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Vladimir Poutine, descendant d'Ivan le Terrible?

L'annexion de l'Ukraine serait donc le renouveau de l'empire russe pour Vladimir Poutine et un renforcement de sa légitimité sur la scène internationale qui conteste ses méthodes.
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Comment faut-il interpréter la politique de la Russie vis-à-vis de l'Ukraine? Pourquoi contester maintenant des frontières acceptées en 1991?

Afin de mieux cerner le problème actuel ukrainien, il convient de faire une approche historique puis géographique de ce pays. Les atouts de l'Ukraine résident dans sa géographie (le 2e pays le plus grand d'Europe après la Russie), sa richesse en ressources agricoles (appelé « grenier à blé de l'Europe »), minières (8e producteur mondial d'acier) et énergétiques, ses frontières au cœur de l'Europe (Avec 7 pays : Pologne, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Moldavie, Russie et Biélorussie) et son ouverture sur la Mer noire. Le talon d'Achille de l'Ukraine : une faible diversification, une dépendance à l'égard des cours des métaux et du prix du gaz importé, un surendettement du secteur privé. Ce pays a été acteur des évènements marquants de l'histoire mondiale, dont la création de l'ONU en 1945, a accédé à l'indépendance en 1991, lors de la chute de l'Union soviétique, et a entamé un processus démocratique de construction de l'État. Forte d'un arsenal nucléaire important (le 3e au monde) et de la 2e force d'armes conventionnelles après la Russie (tout en restant non alignée), l'Ukraine réunit toutes les conditions pour assurer ses fonctions régaliennes et se prémunir contre d'éventuelles velléités russes à l'égard du pays.

Après la révolution orange, « la politique étrangère ukrainienne, coordonnée par un groupe idéologiquement engagé en faveur de l'intégration euro atlantique, est devenue plus prévisible. La conception pro-européenne de l'identité de l'Ukraine a pris une importance croissante dans l'élaboration de la politique étrangère (1)». C'est donc dans ce contexte que l'Ukraine se rapproche de l'OTAN, mais les capacités financières du pays pour rénover sa puissance militaire et la crise de 2007 (qui stoppera nette une croissance économique fulgurante) font apparaître les difficultés économiques du pays, incapable d'effectuer des réformes et rongé par la corruption.

La population comprend une importante majorité d'Ukrainiens ethniques et d'importantes minorités (dont des Russes) et connaît un clivage entre les Ukrainiens souhaitant un rapprochement avec l'OTAN et l'Union européenne et les Russes, réclamant leur appartenance à la Russie. En complément de la situation ukrainienne citée précédemment, l'explication de la situation politique en Russie permettra de mieux appréhender la contestation de frontières acceptées en 1991 vis-à-vis de l'Ukraine.

Tout d'abord, le déroulement de l'accession au pouvoir de Vladimir Poutine et sa personnalité apportent un éclairage nécessaire. Ex-membre du KGB, numéro 2 de l'administration sous la présidence d'Eltsine en 1996, il est président par intérim le 31 décembre 1999 après la démission de Boris Eltsine puis élu le 26 mars 2000 président de la Fédération de Russie. À ce stade, il est légitime de se poser la question relative aux conditions et motivations de la démission d'Eltsine.

Puis a eu lieu une alternance premier ministre / président avec Dimitri Medvedev dont on est aussi en droit de s'interroger sur les réelles fonctions de Medvedev qui semble être la « marionnette » de Vladimir Poutine. Il détient les réelles commandes du pouvoir russe avec un mode de gouvernement aux dérives autoritaires et souhaite reconstruire l'ex empire dont il est nostalgique de la puissance et de la domination : « Un autre projet a pris le relais : rétablir la domination russe sur l'ensemble des terres que couvrait l'Union soviétique...(...)...mais une fois de plus, l'enjeu essentiel est l'Ukraine. Pour la recouvrer, tout est bon : la pression économique, l'irrédentisme des Russes d'Ukraine, l'encerclement de la Transdnistrie et la Moldavie, le sabotage des réformes que tenteraient le gouvernement ukrainien, la manipulation des divisions religieuses, l'infiltration policière et militaire (2)».

Dans ces circonstances, le président ukrainien Viktor Ianoukovitch qui devait signer un accord avec l'Union européenne fait volte-face au dernier moment, contre l'opinion et le désir du peuple sur ce sujet pour se rapprocher de la Russie. C'est le point de départ des évènements en Ukraine qui font l'actualité quotidienne actuelle. Connaissant les velléités de la Russie vis-à-vis de l'Ukraine, on ne peut s'empêcher d'évoquer l'orchestration du départ d'Ianoukovitch par la présidence russe... En matière économique, la Russie connaît une croissance que les pays européens lui jalousent (+7 %) et c'est ce qui donne une certaine légitimité au président russe vis-à-vis des Ukrainiens d'origine russe. Du point de vue oriental, l'Europe ne cesse de s'agrandir en acceptant dans son union les anciens pays de l'Union soviétique : « Nous assistons à l'émergence d'une nouvelle hyperpuissance qui, tel un gigantesque tourbillon, engloutit lentement, mais sûrement nos voisins », a ainsi déclaré Konstantin Kosatchev, président de la commission des Affaires internationales de la Douma (3)».

Dans cet esprit, Vladimir Poutine n'accepte pas ce redécoupage européen à son détriment. Il souhaite, lui aussi, voir de nouveaux pays revenir dans le fief russe. L'annexion de l'Ukraine serait donc le renouveau de l'empire russe pour Vladimir Poutine et un renforcement de sa légitimité sur la scène internationale qui conteste ses méthodes. A la lecture de tous ces éléments (atouts de l'Ukraine, politique russe), on peut effectivement mieux comprendre la réaction russe de ne plus accepter le découpage des frontières de 1991, si l'on ôte notre vision occidentale des faits. Mais, une chose est certaine : on ne peut accepter les conditions d'adhésion à la Russie dont le processus démocratique est fortement contestable.

Sources :

(1) KOZLOVSKA Oksana (2006), A Roadmap for Ukraine's Integration into Transatlantic Structures, NATO Defence College Occasional Papers, Rome, page 10

(2) RIABTCHOUK, Mykola (2003) De la Petite-Russie à l'Ukraine, Editions L'Harmattan, page 11

(3) FACON, Isabelle (2007), Russie Union européenne : l'enjeu du voisinage commun, Afri, Volume VIII, page 623

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