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Phylip le pédophile, les victimes, les corps de police et une mère dans le déni

Le fils pédophile devenait pour elle la victime d'un coup monté par une meute rugissante.
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Mercredi le 2 mars, le pédophile - car c'est ce qu'il est - Phylip St-Jacques a reçu sa sentence. Vingt-deux mois de détention. Ceci dit, il sortait le lendemain.

Le jeune homme a plaidé coupable à plusieurs chefs d'accusations de nature sexuelle. Il croupissait en détention depuis le 17 décembre 2014. Ce prédateur, car il en est un, aura écumé pendant plus de deux ans les sites sur l'autisme du Québec, de la France, de la Suisse et des États-Unis. Cette enquête, était je l'espère bien ma dernière.

Le modus operandi était simple : s'infiltrer dans tous les sites sur l'autisme, passer parfois pour un expert ou, simplement, un autiste ayant des besoins particuliers. De fil en aiguille, il réussissait à obtenir la confiance des mères aidantes et, petit à petit, parlait de ses problèmes «d'hygiène personnelle'». Phylip expliquait ne pouvoir comprendre comment se laver autrement qu'en regardant une mère laver son enfant. Ne riez pas, c'est possible avec l'autisme. Ne pas comprendre une fois, deux fois... Mais ce «gentil» garçon aura lancé sa ligne à plus de 109 familles.

Ce manipulateur, déjà accusé en 2013 et sous le coup d'un 810 pour des actes similaires, aura réussi à prendre à l'insu de ces mères des photos de dizaines de petits pénis. Il aura même lavé certains enfants, sous la supervision de parents bienveillants.

Je me suis résigné à me mêler de l'affaire en tant qu'enquêteur civil, devant l'incurie, l'inaction et le refus de s'en occuper de certains enquêteurs des deux grands corps de police. Car pour certains enquêteurs, l'affaire n'en valait pas la peine: «Ça se passe entre autistes», ou «Deux plaignantes, tout au plus, et les autres sont des hystériques». Ceci, malgré le fait que St-Jacques ait été sous conditions pour les mêmes accusations.

Alors pendant plus de quatre mois, avec l'aide d'ex-flics et de membres de ma famille, j'ai eu l'occasion de rencontrer des parents atterrés, en colère, déçus, dévastés et honteux. Des parents pleurant à chaudes larmes, racontant comment ils avaient été floués par un jeune homme à l'air tout à fait inoffensif. Un jeune paraissant un peu gauche, le dos voûté, un air de biche apeurée, ayant comme passion la photographie, et, tout comme un caméléon, s'adaptant aux passions des victimes. Les musées ? Bien sûr. Le cinéma ? Pourquoi pas... Tu n'aimes pas ? Moi aussi, je déteste. En fait, tout pour être proche. Un jeune homme racontant être délaissé par sa mère, ridiculisé par sa sœur, bafoué par son père... Il dira plus tard à une amie : «Je n'ai pas de vie, je m'en invente une».

Ce sont finalement des officiers de la Sûreté du Québec qui termineront le travail commencé. Ils auront fait un boulot incroyable. Que dire de la Procureure de la couronne, une femme disponible, tenace et à l'écoute des victimes.

Alors, mardi le 1er mars, des parents nerveux et émotifs sont venus raconter à la juge toute la douleur qu'ils ressentent encore, la pesanteur du jugement des autres. Vous savez, ceux qui disent : «Avec moi, ça ne serait pas arrivé». Des parents qui, tranquillement, se refont une vie, tout en tentant de pardonner la trahison.

De l'autre côté, le discours d'une mère aigrie, accusant les familles de complicité pour avoir permis à son fils d'être chez eux. Que ce fils est malade, qu'il il n'a pas violé leurs enfants. Et cette phrase assassine : «Après tout, ce ne sont que des photos !»

Tout à coup, le fils pédophile devenait pour elle la victime d'un coup monté par une meute rugissante. Cette mère sans aucune compassion envers les victimes, gardant ce petit air vindicatif tout au long de ses présences au tribunal. Malheureusement, son attitude bornée, son déni profond et malsain, ne vont pas arranger les choses.

Phylip, quant à lui, dira comme il l'a toujours fait : «Désolé, je ne le ferai plus.»

Ce «désolé» qu'il a aussi prononcé à Saint-Jérôme, Laval et Montréal.

Moi aussi je suis désolé, Phylip. La pédophilie est une déviance et les pédophiles vivent de pulsions et de fantasmes. Se poser la question sur la récidive, c'est aussi y répondre.

Code criminel.

810 (1) Peut déposer une dénonciation devant un juge de paix ou la faire déposer par une autre personne, la personne qui craint, pour des motifs raisonnables, qu'une autre personne :

•a) soit ne lui cause ou cause à son époux ou conjoint de fait ou à son enfant des lésions personnelles ou n'endommage sa propriété ;

•b) soit ne commette l'infraction visée à l'article 162.1.

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Mai 2017

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