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Qu'est ce que l'épilepsie?

L'épilepsie constitue une activité primitive du cerveau, dont les mécanismes sont conservés à travers les espèces, de la mouche à l'Homme. C'est le désordre neurologique le plus fréquent après la migraine, touchant 1% de la population mondiale.
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BSIP/UIG via Getty Images

Des chercheurs de l'Institut de Neurosciences des Systèmes, Inserm U1106 - Aix Marseille Université, ont montré que les crises d'épilepsie constituent une activité primitive du cerveau dont les mécanismes sont conservés à travers les espèces, de la mouche à l'Homme. Cette activité est présente dans tout cerveau sain; la crise est codée dans nos réseaux de neurones, elle est toujours présente à l'état latent.

Géométriquement, une crise d'épilepsie est une spirale se déplaçant sur un cône. Les règles mathématiques régissant le début et la fin de la crise sont conservées à travers les espèces.

L'épilepsie est le désordre neurologique le plus fréquent après la migraine, elle touche 1% de la population mondiale. Elle est résistante à tout traitement dans 30% des cas. Mais qu'est-ce qu'une crise d'épilepsie? Cette question constitue une énigme pour les patients, leurs proches, les chercheurs et les médecins depuis des siècles. Parce que les crises arrivent souvent sans signe avant-coureur avec des manifestations cliniques qui peuvent être spectaculaires, comportant des manifestations comportementales effrayantes et parce que les mécanismes ne sont pas connus, l'épilepsie reste stigmatisée et associée à un fort sentiment de honte chez les patients et leur entourage.

Comme souvent, ce sont l'ignorance et la peur de l'inconnu qui créent le rejet.Pour les chercheurs et les médecins, la crise est considérée comme un problème très difficile à résoudre, faisant appel à des mécanismes très complexes. Ce préjugé vient aussi de notre ignorance des mécanismes.

Une percée majeure vient d'être faite par deux équipes de l'Institut de Neurosciences des Systèmes (INS) - Inserm U1106 à Marseille. Elle est publiée dans la revue Brain (Jirsa et al., On the nature of seizure dynamics, Brain, 2014), des travaux en partie financés par la Fondation Française pour la Recherche sur l'Épilepsie et la Fédération pour la Recherche sur le Cerveau. Combinant neuroscience théorique, recherche fondamentale et clinique, les chercheurs ont apporté la preuve que les principes qui régissent le début, le décours et la fin des crises d'épilepsie focales (une forme d'épilepsie très répandue) sont d'une très grande simplicité et invariantes entre les régions du cerveau et les espèces, de la mouche à l'Homme. Les chercheurs ont démontré qu'il existe un nombre limité de règles mathématiques qui régissent le début et la fin de la crise, permettant de classer rigoureusement les crises; une classification qui sera très utile aux cliniciens pour le traitement de ces crises.

Le point de départ est simple: tout cerveau sain peut faire une crise, par exemple après un électrochoc, un traumatisme crânien, etc. sans être et sans forcément devenir épileptique. Autrement dit, cette activité du cerveau qu'est la crise existe à l'état latent chez chacun d'entre nous.

Nous allons utiliser une métaphore pour décrire le résultat principal. Représentons-nous l'activité du cerveau au moyen d'un personnage qui se déplace dans un pays composé de montagnes, de vallées, de plaines, de plages, etc. Les différentes régions du pays constituent autant d'activités dans lesquelles le cerveau est engagé (par exemple, lire un livre, faire du vélo, etc.). Au sein de ce pays, il y a un endroit très particulier: un château avec une très haute muraille. Ce château est toujours là, il fait partie du paysage, mais notre personnage ne peut pas y pénétrer (la muraille est trop haute). Ce château, c'est la crise d'épilepsie. Il faut des conditions extrêmes pour rentrer dedans (on peut catapulter notre personnage pour le forcer à passer au-dessus de la muraille - comme, par exemple, après un électrochoc ou un traumatisme crânien sévère).

Les chercheurs de l'Institut de Neurosciences des Systèmes ont construit un modèle mathématique décrivant ce qui se passe à partir du moment où la muraille est franchie (début de la crise), jusqu'au moment où le personnage finit par ressortir du château (fin de la crise) et retrouver une activité normale à l'extérieur. Ils ont montré que les trajectoires d'entrée et de sortie de la crise suivent des règles mathématiques simples et précises. Ils ont aussi montré que la crise est peut être la forme d'activité la plus simple -ou primitive- que le cerveau peut générer.

Ils ont ensuite vérifié expérimentalement les prédictions du modèle. Ils ont pu ainsi montrer que les règles d'entrée et de sortie de la crise étaient invariantes de la mouche à l'Homme. C'est donc le même château qui est présent dans la plupart des régions du cerveau, à travers les espèces!

L'épilepsie n'a donc rien de magique. Elle n'a pas à être stigmatisée. La crise est naturellement codée dans nos neurones. Elle est toujours possible, mais dans un cerveau "sain", la probabilité qu'elle se produise est très faible.

Que se passe-t-il chez les patients qui font des crises?

Chez les patients, la muraille s'est effritée, et il est beaucoup plus facile de rentrer dans le château. Cette destruction de la muraille est un phénomène très courant. Elle se produit naturellement au cours du vieillissement, et c'est pour cette raison que la fréquence de l'épilepsie augmente avec l'âge. Les enfants sont aussi très susceptibles d'avoir des crises d'épilepsie, parce que leur muraille n'est pas assez haute.

De nombreuses pathologies, comme l'autisme, la maladie d'Alzheimer, la maladie de Huntington, sont associées à des crises d'épilepsie, parce que les effets destructeurs que ces pathologies engendrent dans le cerveau finissent par éroder la muraille.

C'est pour cette raison que l'épilepsie peut exister seule ou associée à d'autres pathologies. Les conditions pathologiques, la maladie, ne font que révéler une activité qui existe potentiellement en chacun de nous.

Pourquoi l'épilepsie est-elle si difficile à traiter?

Les chercheurs ont démontré que notre personnage peut entrer dans le château à de multiples endroits. Autrement dit, il y a de nombreuses façons d'effriter la muraille (la partie nord-est, sud-ouest, etc.). Cette multiplicité de possibilités explique pourquoi les traitements doivent être adaptés à chaque patient, parce que le passage de la muraille ne se fait pas forcément au même endroit d'un individu à l'autre.

Ces travaux revêtent une importance majeure, non seulement parce qu'ils contribuent à démythifier l'épilepsie, mais aussi parce qu'ils fournissent un cadre conceptuel pour mieux comprendre les mécanismes des crises et proposer de nouvelles solutions thérapeutiques.

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