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Le ministre Jean D'amour et Beauport 2020: poussière et politique ordinaire

Le port refuse de couvrir ses installations et de la poussière constituée de différents métaux lourds continue de se déposer dans Limoilou et les autres quartiers centraux de Québec.
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Mercredi dernier, dans Le Soleil, Simon Boivin rapportait qu'aux yeux du ministre délégué aux Affaires maritimes, Jean D'Amour, le bras de fer entre le ministre de l'Environnement, David Heurtel, et les autorités du Port de Québec sur le projet d'agrandissement Beauport 2020 appartenait au passé. Le ministre dit appuyer le projet d'agrandissement du port de vrac, mentionnant au passage les retombées économiques de ce projet pour la région de Québec et la bonne collaboration du pdg du Port, Mario Girard.

On pourrait penser, en lisant l'article, que le problème d'émission de poussière métallique venant du port est réglé. Or, rien n'est réglé: le port refuse de couvrir ses installations et de la poussière constituée de différents métaux lourds continue de se déposer dans Limoilou et les autres quartiers centraux de Québec. Le projet d'agrandissement du port semble contribuer à balayer sous le tapis la déficience des installations actuelles de transbordement de minerais. N'est-il pas troublant devant ces faits de constater que les autorités politiques et municipales militent ardemment auprès du fédéral pour que la subvention de 60 millions pour le projet soit maintenue coute que coute?

Depuis le début de cette controverse, les autorités en place (municipale, portuaire et gouvernementale) ont investi des efforts considérables pour atténuer la vivacité politique de la question. Les préoccupations exprimées par la population exposée aux poussières ont été banalisées. Les citoyens ont été infantilisés en étant par exemple qualifiés d'apprentis sorciers.

L'idée selon laquelle les savoirs citoyens sont issus de la manipulation de jouets pour enfants a été évoquée dans le cadre d'un comité plénier du conseil municipal lors duquel le port défendait son projet d'agrandissement. Par ailleurs, dans les trois dernières années, le maire de la ville a alterné entre des énoncés agressifs et bienveillants dont l'objectif avoué était de faire taire les citoyens. Enfin, et ce n'est pas anodin, les autorités ont fait - et continuent de faire - dans leurs déclarations publiques l'économie d'un aspect fondamental de cette controverse: les quelques gains obtenus à la faveur de la lutte citoyenne, dont le changement de norme de qualité de l'air relative au nickel, l'ont été au bénéfice de toute la société.

En effet, tout le monde gagne à ce que les résidents des quartiers centraux de Québec puissent vivre dans un environnement sain: les abords du port sont fréquentés par la population des banlieues, par les travailleurs du centre-ville et par nombre de touristes internationaux. Malheureusement, plutôt que de reconnaitre la pertinence des démarches citoyennes, le maire et le pdg du port ont plusieurs fois laissé entendre que les revendications citoyennes pour un milieu plus sain sont allées trop loin, au risque de nuire à l'essor économique de la ville et du port. C'est dans une telle perspective économico-normative que le ministre D'Amour inscrit son soutien au développement du port.

La vivacité sociale se donne aussi à voir lorsqu'on discute avec les gens des quartiers centraux de la ville. Un résident de Limoilou me disait récemment se sentir honteux de vivre dans un milieu soumis aux poussières métalliques, au point d'éviter de parler de la poussière avec sa famille et ses connaissances. Préoccupé par sa santé et celle de ses enfants, il disait ne pas oser assister aux assemblées citoyennes de crainte d'être identifié; travaillant dans le milieu de la construction, le port de Québec est un éventuel employeur. La conversation que nous avons eue sur la rue, par une journée ensoleillée, mais venteuse (un vent du port), m'a permis de comprendre que la vivacité sociale n'est pas toujours visible dans les médias ou dans les conversations sociopolitiques. Si certaines personnes ont des ressources (monétaires, temporelles, symboliques, etc.) suffisantes pour contribuer à la mise en évidence de l'odieux de la situation (ou pour déménager!), d'autres sont contraintes de s'anesthésier, de mettre en veilleuse leurs points de vue, voire de s'emmurer dans un sentiment de honte et de respirer l'air qui leur est offert.

Décidément, la situation est encore vive.

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Mai 2017

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