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Le triomphe de la médiocrité sur l'excellence

Avez-vous regardé l'émissionsur l'ancien sergent-détective Benoît Roberge?
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Quelqu'un a-t-il regardé l'émission Policier criminel sur l'ex-sergent-détective Benoît Roberge? Comprenez-moi bien, je ne cautionne aucunement les agissements de l'homme, je les ai même dénoncés lors d'un point de presse en 2005. Qu'en est-il des gestes d'officiers supérieurs qui, à mon sens, sont tout aussi blâmables, sinon criminels?

Un commandant à la retraite, Richard Dupuis, qui a eu sous ses ordres Ian Davidson, Benoît Roberge et Philipe Paul, aurait dû se garder une petite gêne. Ce n'est pas parce que tu es nommé à la tête d'un groupe que tu es compétent.

Lors de la diffusion de l'émission, ce commandant dit que Benoît Roberge lui a communiqué le renseignement qu'un tueur des Hells Angels revenait au Québec et que sa source d'information demandait d'attendre un peu avant de procéder à l'arrestation, afin de protéger sa propre vie.

«J'ai profité d'un congé de trois jours de Monsieur Roberge pour monter une opération filature sur les sources de celui-ci et trouver le meurtrier que nous cherchions. Ceci après une rencontre entre cadres», indique Richard Dupuis lors de l'émission Policier criminel. «À son retour, Monsieur Roberge n'était pas content et nous avons eu une discussion orageuse. Il m'a bousculé et je l'ai fait déplacer», ajoute le commandant Dupuis.

Donc, si je comprends bien, en vrais braves, on a profité de l'absence de l'enquêteur pour travailler le dossier dans son dos. Ce faisant, ces cadres se foutaient éperdument de la vie d'un être humain. Richard Dupuis, sachant qu'il y aurait de la casse, s'est bien gardé de rencontrer l'homme seul à seul. Le mauvais coup était fait, et le sort de Roberge réglé.

Ce qui était reproché à Benoît Roberge : il ne faisait pas ses rapports correctement, rencontrait des sources seul et prenait beaucoup trop d'espace. Soit l'observation stricte des lois de Parkinson : Roberge ne suivait pas les directives à la lettre.

Ce qui tue le policier créatif, c'est toute cette administration gourmande de paperasse inutile.

Cette même direction a laissé en 2003 un meurtrier évadé, membre des Rock Machine, se promener librement pendant plus de cinq mois, armé jusqu'aux dents, vendant des stupéfiants pour l'organisation. La filature faisait de temps à autre quelques vérifications. Cette même direction a laissé un autre évadé mettre la vie de dizaines de citoyens en danger. Cette direction était derrière Benoît Roberge à l'époque, et personne ne pouvait prétendre de ne pas savoir.

Nos médiocres, qui malheureusement obtiennent des postes clés, se foutent éperdument d'écraser les autres. Surtout si ces autres font de l'ombre. Dans le monde des sources, un monde que 80 % des patrons ne connaissent pas, seuls les gars ayant une vision que je qualifie de «tordue» réussissent à trouver des super indics. Les autres font de super rapports pour masquer leur incompétence.

Ce qui tue le policier créatif, c'est toute cette administration gourmande de paperasse inutile. D'un suivi administratif à l'autre, les médiocres tentent de freiner leurs meilleurs enquêteurs. Il y a toujours un prix Nobel pour inventer une nouvelle formule qui s'ajoutera à celles existantes et des officiers cadres pour trouver l'idée formidable. Vous savez : la copie qui nous informe qu'il y a un rapport qui suit avec l'énumération des dix feuilles à venir et un titre pour être bien sûr d'avoir une feuille de plus. Comme si nous accompagnions des attardés mentaux.

Anecdote : de mon temps, nous devions remplir un rapport quotidien d'activités qui ne servait strictement à rien. Trois officiers supérieurs se sont mis en tête de l'exiger. Alors, j'ai photocopié un premier rapport dont j'ai fait une centaine de copies, et tous les jours je changeais la date. Rien à redire, tout le monde était heureux, ma copie allait rejoindre les centaines d'autres dans des cartables poussiéreux.

Plusieurs enquêteurs émérites ont goûté à cette médecine de pleutres. Ils n'ont pas trahi par la suite, mais ils sont demeurés amers. Être différent dans un monde comme celui-ci n'attire que des ennuis. Comme le disait un de mes officiers supérieurs : «J'aime mieux avoir des enquêteurs moyens qui ne créent pas de vagues qu'un enquêteur super à qui je dois toujours demander ce qu'il fait et où il va.»

Faire plaisir à ses patrons devient la norme, et tant pis pour le reste. Nous aurons la police que nous méritons.

Lois de Parkinson : «Plus une entreprise grandit, plus elle engage des gens médiocres et surpayés. Pourquoi? Tout simplement parce que les cadres en place veulent éviter la concurrence. La meilleure manière de ne pas avoir de rivaux dangereux consiste à engager des incompétents. La meilleure façon de supprimer en eux toute velléité de faire des vagues est de les surpayer. Ainsi, les castes dirigeantes se trouvent assurées d'une tranquillité permanente. A contrario, selon la loi de Parkinson tous ceux ayant des idées, des suggestions originales ou des envies d'améliorer les règles de la maison seront systématiquement éjectés. Ainsi, paradoxe moderne, plus l'entreprise sera grande, plus elle sera ancienne, plus elle entrera dans un processus de rejet de ses éléments dynamiques bon marché, pour les remplacer par des éléments archaïques onéreux. Et cela au nom de la tranquillité de la collectivité.» - Bernard Werber.

Je fais ici référence au projet Amigo : évadés de prison et liberté illégale ; tentative de meurtre de la rue Bernard ; achats et ventes d'armes, stupéfiants et autres sous supervision policière (documentation si nécessaire).

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