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Par respect pour les victimes, les politiciens devraient se tenir loin de toute forme de récupération politique et démontrer de la compassion, point final.
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Mathieu Belanger / Reuters

Difficile d'oublier ce 29 janvier maudit. L'incrédulité: pas au Québec! Pas à Québec!

Puis la réalité qui frappe après un attentat qui a fait des morts et des blessés à la Grande Mosquée de Sainte-Foy.

Pendant ces heures d'ombres, on a cru que c'était l'œuvre d'un commando, et non le geste d'un déséquilibré. Car un deuxième tueur était, croyait-on, toujours au large. Les informations se sont précisées au cours de la nuit et les autorités politiques ont activité une cellule de crise.

Les politiciens de tous les horizons ont trouvé dans ces heures cruciales le ton juste, les mots qu'il fallait pour surmonter ce drame. À l'intention de la communauté musulmane, le premier ministre Philippe Couillard disait «nous sommes tous Québécois, vous êtes chez vous». Justin Trudeau, le premier ministre canadien, s'est rendu sur place pour participer à une vigie bouleversante au cœur de l'hiver. Le maire de Québec, Régis Labeaume, a bien fait les choses.

Surtout, on a senti un immense élan de solidarité qui a aidé à réduire la douleur infligée par cette blessure. Une information glanée dans une reconstitution de l'événement faite par La Presse m'a touché parmi tant d'autres: 6 chirurgiens se sont présentés spontanément le soir même à l'hôpital de l'Enfant-Jésus pour opérer les blessés.

Les gouvernements ont eu raison de résister à la suggestion de faire du 29 janvier une Journée nationale contre l'Islamophobie, une suggestion du Conseil national des musulmans canadiens.

Qu'en est-il un an plus tard? Les gouvernements ont eu raison de résister à la suggestion de faire du 29 janvier une Journée nationale contre l'Islamophobie, une suggestion du Conseil national des musulmans canadiens (CNMC).

D'abord, ce geste aurait occulté complètement la tuerie elle-même. Il faut se concentrer sur les victimes collatérales, revoir leurs visages et se demander si le maximum a été fait depuis pour les aider à se relever. Un débat sémantique sur les manifestations de l'Islamophobie ou sur le racisme, et les dérapages qu'il occasionne, c'est bien la dernière chose dont on a besoin.

Une journée nationale sur l'Islamophobie le 29 janvier aurait fait, par ailleurs, de la folie d'un individu une faute collective.

Nos élus ont une tendance naturelle à jouer aux donneurs de leçon au gré des événements. La hauteur qu'ils réclament est à géométrie variable. Le premier ministre Couillard a établi un lien cette semaine entre le débat identitaire au Québec et les crimes haineux. Le débat identitaire est là pour de bon et il y a participé lui-même. Son parti, après avoir suspendu le projet de loi 62 (sur la prestation de service à visage découvert) dans la foulée de la tuerie, l'a ramené l'automne passé au Parlement et passé des semaines à en débattre. Le premier ministre est plutôt prompt à invoquer les «braises de l'intolérance».

Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, affirme que le premier ministre Couilard a commis «une faute historique grave» au lendemain du 29 janvier en ne saisissant pas le moment pour légiférer sur le port de signes religieux. Lisée, le modéré, a déjà jonglé avec l'idée d'interdire la burqa et le niqab dans l'espace public, avant d'être désavoué par son caucus, et s'est demandé si ce vêtement ne pouvait dissimuler une AK-47.

Le maire de Québec, Régis Labeaume, est capable du meilleur et du pire, selon la direction du vent. Cette semaine, il a pointé du doigt les radios de sa ville (qui lui ont fait la vie dure durant la campagne électorale) pour expliquer des gestes haineux dans la Capitale. Il a oublié sans doute qu'il n'a pas toujours fait dans la modération. En 2014, il avait raconté avoir été choqué de voir un couple, lui en bermudas, elle voilée de la tête aux pieds, au point d'avoir envie d'arracher la tête du mari.

La blessure du 29 janvier 2017 est encore profonde et nul doute qu'elle a traumatisé le Québec. Par respect pour les victimes, les politiciens devraient se tenir loin de toute forme de récupération politique et démontrer de la compassion, point final.

Incidemment, la commémoration est indispensable. Était-il nécessaire de la faire courir sur 4 jours, prolongeant ainsi les souvenirs douloureux de nos concitoyens musulmans?

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