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L'Algérie face à ses contradictions

Au lendemain de son indépendance en 1962, l'Algérie décida de se développer de façon systémique sur trois axes : le socialisme, l'arabisme et l'islam. Chacun de ces axes a résulté en un échec retentissant.
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Au lendemain de son indépendance en 1962, l'Algérie décida de se développer de façon systémique sur trois axes : le socialisme, l'arabisme et l'islam. Chacun de ces axes a résulté en un échec retentissant.

Le FLN ou Front de Libération nationale fut le principal mouvement qui combattit la France de 1954 à 1962. Déjà en 1962, le programme de Tripoli se prononçait pour un parti populaire de travailleurs. Deux années plus tard, la Charte d'Alger optait pour l'unité idéologique, la nationalisation des richesses et la limitation du capital étranger ainsi que pour l'unipartisme.

Ces principes furent réaffirmés dans la Charte nationale adoptée en 1976. L'adoption des plans quinquennaux à la mode soviétique a pour sa part enrayé la compétitivité et alourdi encore plus la bureaucratie et dans les faits, le pouvoir appartient à une élite politico-militaire. Sur le plan économique, l'Algérie dispose de ressources d'hydrocarbures et donc de réserves monétaires substantielles. Mais cette richesse ne profite pas aux masses qui souffrent de sous-emploi, de manque de logis et du coût élevé des denrées.

Durant la guerre froide, l'Algérie s'est alignée sur l'Union soviétique et s'est engagée dans le mouvement des pays non alignés. Mais la rhétorique anticolonialiste rabâchée ne change pas les réalités de terrain et notamment la corruption. Le mécontentement est latent et déjà vers la fin des années 60, des voix s'élèvent pour conjuguer socialisme et islam.

Une décennie de violence

En 1988, des émeutes violentes éclatent et le gouvernement s'ouvre au multipartisme. La victoire surprenante du FIS (Parti islamique du salut) aux élections municipales et la crainte d'une autre victoire aux élections législatives pousse l'armée à annuler les élections, déclenchant une décennie de violence au cours de laquelle près de 200 000 personnes ont péri.

Le Groupe islamique armé (GIA) a déclenché de cruelles attaques terroristes et les autorités gouvernementales n'ont pas mis des gants blancs pour y faire face. Une amnistie déclarée en 2000 a été suivie d'une trêve puis d'une Charte pour la paix et la réconciliation nationale adoptée par référendum en 2005. Depuis lors, l'islam politique semble avoir perdu de sa force par rapport à ce qu'il avait été dans les années 90 et le printemps arabe ne semble pas avoir eu d'écho en Algérie.

Ceux qui ne se sont pas ralliés à cette trêve ont continué leurs attaques ou se sont associés par la suite au groupe terroriste AQIM (Al Qaeda in the Islamic Maghreb) qui commet des actions d'éclat tout comme des attaques à la bombe à Alger en 2007 et la prise d'un champ gazier Ain Amenas en janvier 2013.

Les revendications kabyle et berbère

L'arabisation a été adoptée dans toute l'Algérie au détriment de la langue française et notamment de la langue berbère : le tamazight parlé par les Kabyles et le tamashek parlé par les Touaregs. En 1980, les Kabyles protestent et demandent l'officialisation de la langue tamazight et ce soulèvement est durement réprimé par les autorités. Ce printemps berbère - bien antérieur au printemps arabe - va se solder avec 126 morts et près de 5000 blessés dont 1200 handicapés à vie. Aujourd'hui, la langue berbère est reconnue, mais les Kabyles se plaignent de ce que le gouvernement algérien délaisse leur région.

La revendication de l'identité berbère et non arabe demeure très forte et le drapeau kabyle est brandi dans de nombreuses manifestations publiques. Par ailleurs, il existe un gouvernement provisoire kabyle à l'extérieur de l'Algérie. Les Touaregs du Sud de l'Algérie et du Nord du Mali se réclament également d'une identité en propre, l'Azawad. Le Mouvement national de libération de l'Azawad au nord du Mali a déclaré son indépendance en 2012. Les islamistes y prenant le pouvoir, la France a aidé l'armée malienne à contrôler le territoire de l'Azawad. L'Algérie qui a près de 6 500 km de frontières avec les pays voisins tente d'y jouer un rôle stabilisateur, notamment au Mali, en Libye et en Tunisie afin que leurs dissensions internes ne débordent pas sur son territoire.

Toutefois, un conflit frontalier larvé subsiste avec le Maroc en regard du tracé des frontières datant de l'ère coloniale et l'Algérie soutient le Front du Polisario qui veut évincer le Maroc de l'ancien Sahara espagnol. De son côté, le Maroc s'est prononcé pour le droit des Kabyles à l'autodétermination.

La contestation islamique

Les piliers sur lesquels s'est appuyée l'Algérie indépendante qui sont le socialisme, l'islam et l'arabisme n'ont pas réussi à y soutenir une société stable et harmonieuse. Le taux d'abstention aux dernières élections a été de 49% alors qu'il était de 26% en 2011. Faute d'une société civile fonctionnelle et d'horizons économiques prometteurs, un grand nombre de jeunes va s'établir ailleurs. La contestation islamique perdure et le gouvernement algérien continue de mener des opérations contre-terroristes avec l'appui des États-Unis.

Toutefois, pour amadouer la mouvance musulmane, les autorités affirment leur islamité et laissent des imams s'exprimer dans un langage extrémiste qui devient de plus en plus inquiétant. Ce laisser-faire accentue encore plus la rétrogression de l'émancipation féminine, laquelle a souffert par le passé lorsque la mouvance islamiste du FIS s'était affirmée. Enfin, la contestation kabyle n'a pas cessé.

À l'heure actuelle, l'Algérie doit remettre en question ses options doxiques et se donner de nouvelles orientations pour pouvoir aller de l'avant et redonner confiance et espoir en l'avenir. La succession de l'actuel président Bouteflika âgé de 78 ans et dont l'état de santé semble délicat pourrait-elle mettre fin à la stagnation du pouvoir?

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