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L'Iran prisonnier de sa théocratie

L'Iran dépense entre 6 et 15 milliards par an pour entretenir le régime syrien et armer les milices chiites. Quand on prend en ligne de compte que le déficit annuel de l'Iran est de l'ordre de 9 milliards, on est en droit de se demander : pourquoi l'Iran s'investit aussi massivement dans ce conflit?
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L'Iran dépense entre 6 et 15 milliards par an pour entretenir le régime syrien et armer les milices chiites. Quand on prend en ligne de compte que le déficit annuel de l'Iran est de l'ordre de 9 milliards, on est en droit de se demander : pourquoi l'Iran s'investit aussi massivement dans ce conflit?

En effet, l'Iran continue d'alimenter l'instabilité en déversant des milices chiites armées afghanes, pakistanaises et libanaises et en finançant les achats d'armes syriennes. La propagande officielle iranienne annonce des victoires du régime syrien en omettant l'emprise russe ou fait l'apologie de la sauvegarde de lieux saints quasiment inconnus du public voire même d'une prédisposition (fictive) des Syriens à la croyance chiite. Lorsque le maire sortant de Téhéran Karbaschi a déclaré que la meilleure façon de contribuer à la paix au Liban en Syrie et au Yémen n'était pas en envoyant de l'argent et des armes, en tuant ou en bombardant, il a été incriminé et fait l'objet d'une campagne de dénigrement.

L'implication iranienne dans les conflits du Proche-Orient constitue un fardeau pénible pour sa population. Le déficit iranien est de l'ordre de 2% du PIB compte non tenu des arriérés bancaires qui sont de l'ordre de 10,2% du PIB et de près de 45% de prêts bancaires considérés insolvables. La pénurie d'eau potable vide des villes entières et est responsable de déplacements de millions de personnes. Les argents consacrés aux projets infrastructuraux sont insuffisants et en baisse de deux tiers par rapport à l'année précédente. Pourtant, les rentrées pétrolières se sont accrues de 20%.

La Chine et la Russie dont 90% de la population musulmane est sunnite ne sont pas mécontentes de mener la guerre contre les extrémistes sunnites par des extrémistes chiites qui constituent une légion étrangère à la solde de l'Iran. Tant Moscou que Pékin redoutent l'influence des radicaux sunnites influencés par le wahhabisme saoudien ainsi que le retour de milliers de radicaux sunnites tchétchènes ou ouïgours combattant aux côtés de mouvances radicales en Syrie et en Irak. Ces radicaux ont acquis une expertise certaine et de nombreux assassinats suicide ont porté leur signature. En Syrie seulement, les pertes des milices parrainées par l'Iran se montent à 473 Iraniens, 583 Afghans, 135 Pakistanais, as 1,268 Chiites irakiens et près de 1700 membres du Hezbollah libanais. À titre indicatif, les pertes russes se montent à 28 personnes. Par ailleurs, plus de 30% des jeunes iraniens ne trouvent pas d'emploi et l'Iran ne manque pas de candidats pour servir de chair à canon aux ambitions russes et chinoises. Pour l'instant, la légion étrangère chiite que l'Iran contrôle cherche à occuper les territoires évacués par les militants de l'État islamique.

Le fait d'avoir hypothéqué ses richesses pour son expansion hégémonique prive l'Iran d'un développement essentiel.

Le fait d'avoir hypothéqué ses richesses pour son expansion hégémonique prive l'Iran d'un développement essentiel. L'Iran est un des principaux acheteurs d'armes à la Russie et la Chine domine de plus en plus le marché iranien. Étant donné le taux de natalité extrêmement bas, il est possible que dans l'avenir la jeunesse actuelle constitue une population vieillissante tout comme en Europe de l'Ouest, mais disposant du dixième de son revenu.

La polarisation sunnite-chiite pousse à la course aux armements au Proche-Orient. Le peuple iranien est condamné à soutenir des velléités d'expansion religieuses de sa mullahcratie au coût de son bien-être et pour le bien des marchands d'armes qu'ils soient russes ou américains. Or, dans les médias prompts à étiqueter de la façon la plus simple des notions complexes, le moins extrémiste des candidats à la présidence iranienne est qualifié de modéré. Il n'en demeure pas moins que l'Iran est et demeure une dictature gouvernée par une théocratie. Indépendamment du résultat des élections, c'est le guide suprême, l'Ayatollah Ali Khamenei, qui a le premier et le dernier mot sur les orientations de l'Iran.

Le Guide suprême contrôle des institutions policières, politiques, religieuses et économiques : il dispose d'une armée parallèle des Gardes révolutionnaires, d'une police de la révolution parallèle, de son propre réseau d'ambassadeurs et de fondations de dizaines de milliards de dollars qui échappent au regard public. Quant au président Rouhani, la répression contre le droit d'expression et les journalistes n'a pas diminué durant son mandat. La seule législation qu'il a introduite au Majlis fut celle de pendre les opposants du régime en public durant les rassemblements de prières les vendredis. Les visiteurs qui se rendent à son bureau doivent marcher sur un drapeau américain...

Le président Obama a fait de grandes concessions à l'Iran à la suite de la signature de l'accord des 5+1 et de l'Iran portant sur le nucléaire. L'arrêt des sanctions contre l'Iran a été suivi de recouvrement de près de 100 milliards de dollars et par l'achat d'avions Airbus et Boeing. Mais l'agressivité iranienne dans le Croissant fertile n'a pas cessé pour autant. Le secteur financier de l'Iran est évité par la majorité des banques internationales qui craignent le retour des sanctions contre l'Iran. Qui plus est, les pays sunnites se sont ralliés à l'Amérique : trois sommets successifs se sont tenus à Riad lors de la visite du président Trump : le premier saoudo-américain, le second avec les dirigeants arabes et le troisième avec une quarantaine de chefs d'État ou responsables musulmans. En ordonnant, pour la toute première fois, des frappes aériennes contre des milices chiites combattant aux côtés du régime syrien, Trump s'est démarqué de la politique d'apaisement de l'Iran de son prédécesseur en commençant par isoler l'Iran du camp sunnite.

L'Iran est prisonnier des visées de sa théocratie.

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Mai 2017

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