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Pour un nouveau paradigme au Moyen-Orient

Détruire complètement l'État islamique ouvrirait toute grande la porte du Proche-Orient à l'Iran et il n'est guère sûr que cela ne se voit d'un bel œil dans la région ni même par la Russie.
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Aujourd'hui, la compétition fait rage entre le Sunnistan dont l'Arabie se veut être le protecteur et le Chiistan que l'Iran tient à dominer ; elle se fait par milices interposées en Syrie, en Irak, au Liban et au Yémen. L'Islamistan radical s'oppose aux deux dans l'État islamique. Le Fréristan formé par le Qatar et la Turquie tente quant à lui à pousser l'agenda des Frères musulmans sans susciter d'enthousiasme auprès des Sunnites dits modérés. Il est peu probable que cette mouvance des Frères musulmans puisse s'allier aux Sunnites modérés eu regard la personnalité et les ambitions néo Ottomanes du président Erdogan. Il y a donc peu de chance que le conflit cesse.

Les monarchies riches en pétrole et disposant d'armes sophistiquées à profusion n'arrivent pas à soumettre les Houtis au Yémen et certaines font appel à des mercenaires sud-américains. La présence de plus de 50 000 miliciens chiites contrôlés par l'Iran, qu'ils soient irakiens, afghans ou pakistanais de même que le Hezbollah libanais et les gardiens de la révolution iraniens est mal acceptée par la majorité des Syriens et des Irakiens. Dix millions de Sunnites d'Irak et de Syrie sont sous le contrôle de l'État islamique qui, bien que honni, les protège contre le revanchisme chiite.

Le désintérêt américain du Proche-Orient a créé un vide que d'autres occupent. La Russie se rend indispensable au Proche-Orient. Elle défend l'Alaouistan sur la côte ouest de la Syrie. Détruire complètement l'État islamique ouvrirait toute grande la porte du Proche-Orient à l'Iran et il n'est guère sûr que cela ne se voit d'un bel œil dans la région ni même par la Russie. Par ailleurs, la Russie n'abandonnera pas aisément le contrôle des pipelines de gaz menant du Qatar et de l'Iran à la Méditerranée - s'ils voient le jour bien entendu.

Qu'espérer dans l'avenir? Bien des questions demeurent sans réponse ferme et il est possible que l'état d'anarchie subsiste encore longtemps. L'Arabie et l'Iran voudront-ils et pourront-ils mettre fin à leur antagonisme chronique [1]? La répression contre les Frères musulmans en Égypte incitera-t-elle des insatisfaits à rallier le camp des radicaux de l'islam? Bagdad, autrefois capitale d'un puissant califat sunnite et qui est devenue aujourd'hui une ville costumée de panneaux géants des imams et des ayatollahs chiites fera-t-elle une place aux maîtres d'hier qu'étaient les Sunnites? Les richissimes princes de l'Arabie accepteront-ils de modérer la proportion prélevée des royautés pétrolières qu'ils s'octroient? Les sociétés de la péninsule arabique qui ont maintenu un niveau de vie élevé grâce aux subsides étatiques se mettront-elles au labeur maintenant que leurs revenus du pétrole sont moindres? La martyrologie chiite risque-t-elle d'embrigader de nouvelles mouvances radicales? Les sociétés pourront-elles dissocier l'état de la religion et notamment de la lecture littéraliste de la religion? La démocratie pourrait-elle être adoptée dans l'harmonie? Le statut de la femme va-t-il évoluer?

Dans le Moyen-Orient déchiré par la zizanie, deux entités demeurent relativement stables: Israël et le Kurdistan. Ces deux pays sont soumis à une pression très forte des pays alentour, mais réussissent à prospérer. Des alliances se dessinent avec ces entités autour desquelles pourraient se joindre d'autres entités stables si le Moyen-Orient venait à se débarrasser du carcan de l'enseignement stérile de la haine.

Cette haine entretenue envers les minorités à des fins démagogiques déborde sur des conflits internes dont nous voyons les effets dévastateurs. Des ressources considérables continuent donc à être consacrées aux armements alors que le potentiel du Moyen-Orient est immense: imaginons la richesse pétrolière orientée vers les techniques avancées d'irrigation et de désalinisation de l'eau de mer pour ne citer qu'une des possibilités de développement. Les défis ne le sont pas moins, tant sont criants les besoins de services de santé et d'une alimentation équilibrée qui soient abordables. Changer le paradigme actuel en un esprit de collaboration constructif pour le bien-être de tous requiert imagination, courage et vision.

[1] La volonté d'exporter la révolution iranienne de 1979 a suscité de vives inquiétudes en Arabie. L'Arabie a pris parti pour l'Irak dans les années 80 lors de son conflit avec l'Iran. Suite aux manifestations de pèlerins iraniens à La Mecque, les relations diplomatiques ont été rompues en 1988, rétablies dans les années 90 et rompues à nouveau en 2016. Cette année, les pèlerins iraniens ne pourront se rendre à la Mecque.

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Mai 2017

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