Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

De l'indépendance d'Israël en armements

Tout projet de paix sera illusoire tant et aussi longtemps que l'Iran continuera à viser l'élimination d'Israël.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Comment Israël en est-il venu à produire ses propres armements ? L'embargo décrété par De Gaulle au lendemain de la guerre des Six Jours en 1967 et le délai de livraison d'armes durant la guerre de Kippour en 1973 ont fait prendre conscience à Israël que la vie de ses citoyens et de ses soldats ne devrait pas dépendre de sources externes. Aussi Israël s'est lancé dans la production d'armement sophistiqué et se classe aujourd'hui parmi les dix premiers pays exportateurs d'armes.

Peu avant la guerre des Six Jours, le président égyptien Nasser renvoya les Casques bleus de la frontière israélienne, fit entrer en grande fanfare des armes lourdes au Sinaï et décréta le blocus du détroit de Tiran. Les forces militaires de Syrie, de Jordanie et d'un contingent important d'Irak furent placées sous commandement égyptien. Un climat d'euphorie a régné dans l'ensemble du Moyen-Orient dont les médias scandaient « Égorgez les Juifs. » Les messages incendiaires reliés par la radio égyptienne annonçaient que sous peu Israël serait effacé de la carte. Le président Nasser promettait de rentrer dans une Palestine saturée non pas de sable, mais de sang. Israël disposait de 240 000 soldats incluant les réservistes, faisant face à 410 000 soldats : 240 000 Égyptiens, 50 000 Syriens, 50 000 Jordaniens et 70 000 Irakiens, sans compter les renforcements promis par d'autres pays arabes. En dépit de tous les pronostics, Israël en ressortit vainqueur.

Cette guerre fut une prise de conscience tragique pour Israël : la France, l'Angleterre et les États-Unis qui avaient promis de défendre la liberté de passage au détroit de Tiran se récusèrent. Après la guerre, la France décréta un embargo qui toucha avant tout Israël qui était jusque-là équipé d'avions Mystère, Ouragan et de Mirages supersoniques français. Les intérêts pétroliers au Moyen-Orient et l'ampleur des marchés arabes firent pencher la balance du côté de ces pays. La guerre d'Algérie était finie et la France voulait jouer la carte arabe et vendit les avions Mirage V destinés à Israël à l'Égypte et à la Libye. Même l'Angleterre qui fournissait à Israël des tanks Centurion avant la guerre des Six Jours suspendit l'envoi de tanks Chieftain qu'elle vendit à la Jordanie.

Israël ne pouvait donc plus dépendre de sources d'armements externes. Tout en développant une capacité de production autonome, il se tourna vers les États-Unis qui avaient jusque-là suivi une politique de réserve. En Israël, la production d'avions d'entraînement subsoniques Fouga Magister constitua une première expérience. En premier lieu, Israël commença à produire des versions améliorées du Mirage V : le Nesher et le Kfir. Parallèlement, des missiles antinavires Gabriel, des missiles air-air Shafrir 2 et Python 3, un nouveau tank, le Merkava, de même que des vedettes Saar furent conçus en Israël. Par la suite, Israël commença à développer un avion de combat entièrement de son cru : le Lavi. Or les frais de recherche avaient atteint 1,9 Mds. Les frais de production manquaient, car la production limitée était très onéreuse. Le secrétaire de la Défense américain Caspar Weinberger mit son veto de principe malgré les réserves de l'establishment militaire américain, car il ne voulait pas de compétition avec l'industrie américaine. Dans les faits, très peu de pays ont réussi à développer un avion de combat, et rarement avec succès : l'Argentine et le Canada dans les années 50, l'Égypte et l'Inde dans les années 60, l'Afrique du Sud dans les années 80 ainsi que le Japon et Taiwan dans les années 90. Seuls les États-Unis, l'URSS (la Russie aujourd'hui), la Grande-Bretagne, la France, un consortium de grandes puissances européennes et la Suède ont relevé ce défi. Quant à la Chine, ses avions sont des répliques assez fidèles d'avions soviéto-russes.

La guerre froide battant son plein, l'Union soviétique fournit des armes très performantes à l'Égypte, la Syrie et l'Irak : avions Mig et Sukhoi, tanks T-62, missiles anti tanks et missiles sol-air SAM-6 en abondance. L'importance stratégique d'Israël augmenta alors et les États-Unis considérèrent sérieusement la vente d'armements à Israël. Kennedy avait permis la vente de missiles antiaériens Hawk. Le président Johnson autorisa la vente de bombardiers Skyhawk à Israël et à la Jordanie, puis la vente d'avions Phantom F-4. La guerre d'usure que lança l'Égypte le long du canal de Suez prit une autre tournure lorsqu'elle impliqua des pilotes russes et des opérateurs de batteries antiaériennes nord-coréens. En 1970, les combats aériens démontrèrent la supériorité israélienne et un cessez-le-feu fut proclamé.

En 1973, la guerre de Kippour fut lancée par l'Égypte et la Syrie et l'effet de surprise fut grand. 300 000 soldats égyptiens et 2000 tanks furent contrés par 280 tanks israéliens. Sur le front syrien, 1200 tanks furent contrés par 170 tanks israéliens. La Russie augmenta considérablement ses livraisons d'armes et durant huit jours, les États-Unis refusèrent de faire de même. Bien que des accusations aient été avancées de toute part, il semblerait bien que ce fût le secrétaire d'État américain Henry Kissinger qui en fut l'instigateur, car il ne voulait pas d'une victoire israélienne trop décisive. Cette ultime victoire coûta la vie à 3000 soldats israéliens. Ce fut une nouvelle prise de conscience pour Israël : son armement dépendait des objectifs politiques américains. Plus d'une fois, la vente d'armes à Israël fut accompagnée de ventes d'armes comparables aux pays arabes.

Les marchés indien et chinois ouvrent de nouvelles opportunités qui rentabilisent la recherche et la production d'armements israéliens.

En 1987, Israël obtint le statut d'allié majeur hors OTAN. Aujourd'hui, Israël est équipé d'avions américains F-15 et projette l'acquisition d'avions furtifs polyvalents F-35. Des programmes israélo-américains de développement de systèmes antimissiles de différentes portées - dôme de fer, Fronde de David et Arrow - sont en cours. L'aide militaire américaine annuelle à Israël fut de 1,8 Mds à partir de 1987. Elle fut graduellement augmentée pour atteindre 3,8 Mds pour les prochaines dix années. Toutefois, l'entente conclue avec le président Obama stipule une aide pour des achats en Amérique même. Cette clause ne libère pas les budgets pour des améliorations des armements américains.

Certains membres du Congrès américain en sont insatisfaits, car les États-Unis ont grandement profité des améliorations israéliennes des armements américains. À titre d'exemple, 400 modifications furent appliquées la première année après la réception des avions Phantom F4. 600 modifications israéliennes ont été apportées aux avions de combat F16. Les marchés indien et chinois ouvrent de nouvelles opportunités qui rentabilisent la recherche et la production d'armements israéliens. Bien que les voisins immédiats d'Israël soient livrés à des guerres internes, l'inconstance de la Turquie et l'hostilité déclarée de l'Iran constituent des défis majeurs. Tout projet de paix sera illusoire tant et aussi longtemps que l'Iran continuera à viser l'élimination d'Israël. Aussi, Israël doit-il redoubler d'ingéniosité pour continuer à innover dans le domaine des armements et réduire sa dépendance.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

2003

Crise sur le nucléaire iranien : les grandes dates

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.