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L'Arabie saoudite: facteur d'instabilité au Moyen-Orient

Un président américain dangereux et infantile comme celui que l'on trouve actuellement à Washington pourrait croire que par un autre conflit au Moyen-Orient, il pourrait augmenter sa cote de popularité et détourner les scandales contre lui.
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Depuis des années, l'Arabie saoudite tente de devenir le leader du monde arabe. L'Égypte qui l'était depuis Gamal Abdel Nasser a graduellement perdu ce titre, depuis le traité de paix avec Israël. Le régime actuel du président égyptien Al-Sisi se maintient difficilement à flot grâce à l'aide financière des pays du Golfe et se bat contre le terrorisme de la section locale du groupe État islamique et emprisonne son opposition intérieure.

Les Saoudiens n'ayant pas l'influence culturelle et historique de l'Égypte la remplacent par le carnet de chèques. Ces rentiers du pétrole en profitent aussi pour faire avancer leur version conservatrice de l'islam, le wahhabisme, notamment par le financement de mosquées à l'étranger et l'organisation des pèlerinages à La Mecque.

Depuis l'accession au pouvoir du roi Salmane, le royaume s'avère plus actif sur la scène régionale. Intervention militaire au Yémen et plus récemment rupture diplomatique et blocus du Qatar.

À ce stade, on ne peut que conclure que l'opération au Yémen s'enlise malgré une supériorité militaire évidente. Ce conflit est d'ailleurs caractérisé par un non-respect des règles du droit international humanitaire et se révèle une véritable catastrophe pour le peuple et la société yéménite qui doit maintenant affronter choléra et famine dans l'indifférence quasi complète de la communauté internationale.

En ce qui concerne les mesures contre Doha, il est trop tôt pour juger des résultats, mais on ne peut que s'interroger sur les motifs et le choix du moment. Riyad est appuyé par d'autres nations (Bahreïn, Égypte, Yémen et Émirats arabes unis, entre autres) pour des raisons financières ou du besoin sécuritaire .

Plusieurs explications ont été évoquées pour justifier ce boycottage du Qatar. On accuse le pays d'aider le «terrorisme», et on s'en prend à la chaîne Al-Jazeera basée et payée par l'Émirat, mais c'est surtout sa politique de bonnes relations avec l'Iran qui semble l'élément moteur.

La première accusation, venant d'un pays qui a fourni au cours des ans de l'aide, directement ou par l'entremise de citoyens saoudiens, à une vaste palette de groupes djihadistes sunnites (le plus fort contingent étranger du groupe État islamique est saoudien) peut faire sourire d'autant plus que les actes terroristes actuels sont essentiellement causés par des éléments sunnites et non pas d'inspiration iranienne ou chiite.

L'Arabie saoudite et quelques autres pays sunnites de la région craignent la montée en puissance de l'Iran et de ses alliés chiites. Longtemps considérés comme des citoyens de deuxième classe (sinon pire) au Liban et en Irak, les chiites de ces deux pays ont pris leur place légitime dans leurs sociétés respectives.

L'Iran fort de son entente sur le nucléaire et de la réélection du président Rouhani (à quand de véritables élections en Arabie Saoudite?) revient graduellement sur la scène internationale. D'autre part, sans les chiites irakiens et l'assistance iranienne, Mossoul et une grande partie de l'Irak seraient encore entre les mains des djihadistes et menaceraient le royaume saoudien. Hizbollah et les Iraniens contribuent cependant au maintien au pouvoir de Bachar Al Assad en Syrie. L'appui direct de Téhéran aux Houthis yéménites n'a jamais été vraiment prouvé, à l'origine.

On indique que l'initiative contre le Qatar découle d'une assurance que Ryad aurait reçue de Washington à la suite de la visite de Trump là-bas. Cette complicité renouvelée entre l'administration américaine et la monarchie saoudienne, après un passage à vide sous l'administration Obama, n'augure rien de bon. Avec une diplomatie trumpiste totalement incohérente, on peut se demander où tout cela va nous mener.

Cette complicité renouvelée entre l'administration américaine et la monarchie saoudienne, après un passage à vide sous l'administration Obama, n'augure rien de bon.

Certains analystes comparent d'ailleurs cette crise avec le Qatar à celle de la guerre de 1914-1918 qui de l'assassinat de l'Archiduc Ferdinand à Sarajevo a dégénéré vers une hécatombe tragique, à la suite du jeu des alliances de l'époque.

Le parallèle est sans doute exagéré, mais on peut sérieusement se demander si comme jadis des dirigeants mondiaux ne sont pas en train de nous mener à une conflagration. Des pays du Golfe se croyant à tort ou à raison appuyés par Trump sont à manoeuvrer pour isoler Téhéran. Pour l'instant, ce n'est pas nouveau.

D'autres pays se retrouvent impliqués aussi. Une campagne contre l'Iran profite à Israël de même qu'une éventuelle coupure de financement du Hamas par le Qatar . Le rôle de la Turquie est intéressant. Elle n'a pas pris de temps à tirer les marrons du feu en augmentant son commerce et sa place au Qatar. Le Parlement turc a donné rapidement son feu vert au déploiement de troupes sur une base turque dans l'Émirat, une première depuis le démantèlement de l'Empire ottoman.

Les Iraniens restent prudents. Tout en profitant de cette crise pour envoyer des produits aux supermarchés qataris. Sans doute que les mollahs, habitués aux crises à répétition et réconciliations parfois rapides dans ce coin du monde, savent que le souffle de l'histoire est de leur côté, pour l'instant, et que les régimes pétroliers sunnites sont sur des bases fragiles et dépendent du chapeau militaire américain.

Mais si les tensions montent, on peut craindre une spirale incontrôlable. Un président américain dangereux et infantile comme celui que l'on trouve actuellement à Washington pourrait croire que par un autre conflit au Moyen-Orient, il pourrait augmenter sa cote de popularité et détourner les scandales contre lui.

Il est à espérer que les efforts de médiation du Koweït, notamment, seront récompensés et que le bon sens politique prévaudra. Malheureusement, il est souvent trop rare dans cette région.

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