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Relations internationales sous Couillard: une peau de chagrin

Une ministre au poids politique ultraléger allait donner ce que l'on constate depuis qu'elle est en poste: un désastre.
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Les relations internationales du Québec sous Philippe Couillard ont connu un mauvais début. Les chancelleries étrangères prennent acte de l'importance que le domaine revêt par la qualité du ministre à qui il est confié. Ainsi, sous Jacques Parizeau, les relations internationales relevaient du vice-premier ministre Bermard Landry, rien de moins.

Philippe Couillard a confié les relations internationales à Christine St-Pierre. Madame St-Pierre était la seule ministre du gouvernement Charest à avoir appuyé l'ex-péquiste Raymond Bachand lors de la course au leadership du Parti libéral, que Philippe Couillard a remporté comme anticipé. À l'évidence, avec lui, les relations internationales du Québec allaient compter pour peu, très peu.

Une ministre au poids politique ultraléger allait donner ce que l'on constate depuis qu'elle est en poste: un désastre. Elle aurait pu se contenter de fonctionner sur le pilote automatique, puisqu'elle ne connaissait pas grand chose aux relations internationales. C'eût été trop simple. Elle a décidé de prendre des initiatives.

D'abord, celle de mener une charge tellement outrageusement partisane contre son prédécesseur, Jean-François Lisée, que le premier ministre l'a obligée à s'excuser publiquement. Beau début! Puis, tel un éléphant dans un magasin de porcelaine, elle a mis son talent à saper les relations que la France et le Québec ont mis un demi-siècle à forger à l'initiative, à l'origine, du gouvernement libéral de Jean Lesage.

Pendant ce temps, l'improvisation a marqué les missions du premier ministre à l'étranger: il a perdu la face devant le gouverneur de la province du Shandong, en Chine, sur la question du porc québécois; il est revenu du sommet économique de Davos les mains vides; sa «super-mission» d'une semaine à Paris avec une délégation de 6 ministres s'est soldée par le laconique «nous avons ouvert des portes» de Jacques Daoust, ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations et candidat de choix à une prochaine mutation; au Vatican, Philippe Couillard a dû faire le pied de grue à la place Saint-Pierre pendant deux heures pour un aparté de 45 secondes avec le pape; sa dernière mission, en Italie, était un copié-collé de la mission réalisée par Jean-François Lisée en décembre 2013.

D'un naturel optimiste, Philippe Couillard trouvera tout de même le moyen de réaffirmer l'importance de ses missions à l'étranger. «Il faut maintenir le rythme», a-t-il déclaré à la journaliste Jocelyne Richer, ajoutant que «la pire chose à faire, c'est d'avoir la chaise vide. Le monde est ouvert. La globalisation, ça existe. Le Québec doit être présent sur la scène internationale».

Et d'affirmer: «Jamais je vais faire reculer le Québec. Je veux que le Québec avance, notamment sur sa présence internationale.»

Pourtant, la réalité contredit ces propos.

Au cours de la dernière année, le gouvernement a présidé à un affaiblissement sans précédent de l'outil diplomatique québécois: fermetures de représentations, nominations ou remplacement de délégués à grands frais - et par des individus aux compétences moindres -, menaces de rétrogression du ministère des Relations internationales au rang de secrétariat, amputation de 25% de son budget - déjà famélique -, désengagement général alors que d'autres provinces canadiennes font le contraire, comme à Washington, liquidation de notre patrimoine immobilier à Londres, Bruxelles, Munich et Mexico sur «un faux prétexte d'efficacité diplomatique» et sans aucune garantie que cet argent sera reversé à l'activité internationale du Québec.

Quant à la relation France-Québec, elle n'a jamais été aussi mal en point. Le journaliste au quotidien Le Devoir, Christian Rioux, écrivait de Paris le 5 juin dernier que: «Malgré une sympathie toujours vivace, le Québec est lentement en train de disparaître de l'écran politique. La maladresse québécoise dans le dossier des droits de scolarité des étudiants français n'a fait que boucler la boucle».

À l'évidence, le gouvernement Couillard n'a pas su saisir l'occasion que présentait la visite du président François Hollande au Québec, en octobre dernier, pour donner une nouvelle impulsion à la relation franco-québécoise. Le manque de vision du gouvernement dans le dossier des droits de scolarité des étudiants français a eu des séquelles importantes, tout comme la mollesse affichée dans le dossier des nouveaux obstacles posés par Ottawa vis-à-vis des stagiaires-travailleurs français.

