le sens critique, ils ont plutôt pour effet d'enfermer leurs adhérents dans le confort de leur indifférence, préférant la pureté de l'inaction au courage de la sensibilité et du dévouement. Que l'exemple de Mère Teresa continue de briller parmi nous et qu'elle inspire encore davantage ceux qui n'ont pas peur de la grandeur de la «bonté».

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