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Reconstruire la Syrie: avec le Canada

Tôt ou tard, il faudra y commencer la reconstruction et le retour des réfugiés.
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Pourquoi ne pas commencer par reconstruire Alep?
Omar Sanadiki / Reuters
Pourquoi ne pas commencer par reconstruire Alep?

Il y a 70 ans l'Europe était à genoux, des suites de la Deuxième Guerre mondiale. Grandes villes et infrastructures détruites, économies en lambeaux, millions de réfugiés et populations déplacées. Staline plaçait ses pions dans les pays occupés en Europe de l'Est et menaçait les zones alliées.

Comprenant le danger et le besoin de remettre le continent sur les rails (tout en cherchant un débouché pour ses produits) les États-Unis mettaient alors sur pied un généreux système de prêts et d'assistance financière permettant au continent de renaître : le Plan Marshall. Cette initiative a clairement réussi. L'Europe est désormais en paix. L'Union européenne est devenue un géant économique et la démocratie règne.

En 2017, mais à une moindre échelle, c'est au Moyen-Orient que le désespoir s'est installé. Après 6 ans de conflit fratricide en Syrie et en Irak des villes comme Hama, Homs et Alep ont énormément souffert des combats et à Mossoul, c'est sur des ruines fumantes que se célèbre la libération du joug du Groupe État islamique.

Il se pourrait qu'un début de lumière fasse jour au bout du tunnel...

En Syrie, le bilan de la souffrance humaine est impressionnant. Centaines de milliers de morts et blessés, millions de réfugiés internes et à l'étranger, hôpitaux et écoles bombardées, etc. La situation n'est pas encore stabilisée, loin de là, mais on note une diminution des affrontements dans certaines zones et des négociations de paix se déroulent (jusqu'à maintenant sans succès). Il se pourrait qu'un début de lumière fasse jour au bout du tunnel...

Tôt ou tard, il faudra y commencer la reconstruction et le retour des réfugiés. Des organisations internationales commencent sans doute à les planifier.

L'histoire au Moyen-Orient nous apprend qu'il est toujours plus facile de mobiliser des coalitions militaires que d'investir dans la reconstruction et le bien-être de populations civiles traumatisées.

Si l'on se base sur l'expérience libyenne et l'invasion de l'Irak par les forces américaines il y a fort à parier que ce n'est malheureusement pas le cas dans les capitales occidentales. L'histoire au Moyen-Orient nous apprend qu'il est toujours plus facile de mobiliser des coalitions militaires que d'investir dans la reconstruction et le bien-être de populations civiles traumatisées.

Les coûts pour rebâtir la Syrie et la réinstallation des déplacés seront exorbitants. Toutes sortes de chiffres circulent, mais ils sont sans doute imprécis, faute de véritables évaluations sur le terrain. À part l'Union européenne on voit difficilement d'où viendront les fonds. Les pays du Golfe sont généralement les principaux contributeurs dans ce coin du monde. Ils participent déjà généreusement aux divers appels de fonds des Nations Unies. Mais la campagne que l'on constate actuellement à l'initiative des Saoudiens et de ses affidés contre le Qatar ne facilitera pas la démarche.

On ne peut sûrement pas compter sur l'administration Trump pour proposer un plan Marshall version 2017!

Ce ne sont pas les Russes non plus qui mettront la main au portefeuille et les Iraniens ont des moyens limités et se concentrent sur l'Irak. Quant au gouvernement syrien, sa crédibilité auprès de la population qu'il a massacrée doit être au plus bas, sauf auprès de quelques minorités. Il faudra donc que toute la communauté internationale s'y mette. L'ONU espère sûrement que cela soit le cas.

Après l'invasion du Koweït par Saddam Hussein au début des années 90, la communauté internationale avait forcé l'Irak à payer de lourdes compensations. Elle pouvait compter sur les revenus pétroliers de Bagdad pour se faire. Mais, dans le cas présent, il n'y a pas de pays directement impliqués, mais divers groupes djihadistes d'opposition au régime Al Assad.

D'aucuns diront qu'il est trop tôt pour envisager la reconstruction. Il faudra rapidement rétablir un semblant de vie normale dans cette région pour que les réfugiés retournent.

Le projet de remettre la Syrie en état sera long et ardu notamment parce que le principal instigateur de cette spirale tragique Bachar Al Assad est toujours à Damas et que ses appuis à Moscou, Téhéran et le Hizbollah ne sont pas prêts de le lâcher. Il s'agit du programme d'une génération.

La reconstruction du centre-ville de Beyrouth après la guerre civile au Liban est, à mon avis, un exemple à cet égard.

Pour amorcer le mouvement, il faudrait se concentrer d'abord sur un projet phare, porteur d'espoir. La reconstruction du centre-ville de Beyrouth après la guerre civile au Liban est, à mon avis, un exemple à cet égard.

Découlant des efforts de l'ancien Premier ministre Hariri et du secteur privé elle n'a pas été à l'abri de problèmes financiers et politiques, mais il a servi néanmoins à démontrer aux Libanais l'importance de travailler ensemble et de ramener leur fierté. À la surprise générale, le Liban n'a pas bronché lors du printemps arabe et depuis, malgré les difficultés intérieures et le conflit à ses frontières.

Pourquoi ne pas commencer par reconstruire Alep? Centre économique traditionnel de la Syrie, ville multiconfessionnelle et site classé de l'UNESCO. Le secteur privé syrien (ou ce qu'il en reste), mais surtout un leadership international devrait s'y mettre.

Le Canada pourrait encourager à la création d'une coalition de pays pour pareil chantier.

Le Canada pourrait encourager à la création d'une coalition de pays pour pareil chantier. L'UE bien sûr, mais aussi la Turquie qui serait soulagée de voir les réfugiés sur son sol retourner en Syrie serait sans doute intéressée. Pourquoi pas la Chine? Rebâtir Alep créerait du travail pour la population locale et des contrats.

Le gouvernement Trudeau veut obtenir un siège au Conseil de sécurité en 2020. On ne connaît pas vraiment ses plans à cet égard. Profitons de notre bonne image actuelle en ce qui concerne notamment la vision d'un avenir multiculturel pour nos sociétés, en lançant une initiative d'envergure mondiale pour la reconstruction d'Alep.

Des fondations privées comme celle de l'Aga Khan, par exemple, pourraient aussi être parties prenantes.

Ce projet pourrait engendrer une coopération exemplaire entre pays musulmans et non-musulmans. Et qui sait, les belligérants d'hier pourraient devenir les alliés de demain. Il mettrait de l'avant les valeurs canadiennes au plan de la politique étrangère et de l'aide au développement. Et le Québec qui se targue de sa présence à l'UNESCO pourrait mettre l'épaule à la roue.

Permettons-nous donc de rêver en ces temps compliqués... C'est l'été, après tout.

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