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Condamner ou ne pas condamner l'État islamique?

Je crois qu'il est important de condamner fermement ces actes terroristes, quels qu'en soient les commanditaires, sans que cela signifie qu'il faille s'en justifier ni s'en excuser.
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Avec les atrocités commises par le prétendu «État islamique» (ÉI), un important débat est tenu, sur les réseaux sociaux, entre les musulmans d'un peu partout dans le monde quant à la nécessité ou non de dénoncer ces crimes en tant que musulmans. Pour ma part, je crois qu'il est important de condamner fermement ces actes terroristes, quels qu'en soient les commanditaires, sans que cela signifie qu'il faille s'en justifier ni s'en excuser. Nous sommes souvent, en tant que musulmans (mais aussi en tant qu'être humains soucieux de justice) très «soulagés» et intéressés d'entendre des Juifs du monde entier se distancier de l'État d'Israël et de ses crimes de guerre contre la Palestine; il peut donc en être de même pour les non-musulmans qui souhaitent que des musulmans aussi expriment leur indignation face aux massacres commis par le prétendu ÉI.

De plus, la différence entre ce dernier et les autres groupes terroristes musulmans est que l'ÉI interpelle directement tous les musulmans du monde à «tuer les infidèles», en plus d'avoir la prétention de vouloir instaurer un califat auquel tous les musulmans «devront» prêter allégeance. Il peut donc être compréhensible de voir certains adeptes de l'islam lui répondre «Non merci!» ou «Pas en mon nom!» afin de lui signifier clairement qu'ils ne lui reconnaissent aucune légitimité - ni en tant qu'État ni comme un groupe reflétant une approche islamique.

D'un autre côté, condamner au nom des valeurs islamiques et humanistes ne signifie aucunement devoir «demander pardon». Et c'est particulièrement ceci qui fait réagir plusieurs musulmans qui refusent que 1,5 milliard de personnes dans le monde soient tenues responsables par certains (et doivent donc s'excuser) des actes commis par une minorité terroriste très «bruyante», même si celle-ci agit soi-disant «au nom de l'islam». Peut-on demander à tous les hommes de condamner publiquement chaque agression commise par un homme, au nom de son identité masculine, à l'égard d'une femme ou d'un enfant, ici et ailleurs? Car le principe derrière tous les appels aux «musulmans modérés» lancés dans les médias semble bien être que chaque personne dans le monde doit condamner publiquement tout acte qu'une autre personne (ou groupe) commet au nom de la caractéristique identitaire commune.

De plus, en sommant «les» musulmans de condamner publiquement les terroristes, on semble presque oublier que de façon générale, le fait de manifester et de dénoncer publiquement implique d'avoir une certaine conscience sociale et un sens de l'engagement. Or, même dans la population générale des pays occidentaux, ces deux caractéristiques ne se trouvent pas nécessairement chez la majorité des citoyens. Tout le monde n'a pas «l'habitude» ou l'intérêt de sortir dans la rue dénoncer les injustices sociales ou politiques (aussi inacceptables qu'elles puissent être) qui sévissent dans leur pays ou ailleurs. Il serait souhaitable qu'il en soit le contraire, mais la réalité est malheureusement toute autre.

Devant la complexité de la situation géopolitique, et la polarisation des opinions que cela entraîne, une posture plus globale s'impose. On ne peut condamner les actes des terroristes musulmans sans dénoncer du même coup les politiques impérialistes étatsuniennes, françaises et anglaises, et leurs alliances stratégiques avec les pétromonarchies. Plusieurs experts politiques s'entendent pour dire que ce sont justement les actions militaires des États-Unis et de leurs alliés, menées au cours des dernières décennies dans le Moyen-Orient, et le financement des groupes radicaux par des États du Golfe, qui ont contribué à façonner le monstre terroriste à plusieurs têtes. Par conséquent, il est impératif de parler de toutes les causes du problème du terrorisme et non juste de ses conséquences visibles.

Enfin, nous devons toutes et tous, d'abord en tant qu'humains, nous distancier des actions des terroristes (qu'elles soient commises par des «religieux» ou par des États soi-disant démocratiques), car l'histoire nous a bien appris que l'humain n'a surtout pas besoin de religion pour tremper ses mains dans le sang.

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