L'absence d'un bilan à la «super-mission France» du premier ministre témoigne de l'improvisation en matière de relations internationales. L'abandon pur et simple par le cabinet de la ministre St-Pierre, contre l'avis de son propre ministère, du soutien financier accordé à l'association quarantenaire Québec-France l'aura forcée à fermer ses portes. Aucune véritable tentative n'a été faite pour tenter de la sauver. Manifestement, les premiers ministres Couillard et Manuel Valls ont peu de choses à se dire, comme en témoigne la brièveté de leur entretien au mois de mai dernier à Paris: 15 minutes.

Il faut espérer que la banalisation des liens entre la France et le Québec ne soit pas fatale.

Redressement par la jeunesse

Comme il s'agissait, à l'époque, de construire l'avenir, c'est par la jeunesse que la coopération franco-québécoise a commencé. Cette jeunesse, française et québécoise, aura évidemment un rôle important à jouer pour «réparer ce qui a été cassé».

Le premier ministre Jacques Parizeau avait parfaitement saisi ce que pouvait, ce que devait être le rôle de la jeunesse. Dans un discours prononcé il y a 20 ans à l'Assemblée nationale française, il vantait l'importance d'une mobilité académique, professionnelle et (aussi) politique: «Il faut multiplier les initiatives pour réparer ce qui a été cassé. Il faut inventer de nouveaux moyens d'ascension. Depuis 1968, dans le cadre de notre coopération bilatérale, 70 000 jeunes au total ont profité de nos programmes d'échanges. Voilà qui est précieux pour l'apprentissage des jeunes. Voilà qui leur donne un avantage, leur ouvre l'esprit, complète leur formation. Sans se tarir, le flot de ces échanges s'est réduit ces dernières années. Nous allons non seulement le rétablir, mais l'intensifier et élargir son champ. Cette semaine, avec les responsables français, nous trouverons des moyens de relancer les échanges de jeunes étudiants et de jeunes travailleurs. Nous ferons en sorte aussi que les jeunes impliqués dans nos partis politiques puissent partager leurs découvertes de la chose publique et forger des amitiés qui, dans 15 ou 20 ans, quand certains seront devenus députés ou ministres, les conduiront peut-être à renouveler à leur tour la relation France-Québec».

OFQJ et CAP-FQ: deux outils qui devraient être protégés et renforcés

Monsieur Parizeau faisait une référence directe à un formidable outil de mobilité: l'Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ), dont le bilan a été dressé en ces termes par la première ministre Pauline Marois en mars 2013: «Au cours des 47 années de son existence, l'OFQJ s'est avéré un véritable pont au-dessus de l'Atlantique. Des dizaines de milliers de jeunes Québécois et de jeunes Français l'ont emprunté, apprenant à mieux connaître les réalités de part et d'autre de l'Atlantique. Ils ont ainsi élargi leurs horizons, enrichi leur société respective, bâti des entreprises, créé des emplois et, bien entendu, tissé des réseaux consolidant le caractère actuel et innovateur de cette relation unique.»

Un autre outil, moins connu, que monsieur Parizeau avait évoqué à la fin du discours, est le Comité d'action politique France-Québec (CAP-FQ). Sa mission principale est d'organiser des stages croisés au sein de cabinets ministériels et de partis politiques afin d'enrichir les futurs échanges entre décideurs politiques des deux côtés de l'Atlantique. En juin 2013, au lendemain de la Fête nationale du Québec, les deux gouvernements, par l'entremise des ministres Valérie Fourneyron et Jean-François Lisée, avaient annoncé un soutien financier renforcé au Comité - malgré les contextes budgétaires.

La brillante prestation des stagiaires québécois du CAP-FQ de cette année, en particulier Stéfanie Tougas et Alexandre Banville, offre un bel exemple de la manière dont la réparation des pots cassés passe par la jeunesse. Stagiaires au cabinet de la Garde des Sceaux et du Ministre délégué à la Réforme de l'État, respectivement, ils ont multiplié les initiatives afin de nouer des liens avec leurs homologues français et montré ainsi que la relation franco-québécoise à un avenir.

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