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Je n'ai que faire d'un projet liberticide qui offre aux radicaux de tout acabit la possibilité de faire taire tous ceux qui ne sont pas d'accord avec leurs vues et osent le faire savoir.
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Après avoir tenu à ce jour huit séances de commission parlementaire et avoir entendu près de deux douzaines d'organismes, le gouvernement devrait purement et simplement retirer son projet de Loi 59 concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence.

Tous, à l'exception, on s'en doutait bien, du Forum musulman canadien et du Conseil musulman de Montréal, s'y opposent. Il ne s'en trouve pas beaucoup pour suggérer des amendements à ce projet qui n'aurait jamais dû voir le jour. Sauf le Barreau du Québec, bien obligé de nuancer comme il se doit. Et, bien sûr, monsieur Jacques Frémont, président de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec, qui en est le véritable initiateur après l'avoir appelé de tous ses vœux dans des interventions dignes des meilleurs lobbyistes. On le comprend: mieux vaut, en effet, un projet amendé (oh, si légèrement amendé) que pas de projet du tout.

La vérité est pourtant simple: ce projet de loi est irréformable.

Je n'ai que faire d'un projet liberticide qui constitue une forme inacceptable de censure, donne un pouvoir exagéré à l'Office des droits de la personne et de la jeunesse et offre aux radicaux de tout acabit (des insignifiants aux plus dangereusement sectaires) la possibilité de faire taire tous ceux qui ne sont pas d'accord avec leurs vues et osent le faire savoir.

Je n'aime pas beaucoup la police de la langue, bien que je la sache nécessaire. Je ne peux imaginer mon Québec d'aujourd'hui aux prises avec une police des idées. Je ne l'ai pas servi pendant près de 50 ans pour le voir reculer de 70 ans.

Je ne veux pas laisser autant de pouvoirs à des fonctionnaires, aussi bien intentionnés soient-ils. Enquêter de sa propre initiative ou à la demande, anonyme ou publique, d'un peu n'importe qui, imposer des amendes, créer des listes de contrevenants, décréter sa propre définition de ce qui constitue un discours haineux, ne pas être lié par les rigueurs de la preuve devant nos tribunaux civil et pénal, tout cela me paraît dangereux pour la démocratie et son nécessaire corollaire, la liberté d'expression. Je ne veux pas qu'on la limite, ni pour moi, ni pour les autres, sous le fallacieux prétexte qu'il faut lutter contre la radicalisation et la violence.

Je veux pouvoir caricaturer, exagérer, être grossier sans être obscène, outrancier si nécessaire, misant sur l'éducation que j'ai reçue et celle que j'ai tenté de transmettre pour modérer mes propos, si nécessaire.

Si j'accepte que les parlementaires québécois, dont j'ai été, limitent leur droit de dire n'importe quoi dans leur Assemblée nationale, je ne veux pas qu'ils limitent le mien en société.

Je ne veux pas qu'on définisse pour moi ce que je dois dire des autres. Je veux pouvoir être abrasif, dérisoire, absurde dans les jugements que je porte sur des groupes ou des citoyens.

Je ne veux pas que l'on confie à une Commission, dont l'efficacité n'a jamais ébloui personne, des pouvoirs qui existent déjà au Canada. Ma société distincte n'en a pas besoin et peut très facilement s'accommoder des prescriptions du Code criminel canadien appliqué par nos tribunaux en matière de discours haineux ou qui incite à la violence contre un groupe de personnes identifiables. Je préfère la protection ultime de notre besogneuse Cour suprême au jugement d'un organisme qui n'est redevable à personne.

Je ne veux pas d'un projet de loi inutile parce qu'il ne répond à aucun besoin qui ne trouve pas solution ailleurs.

Je veux éviter à mon gouvernement une série de procès qu'il perdra sur cette question au cours des années à venir, lui évitant une déconfiture certaine.

Assez joué: monsieur Couillard et sa ministre de la Justice doivent avoir le courage de reconnaître qu'ils se sont trompés et retirer cette mauvaise solution à un problème délicat.

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Mai 2017

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