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Les déprimés de Games of Thrones

La saison 4 de, tant attendue par des fans du monde entier, ne saurait tarder. L'occasion pour nous de revenir sur un épisode qui a particulièrement marqué (ou traumatisé) les esprits,, le neuvième de la saison 3.
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ATTENTION SPOILERS

La saison 4 de Games of Thrones, tant attendue par des fans du monde entier, ne saurait tarder. L'occasion pour nous de revenir sur un épisode qui a particulièrement marqué (ou traumatisé) les esprits, The Rains of Castamere, le neuvième de la saison 3.

Créée en 2011 par David Benioff et D.B. Weiss et diffusée sur HBO, Game of Thrones est très vite devenue un phénomène. Par l'ampleur de sa production d'une part, avec un budget estimé entre 50 et 60 millions de dollars pour la saison 1, dont 5 à 10 millions consacrés au pilote. Par l'engouement du public d'autre part, qu'elle a suscité dès ses débuts, rassemblant 2,5 millions de téléspectateurs aux États-Unis. Ce chiffre n'a cessé de croître et atteint actuellement en moyenne 5 millions de fidèles. Cela fait de la saison 3 la plus regardée de toutes les séries de HBO, après la cinquième des Soprano. C'est également la série la plus téléchargée illégalement depuis deux ans. Le dernier épisode diffusé a été téléchargé un million de fois en un jour...

Tirée des romans de George R.R. Martin, Game of Thrones est, selon l'un de ses créateurs, "Les Soprano dans la Terre du Milieu": un fin mélange de pouvoir, de sexe, de violence sur fond de décors moyenâgeux et de phénomènes surnaturels. Ses inspirations heroic fantasy mêlées de thèmes universels et intemporels ont contribué à forger et accroître une communauté de fans toujours plus grande, investie et participative. Présente dès le début, elle s'est révélée suite à la diffusion du neuvième épisode de la saison 3 et a pris des formes d'expression étonnantes.

Cet épisode, surnommé "Red wedding" par les fans, fut diffusé le 2 juin aux Etats-Unis. Avant-dernier épisode de la saison, il montre le massacre du clan Stark, particulièrement sanglant et surtout totalement inattendu. Très vite, les premières impressions inondent Twitter et le hashtag #GoT devient un trend topic. Même Maisie Williams, Arya Stark dans la série, poste une vidéo déplorant la mort de son père et de sa mère. Les tweetos se demandent comment les créateurs ont pu faire une chose pareille, certains font part de leur anéantissement et d'autres annoncent leur suicide imminent...

Les veinards qui avaient lu les livres, et connaissaient donc le dénouement de l'épisode, ont préféré filmer les réactions de leur entourage. Celle de Steven, resté bouche bée face à ce qu'il vient de se passer; de "papa", qui n'avait rien vu venir et s'offusque que même les chiens ne soient pas épargnés; d'une femme qui se demande s'ils comptent tuer tous les personnages de la série ; d'un couple qui s'y attendait, mais qui n'en reste pas moins choqué.

Quelques jours plus tard, l'épisode donne lieu à une expérience scientifique. Marko Plahuta, un Slovénien, mesure son rythme cardiaque durant tout l'épisode et constate qu'il s'accélère nettement durant le massacre... Devant l'ampleur du phénomène, le site Buzzfeed publie un guide de 25 étapes pour parvenir à surmonter la dépression post-"Red wedding".

Entre temps, la dépression a traversé l'Atlantique... Les Français ont eux aussi découvert à leur tour l'épisode. Un groupe de soutien psychologique est créé sur Facebook dès le 4 juin, un autre sous forme de forum le lendemain. "Les dépressifs de GoT" se soutiennent et partagent leur désarroi, sous forme de private jokes, de réactions à chaud, de parodies que seuls les fans peuvent comprendre.

La Game of Thrones depression est en somme à l'image des tendances nées du web 2.0. Elle révèle ce tissu de relations numériques qui unissent les fans des séries et indique aussi le rôle de cet outil technologique en matière d'uniformisation des comportements.

Si Games Of Thrones était née dans les années 90, les "dépressifs" engendrés par le "Red wedding" auraient broyé du noir chacun dans leur coin. Aujourd'hui, grâce à Internet, ils peuvent s'offrir les services d'une thérapie de groupe et partager leur peine.

Mais cette communion réparatrice va de pair avec les apprentissages quant à la façon de réagir et de gérer ses émotions face à une fiction. En regardant de plus près, les réactions des personnes filmées par leur entourage apparaissent en effet très stéréotypées, voire exagérées. Chacun a voulu jouer le rôle attendu du spectateur surpris. Et face à la caméra d'un fils, d'une sœur ou d'un ami, adopter une conduite appropriée: des pleurs, des cris ou un silence contraint, voire une phrase questionnant la rude scène du massacre. Mais qu'importe! Pour le filmé comme pour le preneur d'image, il y avait un intérêt commun. Celui qui savait que la brutalité devait surprendre avait à son heure été aussi bouleversé. Il cherchait l'écho de sa propre agitation dans l'attitude de l'autre. Le piège devenait ainsi partage et l'épisode pouvait servir de point de départ à une communication des sentiments dans un cercle de proches.

Le soulagement de l'émotion passe donc par un échange de pressions: ceux qui filment prescrivent les gestes de leurs proches. Et ces derniers leur rendent l'attitude espérée, l'attitude à prendre en charge. Chaque individu va se conformer à cet étrange rituel. La série crée ainsi un nouveau cérémonial, une communion autour de son scénario et de ses rebondissements. Elle fédère des fans pour qui le frisson passe de l'écran au salon, grâce à au monde impitoyable de Robert Baratheon.

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