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Le bel avenir de l'extrême-droite (FPÖ) après l'annulation de la présidentielle autrichienne

Le FPÖ a un bel avenir en Autriche: après sa défaite électorale du 23 mai dernier, il remporte aujourd'hui une victoire symbolique qui préfigure sans doute un succès dans les urnes à l'automne.
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Le FPÖ a un bel avenir en Autriche: après sa défaite électorale du 23 mai dernier, il remporte aujourd'hui une victoire symbolique qui préfigure sans doute un succès dans les urnes à l'automne.

Encore sous le choc du référendum britannique du 23 juin 2016 ayant conduit au Brexit, la scène politique européenne tremble à nouveau aujourd'hui: la Cour constitutionnelle autrichienne vient d'invalider les résultats du second tour des élections présidentielles du 22 mai dernier. La plus haute juridiction du pays annule ainsi la courte victoire électorale que le candidat Vert, Alexander Van der Bellen, avait remportée de justesse. Son rival populiste, Norbert Hofer, le candidat du parti d'extrême droite FPÖ, sorti largement en tête au premier tour avec 36% des voix, l'avait immédiatement contestée devant le juge constitutionnel. Le soulagement de l'Europe aura duré à peine un mois.

Le coup de théâtre de l'invalidation et l'impuissance des partis traditionnels zombies

Cette invalidation constitue un coup de théâtre: Alexander Van der Bellen devait en effet prendre ses fonctions la semaine prochaine. Le soulagement généralisé dans le camp des anti-FPÖ en Autriche et en Europe a trop rapidement relégué les recours formés par le FPÖ au second plan. Une telle invalidation n'est pourtant pas en soi-même étonnante dans un État aux standards démocratiques élevés, après une élection aussi disputée et avec un écart de voix aussi faible (30 000 dont une large partie par correspondance).

L'invalidation de l'élection a pour première conséquence de rappeler à la classe politique autrichienne qu'elle est toujours largement démunie face au FPÖ. Les prochaines élections présidentielles, sans doute à l'automne, se dérouleront dans un paysage politique en ruines. En effet, le premier tour avait marginalisé le parti populaire démocrate-chrétien (ÖVP) et le parti social-démocrate (SPÖ), qui ont alterné au pouvoir, respectivement de 1945 à 1970 et de 1970 à 1990. Ces deux formations sont aujourd'hui minoritaires dans le pays: leurs candidats respectifs ont chacun recueilli environ 11% des voix lors du premier tour du 24 avril. Leur grande coalition actuelle au Conseil national (le Parlement autrichien) est moribonde.

Malgré le choix de Christian Kern comme nouveau chancelier, les prochaines élections présidentielles mettront le FPÖ en position de croissance face à des partis traditionnels largement zombies.

L'invalidation d'aujourd'hui rappelle ce que tous essayaient d'oublier depuis quelques semaines: la coalition gouvernementale et parlementaire souffre d'un manque de légitimité criant.

L'alternative au FPÖ reste à structurer

Toute la question est aujourd'hui de savoir si, en quelques mois, Alexander Van der Bellen parviendra de nouveau à rassembler autour de lui un front anti-FPÖ comme il l'avait fait en quelques semaines entre le premier tour et le second tour. L'urgence de «l'union sacrée» est aujourd'hui passée. Il lui faudra démontrer au fil des mois qui viennent qu'il est capable de cimenter une offre politique alternative.

Elle est aujourd'hui fragile, car dispersée. Les partis traditionnels risquent de s'arc-bouter sur leur anachronique majorité parlementaire: le SPÖ dispose de 52 sièges et l'ÖVP de 51 sièges sur un Parlement qui compte 183 sièges en tout. Ils contesteront sans doute mezzo voce le leadership aux Verts qui n'en comptent que 24. De plus, Alexander Van der Bellen n'est pas la seule figure ayant émergé: la candidate indépendante Irmgard Griss (18,5% des voix au premier tour) peut elle aussi prétendre à un rôle de premier plan. Toutes ces tendances ne jouent ni en faveur d'une alliance solide contre le FPÖ ni en faveur d'une offre gouvernementale charpentée.

Sans plateforme et sans coalition, sans programme unifié et sans leader incontesté, les forces anti-FPÖ ont encore tout à faire pour s'engager dans la prochaine campagne électorale.

Le FPÖ, vainqueur symbolique du second tour du 23 mai?

Le FPÖ était sorti du deuxième tour du 22 mai tout à la fois vaincu électoralement et vainqueur politiquement. Sa victoire politique tenait au fait qu'il avait tous les avantages d'un succès dans les urnes sans les inconvénients. Première force partisane du pays, il structure l'agenda politique et le débat public en Autriche autour de ses thématiques: hostilité à l'islam et à l'immigration, revendication des racines chrétiennes de l'Europe, euroscepticisme populiste, mais non sécessionniste. La défaite du 22 mai l'avait en outre dispensé de faire ses preuves dans l'administration du pays.

Il peut aujourd'hui faire prospérer sa rhétorique anti-élites, anti-mondialisation, anti-Vienne La Rouge sur les thèmes familiers aux populistes: la victoire (presque) volée au peuple, la défiance envers la classe politique traditionnelle, la coalition des partis installés d'Europe contre la souveraineté nationale du peuple autrichien, etc.

Dans la perspective des prochaines échéances électorales présidentielles, le FPÖ pourra s'appuyer sur la victoire symbolique que constitue l'invalidation.

Pour lui, toutes les conditions sont réunies pour accéder à la magistrature suprême: il a fait ses preuves (controversées cependant) de gestionnaire en Carinthie et au Burgenland en coalition, il a entretenu une dynamique de croissance électorale tout au long de 2016 et tous les partis politiques sont sommés de se positionner par rapport à lui. Il lui reste à sillonner les campagnes autrichiennes et à annoncer la dissolution du Parlement en cas de victoire à la présidentielle et il rassemblera autour de lui une majorité populaire.

Après la victoire politique et la victoire symbolique, la victoire électorale puis parlementaire semble à portée de main pour le FPÖ.

Ce billet de blogue a initialement été publié sur le Huffington Post France.

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