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Comment j'ai arrêté de mettre la pression à ma fille

C'est ainsi qu'elle sera capable d'être en joie et de faire rayonner le bonheur pour qu'il essaime dans le monde de demain.
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À partir du moment où nos enfants intègrent l'école, il est étonnant de constater à quel point ils se mettent à ressentir la pression que nous leur mettons inconsciemment (ou non...), persuadés que nous sommes qu'il en va de leur avenir et de leur réussite... Pourtant, jusque-là, nous n'avons jamais douté un seul instant qu'ils allaient apprendre de façon naturelle. Et quand ils ont commencé à vouloir marcher, nous ne leur avons pas laissé entendre un seul instant qu'ils n'y arriveraient jamais...

À partir du moment où ma fille a intégré l'école élémentaire, j'avoue bien volontiers m'être parfois laissée influencer par ce courant de pensée qui consiste à refuser le droit à l'erreur à son enfant ou du moins à ne pas toujours accepter son propre rythme d'apprentissage. Il semble régner aujourd'hui une telle pression sur l'école, que tout parent d'enfant intégrant la garderie projette sur lui toutes les angoisses liées à la peur de l'échec...

Il m'aura fallu découvrir les conférences et ouvrages d'un célèbre professeur d'université, pour que se déclenche en moi un véritable processus de transformation. Il s'agit de Sir Ken Robinson, qui dans son livre L'Élément, nous amène à retrouver la part de créativité qui existe en chacun de nous et que notre éducation s'est bien chargée d'occulter. Ses théories, en interrogeant le sens à donner à notre système éducatif, ont influencé positivement ma vision des choses. Elles m'ont obligée à remettre d'abord en question mon propre parcours.

Au niveau personnel, j'ai commencé par essayer de me remémorer quelle petite fille j'avais pu être et quelles avaient été mes activités préférées. Au début, les souvenirs tardaient à revenir, mais peu à peu, je me suis souvenue du plaisir que j'éprouvais à pratiquer la danse, la peinture, le dessin, la lecture, l'écriture... bref, tout ce qui faisait qu'à l'instant de pratiquer, j'étais en mesure de tout oublier, absorbée que j'étais par mes passions.

Puis je me suis interrogée sur le cheminement qui m'avait conduit à occulter la plupart de ces activités-plaisirs. Et là, j'avoue que l'école en a pris pour son grade: je découvris avec horreur que toute ma scolarité avait consisté à nier ce que j'étais au plus profond de moi. Toutes les choses que j'aimais et pour lesquelles le temps semblait s'arrêter avaient été étouffées par les injonctions premières de la société:

  • faire des études,
  • avoir un bon métier,
  • si possible rentrer dans la Fonction Publique afin d'avoir un emploi sûr
  • avoir une bonne retraite afin de pouvoir enfin profiter de la vie.

Edifiant n'est-ce-pas?

Ce n'est pas tant à l'école primaire qu'à partir du collège que les choses se sont vraiment gâtées et que la pression a vraiment démarré: je suis passée d'un enseignement basé sur l'affectif, l'écoute, la bienveillance (du moins c'est ce dont je me souviens...) à une structure éducative dans laquelle subitement, je ne me sentais plus protégée, aimée et considérée pour ce que j'étais mais uniquement pour les notes que j'obtenais. Ne parlons pas de la vie collective au sein des établissements: déjà à l'époque, il valait mieux faire preuve d'un fort caractère pour ne pas devenir une victime potentielle...

Bref, je passais mon temps à essayer de répondre à ce qu'on me demandait et j'oubliai complètement ce pourquoi j'aurais eu envie de me lever tous les matins... Et toute ma scolarité s'est poursuivie ainsi sans m'avoir vraiment révélé qui j'étais. Malgré la pression, je m'en suis néanmoins assez bien sortie parce que j'avais quelques facilités. Mais combien de mes camarades se sont-ils sentis dévalorisés, incompétents et démotivés, simplement parce qu'ils ne réussissaient pas dans les matières dites fondamentales?

En repensant à mon cheminement, je me suis aperçue que la première des peurs à laquelle nous sommes tous confrontés est celle d'être différent. Dans notre société il n'y a guère de place pour l'originalité, l'anti-conformisme, l'esprit créatif. Personne ne nous propose jamais de devenir nous-mêmes: ce que l'on nous demande c'est de nous intégrer dans la société. Et la pression démarre à partir du moment où nous ne nous sentons pas reconnus pour ce que nous sommes.

Mais de quelle société parlons-nous? Avec du recul, tout notre parcours tend uniquement à faire fonctionner un système basé sur la valeur de l'argent. On nous demande de consommer toujours plus, afin de faire fonctionner des entreprises qui veulent vendre toujours plus pour entretenir un sytème qui au final ne profite vraiment qu'à quelques uns.

Regardons où en est l'état du travail aujourd'hui:

Sommes-nous reconnus pour notre valeur?

Tout le monde réussit-il à trouver sa place parmi les humains?

Ne faisons-nous pas tous fausse route dans la pression que nous nous mettons pour remporter une course effrénée vers l'accumulation?

Posons-nous alors la question: que veut-on pour nos enfants? L'enfance n'est-elle pas ce moment de grâce privilégié dans lequel il nous faut être enveloppé d'amour et de bienveillance? Un enfant n'a-t-il pas besoin de se sentir rassuré, compris, entendu, aimé de façon inconditionnelle pour bien grandir? N'est-ce pas l'âge de tous les possibles, celui où l'imagination n'a pas de frontière?

Bien sûr qu'un enfant a besoin qu'on lui pose des limites et des interdits. Mais toujours dans le respect de ce qu'il est: on doit l'accompagner pour se construire et non pas pour entretenir une société qui nie la valeur intrinsèque de sa personne.

À partir du moment où je me suis mise à réaliser tout ce que je viens de vous dire, j'ai commencé alors à changer radicalement les rapports avec ma propre fille.

Aujourd'hui j'ai arrêté de lui mettre la moindre pression sur l'école tout en l'accompagnant lorsqu'elle en a besoin. Je savoure les échanges que nous avons sur tous les sujets de la vie. Je l'encourage à croire en ses rêves afin qu'elle s'épanouisse avant tout en tant que personne. Peu importe ce qu'elle réalisera dans la vie, pourvu qu'elle aime profondément ce qu'elle fait.

C'est ainsi qu'elle sera capable d'être en joie et de faire rayonner le bonheur pour qu'il essaime dans le monde de demain.

Ce billet est également publié sur le blog La Boîte à l'Être.

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