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L'impression 3D, pointe émergée d'une révolution industrielle

Une imprimante tridimensionnelle suffisamment petite, facile d'utilisation et à un prix abordable pour être utilisée par n'importe qui? Il y a quelques années de ça, beaucoup d'entre nous n'y auraient pas cru.
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Une imprimante tridimensionnelle suffisamment petite, facile d'utilisation et à un prix abordable pour être utilisée par n'importe qui? Il y a quelques années de ça, beaucoup d'entre nous n'y auraient pas cru. Néanmoins, des appareils tels que le MakerBot donne aujourd'hui la possibilité de concrétiser toujours plus de désirs de création de nouveaux objets et de nouvelles productions: au-delà d'objets simples de la vie courante, le spectre des applications est infini, par exemple la médecine (impression de prothèses), la cuisine (impression de gâteaux), ou même la construction de bâtiments (empilage de briques par des hélicoptères robot).

La technologie de l'impression 3D existe depuis des années, mais ne se diffuse dans le grand public que depuis récemment, par exemple avec le cas très médiatisé de l'impression d'un fusil en 3D. La baisse du coût y a bien sûr largement contribué, avec des imprimantes approchant la barre des 1000 dollars. Plus fondamentalement, l'impression 3D va permettre une révolution entrepreneuriale, car elle libère le potentiel créatif d'une cible idéale d'early adopters (premiers acheteurs): l'entrepreneur-hacker.

Ce terme de "hackers" recouvre ceux qui désirent bricoler les objets, les modifier, mais pas obligatoirement le fait de se mettre hors-la-loi. Les hackers se sont immédiatement approprié les imprimantes de MakerBot, qui ont émergé simultanément à la mouvance "make" ("faire") aux USA. Le mouvement "make" cristallise auprès d'une génération d'adultes sophistiqués - éduqués et très au fait des nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC) - le goût de travailler des objets du monde réel, et non plus seulement de développer dans le monde virtuel de l'Internet.

Impression 3D de la main inMoov

De la même manière que la révolution Internet a rendu tout un chacun potentiellement entrepreneur dans les NTIC, l'imprimante 3D va révolutionner la manière dont nous pensons l'entrepreneuriat dans le monde physique et plus seulement virtuel. Cela parce que le développement de prototype d'objets devient bien plus abordable. Et l'on peut considérer que ceci s'appliquera à des services physiques si l'on considère la construction de bâtiment ou la fabrication de prothèse va bien au-delà d'une question d'objets.

Bientôt, chacun pourra imaginer une innovation, la développer et la déployer en démarrant seulement avec quelques unités à un coût raisonnable. Avant l'impression 3D, l'aspirant entrepreneur qui voulait développer un objet physique se trouvait face à un obstacle formidable: la création d'un prototype et des premières séries. Malheureusement, ces processus pré-industriel étaient très coûteux, en particulier si la technologie requérait de dessiner et produire un moule, ou une carte de logique embarquée. Avec des outils de prototypage rapide, les premiers lots peuvent être produits à coût marginal, ce qui implique qu'une levée de fonds n'est plus strictement nécessaire, ou en tous cas son besoin est grandement réduit.

Simultanément à l'émergence de l'impression 3D qui permet de créer l'enveloppe physique d'objets, d'autres aspects tels que des éléments de robotiques et d'interface physique deviennent aussi actuellement facilement développable par du 'grand public'. Ces éléments sont les chaînons manquants d'une révolution industrielle car ils étendent l'innovation à des objets qui agissent sur l'environnement physique, qui le sente. Ils permettront d'effacer la dichotomie entre d'un côté des services dans un monde virtuel (de l'Internet, du PC, du smartphone) et de l'autre des objets statiques qui ne sont qu'une enveloppe physique.

Ces derniers années ont vu l'émergence de tels environnements, Arduino et Raspberry Pi, qui vont permettre d'animer les objets en les dotant de caméras, de capteurs, de moteurs, senseurs, etc., et ce à prix minimal - une carte Arduino coûte entre 15 et 30 €. L'équation pour une explosion industrielle est alors complète: un objet ayant une enveloppe physique et des interfaces - c'est là que l'impression 3D entre en jeu - ainsi que des activateurs ou des capteurs - qu'on peut mettre en œuvre avec Raspberry Pi ou Arduino - et enfin une logique codé par un langage informatique. Avec tous ces ingrédients, il n'y plus de limite à la conception d'objets et de service.

