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Le radon fait deux fois plus de victimes que les routes

Tueur méconnu, deuxième cause du cancer du poumon, après le tabagisme, et première chez les non-fumeurs, le radon cause 16 % des décès par cancer du poumon, selon Santé Canada. Et ce gaz radioactif souterrain qui s'infiltre dans les maisons fait même deux fois plus de victimes au Québec que les accidents de la route - qui sont pourtant combattus bien plus vigoureusement.
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Une maison québécoise sur 10 est à risque, selon Santé Canada qui est accusé de négligence. Tueur méconnu, deuxième cause du cancer du poumon, après le tabagisme, et première chez les non-fumeurs, le radon cause 16 % des décès par cancer du poumon, selon Santé Canada. Et ce gaz radioactif souterrain qui s'infiltre dans les maisons fait même deux fois plus de victimes au Québec que les accidents de la route - qui sont pourtant combattus bien plus vigoureusement.

Chaque maison doit être testée

Le radon est un gaz inodore et incolore créé par la désintégration naturelle de l'uranium contenu dans les sols, les roches et l'eau. Il se fragmente en particules alpha qui se fixent aux poussières que l'on respire, ce qui expose les poumons et cause le cancer après des décennies de surexposition.

Santé Canada recommande de tester sa concentration dans chaque maison à l'étage le plus habité durant trois mois en hiver (un test coûte moins de 100 $). La teneur en radon dans l'air intérieur varie grandement d'une maison voisine à l'autre et il est impossible de la prévoir avant de construire. Lorsque nécessaire, réduire l'infiltration de ce gaz coûte environ 2 500 $ en rénovations. Pour sa part, le Code de construction du Québec impose des mesures préventives minimales coûtant moins de 100 $ dans les maisons neuves, selon André Gagné, directeur technique de l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec.

Des études récentes ont incité Santé Canada à réévaluer, en 2012, son estimé selon lequel le radon causait 10 % des cancers du poumon. « Cette réévaluation estime qu'environ 3 200 ou 16 % des décès par cancer du poumon surviennent chaque année au Canada en raison d'une exposition au radon », explique Sara O'Dacre, relationniste au ministère fédéral.

Quelque 8 100 Québécois ont reçu un diagnostic de cancer du poumon l'année dernière et 6 200 personnes en mourront, selon le rapport sur le cancer de 2012. D'après l'estimation de Santé Canada, le radon tuera donc environ 992 Québécois (16 % de 6 200) par année - et non 600 comme le ministère l'estimait en 2010. En comparaison, 436 personnes sont mortes sur les routes du Québec en 2012, selon la Société d'assurance automobile du Québec (SAAQ). Aucune dose de radon n'est sans danger et il est impossible de réduire l'exposition complètement. Mais si toutes les maisons qui dépassent la recommandation canadienne étaient assainies, « 927 des 3 261 cancers du poumon induits par le radon annuellement au Canada pourraient être évités », affirme Mme O'Dacre.

Santé Canada aurait compromis la santé publique

Depuis la fin des années 1980, le gouvernement américain informe le public sur les dangers du radon dans des publicités télévisées et des États comme la Floride imposent un test de radon dans divers bâtiments. Mais au Canada, on en entend beaucoup parler depuis seulement 2007. C'est alors que Santé Canada, abaissait, de 800 à 200 becquerels par mètre cube (Bq/m3) d'air, la concentration de radon à ne pas dépasser dans les aires habitées plus de quatre heures par jour.

Les Américains ont été plus proactifs : dès 1992, ils ont fixé leur seuil de tolérance à 4 picocuries par litre, l'équivalent de 150 Bq/m3. En 2010 et 2011, Santé Canada a mesuré le radon dans 14 000 habitations à travers le pays. Résultat : 10,1 % des maisons québécoises - contre 7 % en moyenne au pays - excédaient la directive nationale. À l'automne 2011, 29 % des 891 membres de CAA-Québec sondés par cet organisme ignoraient les dangers du radon et seulement 6 % avaient déjà mesuré sa concentration dans leur maison.

Santé Canada a compromis la santé des Canadiens dans ce dossier, accuse l'ingénieur Jim White, ancien chercheur principal à la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL). Selon lui, le ministère a succombé aux pressions des associations de constructeurs, particulièrement celle de l'Ontario, qui craignaient que les maisons neuves deviennent inabordables si la limite de concentration sur le radon était abaissée. « Santé Canada a résisté aussi longtemps que possible à la réduction de sa limite, même si de simples calculs suggéraient que le radon était un risque significatif pour la santé, en particulier pour les fumeurs. »

« C'est tout à fait faux, rétorque Sara O'Dacre. Santé Canada n'a pas été négligent ou résistant à la mise à jour de la directive sur le radon au Canada. La ligne directrice précédente de 800 Bq/m³, établie en 1988, était fondée sur des estimations de risques de cancer du poumon provenant d'études sur des mineurs de fond d'uranium exposés à des concentrations très élevées de radon. Des incertitudes existaient quant à la projection du risque de cancer du poumon attribué à l'exposition au radon résidentiel établie à partir de l'exposition professionnelle au radon. »

Les Québécois très concernés

La combinaison du radon et du tabagisme multiplie le risque de cancer du poumon par six. Un non-fumeur sur 20 exposés de façon prolongée à 200 Bq/m3 de radon contractera cette maladie, mais elle touchera un fumeur surexposé sur trois, selon Santé Canada. Le Québec affiche un des taux de tabagisme les plus élevés au pays, soit de 24 % en 2012 selon Statistique Canada. Les taux d'incidence les plus élevés du cancer du poumon sont de 83 cas (contre 62 en moyenne au pays) par 100 000 hommes et 60 (contre 49) par 100 000 femmes, en 2012. À peine 13 % des hommes et 19 % des femmes atteints par cette maladie vivent encore cinq ans après avoir reçu ce diagnostic.

Devrait-on s'inspirer des campagnes percutantes de la SAAQ et des lois plus strictes qui ont contribué à réduire les décès de la route de 80 % depuis 1973? « Bon an, mal an, la SAAQ investit 5 millions $ dans les campagnes publicitaires sur la sécurité routière », selon la porte-parole Audrey Chaput. À Santé Canada, Sara O'Dacre affirme qu'entre 500 000 et un million de dollars sont consacrés annuellement à la sensibilisation et à l'éducation au radon.

Pour en savoir davantage sur le radon, consultez le site maisonsaine.ca.

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