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Le rapport Bouchard-Taylor une décennie plus tard

C'était à l'époque la crise des accommodements raisonnables. Les écoles hassidiques, le kirpan des sikhs, les vitres givrées d'un YMCA, la réglementation d'Hérouxville, le voile, le racisme, la xénophobie, autant de sujets qui faisaient la Une des médias et l'exacerbaient tout un peuple
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Vous souvenez-vous de la Commission Bouchard-Taylor qui s'est tenue en 2007? De mon de point de vue, c'était le phénomène le plus démocratique au monde. En plus des 22 forums du peuple où 3664 personnes indépendantes se sont exprimées à raison de deux minutes chacune, 800 personnes ont participé aux forums nationaux. Et 13 recherches ont été commandées. Ça fait du monde et des avis. Le tout pour un budget de près de 4 millions de dollars. Quand on pense que la Commission Bastarache a coûté 8 millions et que la Commission Charbonneau plus de 40 millions.

Je doute que les moins de 25 ans se souviennent de cet événement crucial. Ils étaient trop jeunes. C'était à l'époque la crise des accommodements raisonnables (entre 2006 et 2008). Les écoles hassidiques, le kirpan des sikhs, les vitres givrées d'un YMCA, la réglementation d'Hérouxville, les interventions de policières et les hassidiques, la burqa, le hijab, le niqab, le voile, le racisme, la xénophobie, autant de sujets qui faisaient la une des médias et l'exacerbation de tout un peuple, celui du Québec.

On voulait bien accueillir les immigrants, même les musulmans, mais à la condition qu'ils adoptent notre langue et un large pan de notre culture, qu'ils ne nous imposent pas tous ces rituels religieux que nous avions rangés de peine et misère. On ne voulait pas de ces différents voiles sur la place publique. Nous décelions une xénophobie que l'on retrouve partout sur la planète : la peur de l'étranger qui vient déranger.

Je me souviens de cette période puisque je revenais d'une absence de huit ans avec mon épouse sur notre voilier. Nous avions mouillé notre ancre devant les quais de petits villages de 33 pays tout autour de la mer des Caraïbes. Nous étions des étrangers en pays étrangers. Partout, nous avons ressenti une xénophobie modérée à notre égard : la peur que nous venions les déranger dans leur façon de vivre et de penser. Il nous fallait toujours de trois à quatre jours pour les apprivoiser, les séduire. En souriant toujours, en prenant une bière avec eux, en les questionnant sur leurs recettes, sur leur vie, leur histoire et participant aux événements. La cinquième journée, ils nous invitaient et s'intéressaient à notre aventure et notre pays. D'abord les séduire et les connaître. Puis l'amitié pointait le nez.

Revenu au pays, j'entendais dans les médias les commentateurs et les intellectuels dire que nous devions séduire les arrivants et apprendre à les connaître. Le monde à l'envers, quoi! Tout le contraire de ce que nous avions appris durant huit ans. Avec cette expérience acquise, j'ai cru qu'il me fallait aussi participer aux «deux minutes» du peuple devant Bouchard et Taylor. J'ai pris 5 minutes. Ahuri je fus devant une ovation de l'assistance qui me conforta dans mon avis qui n'était pourtant qu'une simple question de relations humaines.

À la suite de l'écoute des multiples récriminations du peuple et de bien des études, les commissaires Bouchard et Taylor publièrent un rapport et bien des recommandations pour inciter au mieux vivre et éviter toutes sortes de dérapages sociaux présents et futurs ainsi qu'une vraie bouillie identitaire. On entrevoyait les accommodements déraisonnables devenir raisonnables.

Bien sûr que ce rapport laissa les indifférents et les extrémistes de tous camps sur leur faim. Le gouvernement qui avait commandé le rapport pour mettre le couvert sur une crise qui allait en s'amplifiant le laissa sécher sur une tablette. Pourtant, il y avait bien des suggestions sur les divers accommodements et sur le port ou non de différents voiles. Près de 10 ans ont passé! Avec le regret des réglementations ignorées par le gouvernement d'alors et les suivants!

Et pourtant, près de 10 ans plus tard, la situation s'est banalisée sur certains aspects, mais a évolué pour d'autres. Les accommodements dits raisonnables et la question des voiles sont toujours d'actualité. La population musulmane, elle, a décuplé. Plusieurs d'entre eux se sont intégrés, mais certains ont conservé, intacts, leurs rituels religieux, leurs us et coutumes, en ne s'intégrant pas et en cherchant à imposer leurs costumes, religieux pour les uns et culturels pour les autres.

Gérard Bouchard a souligné que le «grand rapport» est toujours d'actualité moyennant quelques mises à jour à la lumière des dernières années. Il a ajouté qu'un comité d'experts devrait se pencher sur la question pour proposer une ligne de conduite qui nous évitera les désordres comme ailleurs sur la planète.

Après une décennie, le problème persiste toujours. Le voile et les accommodements sont toujours actuels. Bien d'accord de recevoir les immigrés, mais prenons les mesures pour diriger adéquatement leur intégration. La majeure partie en est à sa première expérience d'émigration. Ils ont besoin d'aide et de support, de mieux nous connaître pour apprécier notre civilisation et s'y intégrer.

À lire dans les prochains jours: Le multiculturalisme, une illusion

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Mai 2017

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