Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.
Les journalistes sont maintenant les cibles à atteindre. Pourquoi ? L'objectif est facile à comprendre : créer la peur dans les rangs de la police. Qui va prendre le risque de rencontrer des journalistes pour donner de l'info ?
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Lundi matin, c'est sans surprise que j'ai appris que le journaliste et chroniqueur Patrick Lagacé avait été mis sous écoute et suivi grâce au GPS intégré de son iPhone. Ce « dangereux criminel » recevait les confidences de policiers qui sont soit désabusés, soit en colère ou découragés de tout ce qui se passe dans ce merveilleux monde du Service de police de la Ville de Montréal. Nous avons appris hier que Lagacé n'est pas un cas isolé, trois autres journalistes étaient ciblés.

Oui, les journalistes sont maintenant les cibles à atteindre. Pourquoi ? L'objectif est facile à comprendre : créer la peur dans les rangs de la police. Qui va prendre le risque de rencontrer des journalistes pour donner de l'info ? Car n'en doutez pas, c'est bien le but. Cette pratique n'est pas nouvelle, seule la technologie a changé. Les systèmes sont de plus en plus sophistiqués et nos officiers de direction de plus en plus enclins au secret. S'attaquer aux messagers est un vieux réflexe, mais ici, en frappant les journalistes, on s'attaque à deux cibles du même coup. Pendant quelques semaines, les deux deviendront paranoïaques. Du côté policier, il y aura suspension ou même renvoi. Du côté des journalistes, des tracasseries de toutes sortes. C'est la finalité !

Depuis 1995, et le nouveau directeur du SPVM à l'époque, Jacques Duchesneau, l'information doit passer par les « Relations publiques ». Fini les entrevues données par des enquêteurs connaissant le dossier. Dès lors, tout devra être édulcoré, sans saveur, inodore, insipide, translucide, sans être transparent. Je ne me souviens plus combien de fois mes officiers supérieurs m'ont semoncé à ce sujet. Le dernier en date, c'était deux jours avant ma retraite et là, même à deux jours de la quille, on me menaçait de suspension et de non-respect de la déontologie policière.

Je ne reviendrai pas sur les déboires récents du SPVM, mais souvenez-vous de la chasse aux sorcières qui a suivi l'affaire Davidson. C'était en fait une première pour ce département qui avait tenté, avec un certain succès, de mettre un couvert hermétique sur des agissements criminels. « Le bon peuple n'a pas besoin de tout savoir et ce qui se passe à l'interne doit rester à l'interne. »

À mener des enquêtes sur les hommes de troupe en lieu et place des criminels, on ne va pas rehausser la confiance du public.

Au SPVM, les patrons prennent des retraites anticipées pour ne pas passer dans la déchiqueteuse. Il en va de même pour certains policiers qui pourraient mettre ce département dans l'embarras. Il n'est pas bon de savoir que le dernier directeur fut éjecté sans ménagements ; que des cadres se retrouvent là où ils sont les plus utiles, c'est à dire des tablettes ; que l'on en protège d'autres qui en savent beaucoup, mais que l'on bouscule des gars en bas, car qu'ils sont des libres penseurs ou parce qu'ils en savent juste assez pour parler et pas assez pour frapper avec certitude.

Cette vague de restructuration n'est pas anodine, le directeur Philippe Pichet se devait de faire quelques changements. On peut dire : « Nous avons pleine confiance en ce cadre » et le tabletter quelques jours plus tard. L'honneur est presque sauf.

En écoutant lundi les mots du directeur du SPVM, j'ai cru reconnaître ceux de notre premier ministre. « J'ai confiance en... » Pourtant, plus personne n'est dupe. Si Denis Coderre fait semblant d'y croire, sachons que sa confiance est strictement limitée. Les « amis » placent ce directeur sur une chaise à trois pattes et il ne manque qu'une poussée toute légère pour le faire trébucher.

À mener des enquêtes sur les hommes de troupe en lieu et place des criminels, on ne va pas rehausser la confiance du public. J'ai trouvé parfois l'ancien directeur Marc Parent trop mièvre, pourtant je sais que dans certains dossiers de haut-gradés, il aurait aimé aller jusqu'au bout.

J'ai bien peur que Philippe Pichet ne soit jamais un grand homme. Servir et protéger ne s'applique plus chez les cadres. Protéger, oui, mais pas la population. Denis Coderre aura une décision à prendre. Je crois qu'il devra remplacer celui qu'il appelle affectueusement Philippe. Il faudra penser à quelqu'un de l'extérieur, car dans ce département, ça grenouille fort.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Mai 2017

Les billets de blogue les plus lus sur le HuffPost

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.