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La «marée du siècle» dans le Saint-Laurent?

Comment se fait-il donc que la marée dans le Saint-Laurent ne se comporte pas comme celle en Bretagne?
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Il a beaucoup été question ces derniers jours dans l'actualité française d'un évènement appelé «la marée du siècle». Le terme a été utilisé pour qualifier la marée exceptionnellement grande qui a touché la côte atlantique française le samedi 21 mars 2015. Le phénomène a attiré des milliers de curieux sur les côtes atlantiques françaises.

Notez que le terme «marée du siècle» est un abus de langage qui pimente l'imaginaire collectif. Ce type de grande marée, bien qu'exceptionnelle en France, ne se reproduit pas vraiment aux cent ans, mais plutôt aux 18 ans environ. Il serait peut-être plus approprié, tout en restant poétique, de parler de «la marée d'une génération».

Trois principaux effets d'origine astronomique coïncident ces jours-ci pour produire des marées exceptionnellement grandes en France.

D'abord, la Terre, la Lune et le Soleil sont alignés de sorte que les effets de la Lune et du Soleil sur la marée s'additionnent. En soi, ceci n'a rien d'exceptionnel, car cette situation se reproduit deux fois par mois alors que la Lune poursuit son orbite mensuelle autour de la Terre. Lorsque cet alignement se produit, deux fois par mois donc, nous sommes en situation de grandes marées appelées marées de vives-eaux.

Ensuite, nous sommes autour de l'équinoxe du printemps. Autour des équinoxes, les marées semi-diurnes, c'est-à-dire celles qui arrivent deux fois par jour, sont plus grandes qu'autour des solstices. Cette année, une des deux marées de vive-eau du mois de mars s'adonne à coïncider avec l'équinoxe. On parle alors de marée de vive-eau d'équinoxe. Le phénomène est déjà là plus rare, mais pas encore exceptionnel.

Finalement, la Lune se trouve ces jours-ci tout près de son périgée, c'est-à-dire qu'elle est au plus près de la Terre sur son orbite elliptique. Plus la Lune est près de la Terre, plus son effet sur les marées est important. Il s'agit là de la troisième et rare coïncidence.

Il y aurait encore quelques autres éléments à considérer mais pour l'essentiel ce sont ces trois facteurs coïncidant qui ont causé une marée exceptionnellement grande en France.

Mais qu'en est-il chez nous, dans le Saint-Laurent? Ces trois facteurs, alignement des astres, équinoxe et périgée de la Lune, n'affectent pas que la France mais bien toute la planète.

Prenons Rimouski qui représente bien l'ensemble de la marée du Saint-Laurent. La plus grande marée ces jours-ci a eu lieu dans la nuit de dimanche (22) à lundi (23) avec une différence de niveau d'eau entre la marée basse et haute, qu'on appelle le marnage, de 4,7 m.

Est-ce que cela correspond aussi chez nous à la «marée du siècle»?

La réponse est non. Bien qu'il s'agissait d'une très grande marée qui arrive assez peu souvent, elle n'était pas exceptionnelle. En fait, en 2015, nous avons déjà vécu une marée plus haute encore qui n'a pas pour autant fait les manchettes. En effet, le 20 février dernier le marnage a atteint 4,8 m. Il y aura encore deux autres grandes marées de la sorte en 2015. Le 30 septembre et le 28 octobre prochain, les marnages seront respectivement de 4,7 m et de 4,8 m. Même en 2014 il y a eu quelques cas de marées aussi grandes que celle qui s'est manifestée dans la nuit de dimanche à lundi. En fait, on retrouve des épisodes d'aussi grandes marées pratiquement à chaque année dans le Saint-Laurent.

Comment se fait-il donc que la marée dans le Saint-Laurent ne se comporte pas comme celle en Bretagne? La réponse est quelque peu technique, mais peut tout de même s'expliquer assez simplement. Pour des raisons de géométrie des continents et des bassins océaniques, la marée en Bretagne est principalement de nature semi-diurne; il y a essentiellement deux marées par jour qui sont presqu'identiques en hauteur. Dans le Saint-Laurent, la situation est différente, car la marée semi-diurne est de plus modulée par un important cycle diurne qui fait en sorte que deux marées consécutives ont des hauteurs significativement différentes. Or, autour des équinoxes, c'est la marée semi-diurne qui est amplifiée alors que la marée diurne est, au contraire, diminuée. Dans le Saint-Laurent donc, la période autour des équinoxes n'a pas autant d'effet sur le marnage total qu'en Bretagne, car l'effet d'amplification de la marée semi-diurne est quelque peu compensée par la diminution de la marée diurne.

Donc pas d'inquiétude pour les riverains du Saint-Laurent ces jours-ci. Le niveau d'eau est élevé, mais nous en avons vu d'autres!

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