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La Tunisie, 5 ans plus tard

On m'a regardé avec des points d'interrogation dans les yeux plusieurs fois quand j'annonçais que je partais en Tunisie. C'est supposé être dangereux, ce pays-là.
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On reste toujours attachés à ses amours de jeunesse, à ces instants sur lesquels le cœur s'est ouvert pour la première fois, comme le disait Camus. Ouvert sur la vie, sur le courage, sur l'espoir.

Pour moi, c'est la Tunisie. Un petit pays de la Méditerranée coincé entre l'Algérie et la Libye, aux pieds de l'Europe, berçant sous le soleil et le chant des mosquées, au rythme des vagues. Une culture très riche qui se partage dans les dédales des villes et des cafés, un passé singulier qui revit par plusieurs sites historiques fièrement entretenus, une générosité aussi éclatante que le bleu du ciel.

Je l'ai rencontrée pour la première fois, cette Tunisie, en 2010, neuf mois avant que tout éclate. Puis, une deuxième fois, en janvier 2011, parachutée en plein dans l'effervescence du jasmin. On ne peut pas en ressortir complètement indemne. Ça marque, de vivre un moment de cette ampleur. Ça nourrit une soif de changement, une volonté de faire bouger les choses, une nécessité d'essayer de comprendre le monde dans lequel on vit. Surtout quand on réalise l'effet domino qui a suivi.

J'en reviens tout juste d'un troisième séjour depuis. Faut dire que j'y suis un peu accro. Mais en Tunisie, je retrouve toujours une certaine paix. C'est une seconde maison, celle où le cœur s'est profondément enraciné. Le blanc et le beige des immeubles contrastent avec le ciel rempli de soleil, les drapeaux rouges rayonnent aux côtés des palmiers, une modernité criante d'histoire. La beauté féroce du pays frappe le premier regard du voyageur. On retrouve un sourire, une insouciance de l'être, un désir de se redécouvrir.

On m'a regardé avec des points d'interrogation dans les yeux plusieurs fois quand j'annonçais que je partais en Tunisie. C'est supposé être dangereux, ce pays-là, par les temps qui courent. Même le douanier au retour m'a trouvé un peu suspecte, avec des étampes dans le passeport.

Ça me transperce à chaque fois que j'entends parler de violence, d'un attentat, de regroupements armés, de l'État islamique. Ces idées faussement véhiculées, cette peur envers l'étranger qu'on balance à gauche et à droite, elles déforment une réalité qui en est toute autre. Parce que ça ne représente pas le pays, ni son peuple. Une jeunesse allumée, déterminée à mieux faire, à dénoncer, à parler de paix, d'un futur.

On ne peut pas effacer son histoire, mais on peut l'utiliser pour y bâtir les fondations d'un avenir meilleur. Une transition politique, assise sur une histoire qui a connu la France, les Ottomans et les Romains, ça ne se magasine pas en quelques heures seulement. Un contexte géographique qui ne pardonne pas, et qui, oui, certainement, complique les choses.

Mais malgré tous les préjugés qu'on lui impose, la Tunisie, elle, en rit un peu. Elle se moque avec bon cœur de ce qui se passe chez les voisins, blague des misères de l'État, des nouvelles lois qui n'ont de sens que pour la personne qui les a rédigées.

On m'a dit lors de mon dernier séjour que la Tunisie «aurait besoin d'un ministère du savoir-faire». Mais ça, on en aurait tous un peu de besoin, et ces mois-ci, même ici au Québec.

Finalement, ce n'est pas si différent ailleurs qu'ici.

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