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Des objets réalisés avec une imprimante 3D

A quoi ressemblera l'entrepreneuriat de demain? Le coût de prototypage étant déjà drastiquement diminué pour être proche de zéro, une dernière amélioration à apporter serait (A) de supprimer le besoin de lever des fonds auprès de financiers et (B) d'améliorer le feedback des futurs consommateurs.

Ce double objectif est aussi en train de se révolutionner sous la forme des financements participatifs en "crowd sourcing ". Grâce à des services comme Kickstarter, les clients potentiels peuvent soutenir des projets en payant en avance le produit, ce qui fournit - simultanément - financement et feedback!

Par exemple, sur Kickstarter, une poignée d'Australiens est en train de développer l'ampoule du futur, LIFX, attaquant frontalement Philips qui a un produit similaire baptisé Hue. LIFX illustre le type de projet qui n'aurait pas été possible il y a 10 ans, non pas parce que la technologie soit nouvelle, mais parce que l'amélioration des outils entrepreneuriaux a été décuplée.

Et cet écosystème entrepreneurial se densifie de jour en jour, par exemple la startup "Make That Thing" s'occupe, pour entrepreneurs, de la logistique avale d'une campagne Kickstarter, car celle-ci peut être lourde, quand il y a rapidement du volume. Une brique de plus pour permettre à de toutes petites équipe entrepreneuriale d'aller de l'idée à la production et à logistique de masse en étant seulement tiré par l'innovation et le désir des consommateurs.

Pour bien mesurer le changement, rappelons-nous que dans le paradigme entrepreneurial classique, le développement coûteux et la laborieuse levée de fonds font de l'entrepreneuriat un sport dangereusement spéculatif. Le business plan y joue un rôle central, objet incantatoire pour justifier de s'engager dans un long et sombre tunnel: une levée de fond plus le développement du premier produit prend typiquement un à deux ans, et le déploiement industriel n'est souvent pas testé avant premier grosse levée de fond qui se chiffre couramment en million. Finalement, cet argent sert souvent à faire du marketing, c'est à dire de tenter de forcer le consommateur à accepter l'innovation.

Par contraste, un nouveau paradigme entrepreneurial émerge, caractérisé par la facilitation et la baisse des coûts du prototypage, au financement et au test de marchés participatif, et à tout un écosystème de service permettant la montée en charge à coûts marginaux. Les opportunités seront donc bien plus nombreuses car tout va être question d'innovation, et de tester immédiatement, en marginal, et auprès de l'utilisateur final, l'équilibre des coûts vs. les bénéfices de l'innovation.

Si quoi que ce soit devait limiter la croissance de ces développements, l'obstacle majeur résidera dans la réglementation, spécifiquement concernant les questions de droits d'auteur et de la sécurité. Déjà, la régulation du fusil imprimable 3D a fait beaucoup parler d'elle. Mais la problématique sera d'autant plus forte lorsque les gens essaieront de réparer, de modifier ou d'augmenter les objets qui les entourent, bouillonnement d'activité qui fait partie des conditions d'adoption de ces processus par le plus grand nombre.

Les questions de droits d'auteur surgiront et les entreprises risquent de challenger le droit de chacun à effectuer de telles "reproductions", "modifications", ou "compléments", par crainte des pertes de revenus ... Ou par ignorance de l'opportunité constituée par cette appropriation par le consommateur. Cette crainte se cristallisera aussi, de bonne ou mauvaise foi, sous forme de questions de sécurité: par exemple, dans l'automobile, des pièces détachées bon marché - car imprimés à la maison - poseront de nouvelles problématiques de régulations.

Ce sera rapidement un domaine dans lequel les gouvernements envisageront d'intervenir et de légiférer, ce qui pourrait brider le décollage de cette révolution industrielle (dans certains pays). La protection d'un mode industriel existant pourra se retrouver en conflit avec un nouveau mode industriel, basé sur le bricolage et une innovation diffuse et brouillonne par le plus grand nombre. La brouhaha autour des imprimantes 3D sont le roulement de tambour de cette nouvelle bataille.

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