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Primaires ouvertes: à quoi bon quand le modèle actuel fonctionne?

Quelques aspirants à la chefferie du Parti québécois se sont récemment montrés intéressés à la proposition de tenir des primaires ouvertes. Bien que la proposition se veuille originale, nous croyons qu'il s'agit d'une mauvaise solution à un faux problème.
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Quelques aspirants à la chefferie du Parti québécois se sont récemment montrés intéressés à la proposition de tenir des primaires ouvertes, soit une élection où tous les sympathisants du Parti québécois seraient appelés aux urnes.

Bien que la proposition se veuille originale - celle-ci qui s'inspire de l'exemple de nos voisins français -, nous croyons qu'il s'agit d'une mauvaise solution à un faux problème. Il advient que le système politique auquel nous appartenons n'est tout simplement pas conçu pour ce genre de primaires et les désagréments engendrés par cette nouveauté sont plus grands que ses quelques avantages.

En 2011, lorsque le Parti socialiste a tenu des primaires ouvertes à tous les sympathisants en France pour investir François Hollande comme candidat aux élections présidentielles, la conjoncture n'était pas la même que celle au Québec actuellement. En effet, les primaires dans un régime présidentiel (États-Unis) ou semi-présidentiel, comme en France, ont lieu moins d'un an avant l'élection présidentielle : il s'agit là d'élire le cheval le plus apte à remporter une élection imminente. Au Québec, elles auraient lieu près de quatre ans avant les élections générales et ainsi la lune de miel avec les électeurs a plusieurs fois le temps de se terminer. Ce n'est pas un mythe de dire que 6 mois en politique sont une éternité : imaginons alors 4 années.

De plus, pour continuer avec la comparaison française, les primaires au Québec ne serviraient pas à élire un candidat, mais bien le chef d'un parti, qui aura, dès le lendemain, à siéger à l'Assemblée nationale à titre de chef de l'opposition officielle. Ce chef, en plus d'assumer des fonctions parlementaires devra aussi gérer son parti, avoir une relation avec les militants et les membres, ce qui n'est pas le cas pour le Président de la République pour qui les interactions avec le parti sont réduites au minimum. Si les primaires sont taillées sur mesure pour les régimes avec une composante présidentielle, elles ne le sont pas pour notre culture politique parlementaire. Par ailleurs, si des primaires avaient lieu, le chef élu suite à l'exercice ne sera pas nécessairement celui qui aura les meilleures propositions, ni celui dans lequel les membres du Parti québécois - ceux qui y militent jour après jour - se retrouveront.

Même si l'opération en France a soulevé la participation des gens, le Parti socialiste n'a pas davantage de membres aujourd'hui : au contraire, il en a perdu 25 000 en 2 ans. De l'aveu même de l'ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault, les primaires ouvertes ont contribué à fragiliser l'organisation politique et à réduire le débat à un choix de personnes - culte de la personnalité quand tu nous tiens -, plutôt qu'à réellement se questionner sur leurs politiques et la façon de les porter à la population.

Les gens favorables aux primaires avancent souvent que cela donnerait une attention médiatique continue au Parti, puisque les médias feraient leurs choux gras d'une telle course ouverte. Or, il ne se passe déjà pas un jour sans que les journalistes ne parlent de l'éventuelle course à la chefferie au Parti québécois en réaction à des déclarations ou réflexions d'éventuels candidats et candidates ; la course à la chefferie n'est un secret pour personne, et elle n'est même pas encore lancée. Ce qui est fort encourageant pour la suite.

Tendre à augmenter le nombre de sympathisants et l'accessibilité est louable, mais les primaires n'en sont pas le moyen miracle. Une course dite classique peut très bien «faire le travail». On se rappellera que l'élection à la direction du Parti québécois de 2005 a été le terrain d'un militantisme très actif. Les candidats de l'époque (neuf candidats officiels tout de même!) ont tout fait pour transmettre leur vision du Parti québécois aux militants et contribuer aux débats d'idées. Plus encore, ils ont déployé des efforts considérables pour augmenter le nombre de personnes pouvant participer au choix du chef. Ainsi, durant cette période, le membership a augmenté de 40 000 personnes, atteignant 140 000 membres, dont 76% se sont finalement exprimés lors du vote. Nul besoin d'un changement cosmétique tel que les primaires ouvertes pour raviver la flamme des Québécois donc. Rajoutons que la preuve est faite que débourser 5$ pour la carte de membre ne constitue aucunement une barrière à l'éventuelle course à la chefferie.

Actuellement, l'essentiel pour le Parti québécois est de se livrer à des débats de fonds autour de son identité et corriger «les manières de faire» qui n'ont pas fonctionné lors de la dernière élection. Soit, le Parti québécois a un besoin urgent de se reconnecter avec la population, mais cette idée de primaires ouvertes ne répond qu'illusoirement à ce besoin. À court terme, c'est peut-être intéressant, mais sur le moyen et long terme, les inconvénients d'une telle mesure feront surface et placeront le parti dans une position difficile à tenir. Nous sommes d'avis que les primaires n'auront pas les effets salvateurs évoqués par leurs défenseurs, particulièrement dans notre système parlementaire britannique où le chef se doit d'être au diapason avec son parti. En remerciant de leur contribution les défenseurs des primaires ouvertes(ici par exemple), nous sommes d'avis que le maintien du suffrage universel des membres demeure la meilleure option.

Ce texte est cosigné par Charles Picard-Duquette, Président des jeunes péquistes de l'Estrie

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