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Messieurs les Anglais, vous avez tiré les premiers

Est-ce la fin d'un monde connu ? Personne n'y croyait vraiment à ce Brexit, malgré les alarmes, et pourtant c'est arrivé. Cela fait 43 ans que nous vivions avec elle, beaucoup d'entre nous n'ont jamais connu l'Europe sans la Grande Bretagne. Alors, en vrac quelques réactions émotionnelles, non pas sur l'économie de l'Union qu'on va analyser en abondance, mais sur ce "farewell" qui - ne nous rassurons pas à bon compte - n'est pas un au revoir mais un adieu.
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Est-ce la fin d'un monde connu ?

Personne n'y croyait vraiment à ce Brexit, malgré les alarmes, et pourtant c'est arrivé. Cela fait 43 ans que nous vivions avec elle, beaucoup d'entre nous n'ont jamais connu l'Europe sans la Grande Bretagne. Alors, en vrac quelques réactions émotionnelles, non pas sur l'économie de l'Union qu'on va analyser en abondance, mais sur ce "farewell" qui - ne nous rassurons pas à bon compte - n'est pas un au revoir mais un adieu.

- Une pensée d'abord pour nos amis britanniques. Car ils restent nos amis, auxquels nos pères et grands-pères doivent beaucoup dans les heures plus que sombres du XXème siècle. S'il vaut mieux oublier Chamberlain, Winston Churchill - un bien lointain prédécesseur de David Cameron ! - est un héros européen dont le courage, la clairvoyance, la détermination nous ont sauvés du cauchemar.

- Une pensée bien sûr pour les jeunes britanniques, qui, comme tous les jeunes du monde, rêvaient d'espace, de circulation libre, de l'absence de visas, et qui votaient pour le maintien dans l'Europe à 75%. C'est la défaite de la jeunesse, la défaite de ceux qui refusaient un repli identitaire sur une petite Angleterre, coupée de l'Irlande, de l'Ecosse, farouchement européennes ; la défaite de l'ouverture, du grand large, de ceux qui n'ont pas peur. Et c'est la victoire des mensonges populistes déversés à profusion, sur l'invasion étrangère, sur une fantasmatique adhésion de la Turquie à l'Union Européenne, sur une "indépendance" que le Royaume Uni aurait perdu... Quel délire !

- Une pensée ensuite pour ceux qui ont cru les marchands d'illusions. Comme le dit avec justesse Pervenche Bérès, députée européenne dans nos colonnes du Huff ce matin, "c'est l'Union Européenne qui permet à ses Etats membres de mieux faire entendre leur voix dans le monde actuel". C'est elle qui peut résister aux empires chinois ou américains, faire face aux enjeux de défense, au terrorisme, aux délocalisations. Quelle faiblesse sera la nôtre, si nous remplaçons un monde multipolaire, certes, mais construit sur des blocs à peu près égaux, par une fragmentation de nations incapables de résister à tous ceux qui veulent voir l'Europe se disloquer ?

- Et donc une pensée enfin pour un rêve qui s'envole. L'Europe s'est construite sans les Anglais et peut se poursuivre sans eux. Mais le poison est entré dans les esprits. Puisqu'on peut sortir, sortons, c'est simple comme un coup de vote ! Et la contagion que beaucoup redoutent, pointe son nez. Nexit, Frexit, on voit venir les démolisseurs qui exultent, ceux qui plaident pour des pays étriqués. On ne savait pas Marine Le Pen si anglophile au point d'arborer l'Union Jack sur son compte Twitter. Les ancêtres du Front National, ses prédécesseurs au sein de l'extrême droite française ne l'étaient pas, c'est le moins qu'on puisse dire. Les mânes de Jeanne d'Arc doivent en être tout émus...

- Face à tous ceux qui vont nous dire que ce n'est pas si dramatique que cela, il faut leur dire que si, c'est grave. Qu'il faut agir vite. Lundi François Hollande et Angela Merkel vont se voir : pourquoi pas aujourd'hui, pas ce week end ? Quand un Président français est élu, c'est le lendemain qu'il part à Berlin assurer son homologue allemand que rien ne changera dans sa politique. L'heure n'est plus aux discours, mais aux décisions : mettre enfin en place un Parlement de la zone euro et un gouvernement économique. Harmoniser les protections sociales et fiscales, démocratiser cette Europe qui, telle quelle, est trop loin des peuples. Nous avons besoin de signes qui montrent que l'Europe se réveille, pas de paroles rassurantes, lénifiantes, et que chacun retourne à ses préoccupations nationales. L'Allemagne et la France ont des échéances politiques en 2017. Ce n'est pas le moment de se livrer aux petits calculs et aux maigres ambitions. Les leaders de demain seront ceux qui pourront proposer une vision pour l'Europe. Sinon, Messieurs les Anglais vous aurez vraiment tiré les premiers.

Voir aussi :

Brexit / Référendum en Grande-Bretagne

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