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Cinq leçons pour Bernard Drainville

Si M. Drainville est capable de s'élever au-dessus de la mêlée et qu'il décide d'agir comme les partisans sont en droit de s'attendre d'un chef, je crois qu'il possède le caractère et la fougue nécessaire pour diriger le parti et mener le Québec vers la souveraineté. Mais s'il continue d'agir comme il le fait depuis le 4 septembre 2012, il devrait laisser la place à d'autres.
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La course à la chefferie du Parti québécois commencera sous peu. Trois noms circulent déjà comme aspirant : Pierre Karl Péladeau, Jean François Lisée et Bernard Drainville. Mais en ce qui concerne ce dernier, son comportement lors du mandat 2012-2014 du Parti québécois démontre qu'il a quelques leçons à apprendre avant de mériter une telle place.

Proscrire la manipulation

La première chose qui m'a toujours irrité chez M. Drainville était sa façon de manipuler l'opinion publique avec la charte des valeurs québécoises. Un peu comme l'avait fait Vic Toews en disant que les opposants au projet de loi C-30 protégeaient les pédophiles, Bernard Drainville a souvent affirmé que nous devions être pour la charte si nous étions pour l'égalité des sexes, démontrant ainsi qu'il était capable d'user de démagogie et de couper dans les nuances pour arriver à ses fins.

Pourtant, Amnistie internationale, un organisme qui n'a plus à faire ses preuves en ce qui a trait à la défense des droits de l'Homme, avait pris position contre l'interdiction des symboles religieux aux employés de l'État. Il va sans dire que, pour les militants de cette organisation, se faire dire qu'ils sont contre l'égalité hommes-femmes est une grande insulte.

Pour des sujets aussi complexes, les raccourcis idéologiques sont à proscrire en faveur de la nuance. Parce que non seulement on base l'importance d'un projet sur des faussetés, mais en plus c'est de la pure manipulation et c'est insultant pour tous les Québécois.

Tu ne mentiras point

Depuis la débâcle du PQ, M. Drainville a affirmé, à plusieurs reprises, qu'il se serait éventuellement entendu avec la CAQ sur la charte allant même jusqu'à « limiter à certaines classes d'employés l'interdiction du port des signes dans un premier temps » .

Or, lorsque le Parti québécois a ressorti la charte à la mi-mars, M. Drainville a confirmé ce qu'il affirmait déjà depuis le début : « Il n'est pas question de vider la charte de son contenu ou de reculer sur les aspects fondamentaux, notamment sur la question du port de signes religieux ». Aucune ouverture à des compromis ici.

Alors soit il s'agit d'un mensonge, d'hypocrisie ou M. Drainville a une mémoire très sélective.

Le respect de base envers les électeurs impose l'honnêteté. Je serais bien plus enclin à voter pour un candidat qui dit « nous aurions dû être plus flexibles » qu'un politicien qui nous ment en plein visage.

Éviter les campagnes de peur

Beaucoup de politiciens ont recours à la peur pour gagner des votes. Historiquement, au Québec, le PLQ avait la palme avec l'épouvantail référendaire. Cette fois, le PQ s'y est mis avec la charte. Mais les ténors du Parti québécois ont particulièrement manqué de classe lorsqu'ils ont décidé de donner un visage à cette peur : celui de Janette Bertrand.

Cette grande dame a une peur irrationnelle des extrémistes religieux et elle l'a démontré lorsqu'elle s'est présentée au côté de M. Drainville avec une histoire très hypothétique et pour laquelle la Charte n'aurait rien changé. Mais la réaction du ministre n'a pas été de la rassurer, au contraire, il avait l'air très heureux de son intervention.

Profiter de ce genre de situation pour répandre la crainte et gagner des points est d'un niveau de bassesse peu commun non seulement envers la population, mais envers Mme Bertrand. À moins que M. Drainville partage cette peur, dans quel cas, il n'a pas la trempe pour être le chef d'un parti et encore moins premier ministre du Québec!

Prendre la responsabilité de ses actions

Une règle élémentaire de la vie qu'on m'a enseignée lorsque j'étais enfant : quand on fait un dégât, la responsabilité de le ramasser nous revient. Or, M. Drainville a lancé son projet de charte comme on lancerait une grenade : en courant se cacher en petite boule les mains sur les oreilles et les yeux fermés laissant la chose faire ses dégâts en espérant être épargné.

S'en est suivi une vague dans laquelle les véritables xénophobes avaient l'impression d'être autorisés à l'être et à l'exprimer haut et fort.

Attention, je ne dis pas que ceux qui sont pour la charte sont xénophobes. Mais la xénophobie devenue manifeste est un des dommages collatéraux.

À partir de ce moment, les gens qui ont peur des étrangers ont eu l'impression qu'ils avaient droit de mépriser, d'insulter et d'ostraciser les minorités religieuses, particulièrement les musulmans. Certains allant même jusqu'à applaudir la mort accidentelle d'une musulmane dans un escalier roulant du Métro!

Où était M. Drainville pour dénoncer, condamner et se dissocier de ces gestes et paroles? Nulle part. C'était pourtant lui qui avait délié les langues, peut-être, sans le vouloir. Il aurait dû être présent pour condamner chaque geste, chaque parole islamophobe ou xénophobe. On appelle ça prendre la responsabilité de ses actions.

S'assumer

Ce point ne concerne pas que M. Drainville, mais, comme il fait partie du joyeux trio qui semble vouloir prendre la place de Pauline Marois, c'est un point important.

L'article numéro 1 du Parti québécois est de réaliser la souveraineté. Or, étrangement, nous n'avons pas entendu parler du projet pendant le dernier mandat, ni pendant la campagne... sauf quand ils se défendaient de vouloir faire un référendum ainsi que le soir de la défaite alors que M. Drainville scandait, avec la foule présente à l'hôtel Westin, « on veut un pays ».

Le prochain chef du PQ devra décider, avec les militants, si le parti est souverainiste. Le cas échéant, qu'il le crie haut et fort et, au lieu d'attendre passivement que les Québécois soient prêts, qu'il en fasse la promotion pour les préparer de façon proactive. Sinon, qu'il retire l'article du programme pour passer à autre chose, car personne n'a avantage à rester flou sur la question.

Si M. Drainville est capable de s'élever au-dessus de la mêlée et qu'il décide d'agir comme les partisans sont en droit de s'attendre d'un chef, je crois qu'il possède le caractère et la fougue nécessaire pour diriger le parti et mener le Québec vers la souveraineté. Mais s'il continue d'agir comme il le fait depuis le 4 septembre 2012, il devrait laisser la place à d'autres.

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