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Le gouvernement doit renforcer les lois environnementales!

Un gouvernement démocratique qui s'engage à faire preuve d'ouverture et de transparence doit s'assurer que nos ressources naturelles soient exploitées - ou pas - en maximisant les bénéfices tout en minimisant les risques pour sa population. Pour ce faire, il doit demeurer à l'écoute et des experts, de la communauté et des organismes qui les représentent, peu importe que leurs principales préoccupations soient d'ordre environnemental ou financier.
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Si le gouvernement fédéral avait proposé des changements aux processus d'évaluation et de règlementation environnementales permettant d'augmenter leur efficacité, sans nuire à leur applicabilité, peu de gens s'y seraient opposés. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Non seulement les changements annoncés faciliteront, autant pour le gouvernement que pour l'industrie, la mise en chantier de plusieurs projets comportant des risques économiques et environnementaux, mais ils minimiseront aussi la portée de la voix de la population canadienne sur des sujets pourtant d'intérêt national.

D'après l'énoncé budgétaire, nous pourrions croire que les doublons et les échéanciers jugés trop longs forment le nœud du problème. Faux. Comme le souligne l'institut Pembina, environ un grand projet d'exploitation minière de sables bitumineux a été approuvé chaque année au cours des cinq dernières années, et ce nombre est en croissance. Certaines personnes, dont Peter Lougheed, ancien premier ministre de l'Alberta, soutiennent d'ailleurs qu'il serait plus profitable de ralentir le processus, tant pour des raisons économiques qu'écologiques. La plupart du temps, les blocages dans les processus d'évaluation environnementale sont causés soit par le manque de volonté de l'industrie à respecter les délais pour transmettre les informations aux organismes gouvernementaux, soit par le manque de ressources au sein même du gouvernement. La situation ne risque pas de s'améliorer puisque le financement gouvernemental en matière de surveillance et d'application des lois environnementales fera l'objet d'éventuelles coupures.

L'abandon d'évaluations environnementales pour certains projets, le transfert des responsabilités vers les provinces et les réductions draconiennes dans les effectifs et dans le nombre d'agences qui gèrent et compilent les informations ne sont pas des moyens de maximiser l'efficacité du processus. Ces mesures accélèreront plutôt l'approbation de projets de grande envergure, plaçant au premier plan les intérêts à court terme de l'industrie, loin devant la protection de l'air, de la terre et de l'eau, qui est pourtant fondamentale pour assurer notre santé à tous.

La règlementation provinciale en matière d'environnement n'est pas toujours uniforme d'une province à l'autre et ses lois sont souvent moins sévères que celles émises au fédéral. De plus, rien ne garantit que l'impact sur une population extérieure à une province soit pris en considération dans une décision. À titre d'exemple, rappelons-nous que la Colombie-Britannique avait autorisé une compagnie minière à détruire le lac Fish , situé tout près du lac Williams, mais qu'une analyse fédérale ultérieure avait cassé la décision.

Il n'est pas exclu que la résolution de restreindre la participation aux audiences environnementales uniquement à ceux qui sont « directement concernés » par le projet soumis et que la proposition de transférer, de l'Office national de l'énergie vers le cabinet fédéral, le pouvoir décisionnel pour les projets énergétiques majeurs - notamment le projet d'oléoduc Northern Gateway - puisse affecter profondément la façon dont sont pris en compte les préoccupations industrielles et environnementales. Autrement dit, cela pourrait signifier que les décisions deviendront de plus en plus des choix politiques au lieu d'être justifiées par des données scientifiques de qualité, par l'avis des experts et par nos préoccupations sociales.

Un gouvernement démocratique qui s'engage à faire preuve d'ouverture et de transparence doit s'assurer que nos ressources naturelles soient exploitées - ou pas - en maximisant les bénéfices tout en minimisant les risques pour sa population. Pour ce faire, il doit demeurer à l'écoute et des experts, de la communauté et des organismes qui les représentent, peu importe que leurs principales préoccupations soient d'ordre environnemental ou financier.

En plus de menacer l'environnement et, par conséquent, la santé de la population, les changements annoncés pourraient rendre les processus d'évaluation et de règlementation plus longs et encore moins efficaces. En effet, lorsque le niveau de confiance envers le gouvernement diminue, le nombre de conflits et de poursuites judiciaires tend à augmenter. Récemment, la Nuxalk Nation de Bella Coola s'est retirée de l'audience sur le projet Northern Gateway - Charlie Nelson, le chef héréditaire de la bande, a justifié cette décision en affirmant que le gouvernement avait d'ores et déjà choisi d'approuver le projet. Les dirigeants autochtones menacent maintenant le gouvernement de mener la cause devant les tribunaux pour faire reconnaître leurs droits et freiner le projet.

Le gouvernement doit s'efforcer à renforcer les lois environnementales, notamment en facilitant leur mise en application. Un processus consultatif et transparent, qui prend en compte les intérêts des différentes parties, les conclusions des rapports d'expertise et toute information utile, conviendrait mieux. L'année dernière, le gouvernement a laissé passer l'occasion alors que le Comité permanent de l'environnement était chargé de réviser la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. L'Association canadienne du droit de l'environnement soutient que la révision a été «bâclée et qu'elle est tout sauf "exhaustive" (traduction libre)».

Nous souhaitons tous que notre pays prône des valeurs de liberté et de démocratie tout en jouissant d'un environnement sain et d'une économie forte. Cela n'est possible qu'à condition de soutenir la recherche et le savoir, de tenir des débats ouverts et de respecter les différentes opinions. Nous pouvons renforcer le processus décisionnel en matière environnementale de plusieurs manières. La clarification des lois environnementales est un exemple parmi tant d'autres. Il est vrai que parfois - mais pas à tout coup - arriver à une décision prendra peut-être plus de temps que prévu, mais à tout le moins, nous aurons bon espoir qu'elle aura été prise dans l'intérêt primordial de tous les Canadiens et toutes les Canadiennes.

Avec la participation d'Ian Hanington, Spécialiste des communications et d'éditions

Pour plus d'informations, visitez le www.davidsuzuki.org.

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