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Voir plus loin que le bout de mon nez?

En temps d'élections, les visages souriants de nos potentiels élus essaiment en ville, nous assurant qu'ils connaissent nos besoins, nous promettant de faire comme s'ils étaient "le peuple". Une fois le suffrage consommé et nos représentants intronisés (et jamais, ou presque, ceux pour qui j'ai voté... c'est peut-être pourquoi je m'en prends à eux, direz-vous... pas fou!), nous sommes très poliment conviés à continuer notre petite vie, jusqu'à ce qu'on nous invite à renouveler notre licence de citoyen.
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Ce billet est le premier d'une nouvelle série (publiée dans plusieurs blogues) dans laquelle je partagerai des réflexions, des rêves, des coups de gueule ou de coeur : "Plus loin que mon nez?". Pour que ce soit clair : je respecte le vrai et son contraire, pour autant que les oreilles soient grandes ouvertes...

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Quel est ce malaise qui m'envahit, constatant que des populations entières placent leurs aspirations dans ce que l'on appelle couramment "démocratie"?

Le savant omniscient Wikipédia commence ainsi son exposé : "La démocratie est le régime politique dans lequel le peuple est souverain" -- Lincoln ayant formulé la définition par excellence de ce concept comme « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». J'ai un peu de mal à percevoir ainsi le monde dans lequel je vis...

Du peuple? Oui, oui. Les gens acceptent de confier leur pouvoir à quelques personnes dont le but sera de veiller à ce que la volonté "du peuple" soit faite. On évoque des raisons essentiellement logistiques liées au nombre, ou au manque d'aptitude généralisée à comprendre le "macro". Le vote est de la sorte érigé en tant que geste suprême de participation citoyenne.

En temps d'élections, les visages souriants de nos potentiels élus essaiment en ville, nous assurant qu'ils connaissent nos besoins, nous promettant de faire comme s'ils étaient "le peuple". Une fois le suffrage consommé et nos représentants intronisés (et jamais, ou presque, ceux pour qui j'ai voté... c'est peut-être pourquoi je m'en prends à eux, direz-vous... pas fou!), nous sommes très poliment conviés à continuer notre petite vie, jusqu'à ce qu'on nous invite à renouveler notre licence de citoyen.

Entretemps, une sphère parallèle -- inaccessible à la grande majorité -- évolue avec ferveur, amalgamant de façon assez douteuse intérêts politiques et économiques. C'est pourtant là que se prennent la plupart des décisions nous concernant massivement... Je me prête au jeu du vote, hélas un peu serrée entre l'écorce d'une démocratie représentative qui semble s'éloigner du "peuple", et la dangereuse épée de l'abstentionnisme. Y aurait-il d'autres issues? Constatant la force des mobilisations populaires un peu partout l'année dernière (et bien avant), j'ai espoir en la créativité du "peuple". Il semblerait qu'il est possible de voir plus loin que le bout de son nez.

Par et pour le peuple? Laissez-moi, encore une fois, exprimer mon doute. Les populations en Europe et ailleurs se font imposer par leurs dirigeants des plans d'austérité visant non pas à assurer le bien être du "peuple", mais plutôt à rassurer des machines appelées "marchés" (j'ai d'ailleurs une étrange sensation de déjà-vu, pensant aux plans d'ajustement structurels imposés sans grands résultats en Amérique Latine dans les années 90 par le FMI et la Banque Mondiale...). Des dictateurs africains continuent de se faire élire démocratiquement avec 98% des voix, avec l'aval implicite de grandes entreprises étrangères. La France risque de proposer à ses citoyens de choisir démocratiquement entre Sarkozy et Le Pen. Partout, les candidats aux présidentielles dépensent des quantités faramineuses pour se faire élire. Le gouvernement étatsunien avance des milliards pour renflouer les caisses non pas des gens du "peuple", mais des banques. La rue et les médias de masse sont complètement accaparés par les grandes corporations qui ont l'argent pour payer la libre expression des plus brillants publicitaires. La liberté "démocratique" qu'offre internet se voit déjà capitalisée par des multinationales, qui mettent un prix à des contributions gratuites comme celle que je propose ici... Qui détient réellement le pouvoir dans les "démocraties" actuelles? Quels intérêts sont servis en leur sein? Quelles libertés avons-nous réellement? N'est-il pas temps de questionner ouvertement et massivement les "démocraties" contemporaines?

Je le crois, vous l'aurez compris. Non pas pour trouver une victime et un coupable, mais pour s'ouvrir à la complexité, pour dépasser les paradoxes qui nous maintiennent inactifs, pour sortir de l'inertie dans laquelle nous plongent trop souvent nos "démocraties".

Ce ne sera probablement pas une confidence: je persiste aussi à rêver de l'utopie qui transparaît de l'idéal démocratique (même si le terme me semble bien lourdement chargé de son présent et son passé), peut-être parce que je le vis déjà un peu. C'est au nom de cet idéal que je peux être jeune, femme, etc., et exprimer librement mes pensées... ce qui me donne une énorme responsabilité d'apprendre, de questionner. J'ose souhaiter que l'hégémonie du modèle néo-liberal -- où s'enracinent les "démocraties" contemporaines -- soit remplacée par une pluralité de systèmes plus respectueux de l'humain et de la nature.

En attendant -- tout comme bien des gens qui se sont soulevés à la Place Tahrir, à la Plaza del Sol, à Zuccotti Park ou au Square Victoria -- j'ai envie de prendre le temps de poser des questions avant de songer à formuler des réponses.

À la revoyure!

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Note : ce texte témoigne de mes réflexions présentes, qui évolueront je l'espère avec le temps. Merci d'avance de vos commentaires critiques !

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