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Zunera Ishaq, le Canada et le niqab

Dans une société qui dénonce à l'envi la culture du viol, un étendard pornographique aussi archaïque et avilissant que le niqab, vecteur d'une idéologie fasciste, ne mériterait aucun débat
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Si le niqab était promu par des intégristes catholiques, l'immense majorité des progressistes et des féministes l'auraient condamné. Beaucoup de ceux qui se montrent intraitables avec la violence machiste orchestrée par des mâles blancs de culture chrétienne, qui font le plus souvent l'objet d'une condamnation immédiate et unanime, se font beaucoup plus discrets, nuancés et compréhensifs quand il s'agit de citoyens de culture islamique.

Dans une société qui dénonce à l'envi la culture du viol, un étendard pornographique aussi archaïque et avilissant que le niqab, vecteur d'une idéologie fasciste, qui met en scène de manière aussi caricaturale l'infériorité du sexe féminin, ne mériterait aucun débat universitaire ou politique digne de ce nom.

Le relativisme culturel s'est tellement propagé en Amérique du Nord que des femmes peuvent désormais prêter serment le visage dissimulé.

Une telle exaltation de l'obscurantisme religieux ne revient-elle pas à gifler ces millions de femmes qui, dans les pays du Moyen et du Proche-Orient, du Maghreb, d'Afrique et d'Asie luttent au péril de leurs vies pour s'en affranchir? Pire, elle alimente l'amalgame mortifère qui consiste à ne plus distinguer, chez les musulmans, les démocrates laïques des intégristes réactionnaires.

Alors qu'un islam politique, impérialiste et totalitaire ne cesse de croitre à l'échelle du monde, beaucoup de progressistes et de féministes ont rendu le climat social encore plus malsain à travers des prises de position contre-nature vis-à-vis des principes et des idéaux dont ils se réclament. Quand celles et ceux qui sont supposés défendre l'idée de progrès, la justice sociale, l'égalité entre les peuples et entre les sexes, l'instruction, la culture et l'émancipation du plus grand nombre s'accommodent volontiers du sectarisme religieux, défendent le voilement des cheveux, du corps et du visage d'une partie de la population, procèdent à une dénonciation à géométrie variable du patriarcat et renoncent à promouvoir la laïcité, il est légitime et nécessaire de s'interroger sur la crédibilité et la nature de cette «gauche».

Quand des progressistes n'osent pas dénoncer le niqab en tant qu'il véhicule une idéologie sectaire d'extrême droite, ou quand des féministes qui traquent la moindre plaisanterie machiste et dénoncent quotidiennement (et à juste titre) les résidus patriarcaux à l'œuvre dans la société, mais sont incapables du moindre examen probant vis-à-vis d'une telle aberration démocratique, il ne faut pas s'étonner que le progressisme et le féminisme soient l'objet d'un désamour grandissant et de critiques virulentes.

Comme l'a écrit Fethi Benslama dans sa Déclaration d'insoumission à l'usage des musulmans et de ceux qui ne le sont pas (Flammarion, 2005), «si la logique du patriarcat gouverne l'islam à l'instar d'autres civilisations, elle revêt néanmoins, dans son système, des caractéristiques qui la rendent plus virulente, plus cruelle, plus difficile à ébranler [...] L'inégalité instituée, le ravalement légitimé des femmes par la loi théologique sont des faits patents». Et le psychanalyste d'ajouter que «l'islamisme radical a trouvé à travers le voile le moyen retors de faire revenir la honte du corps féminin dans l'espace public».

Pourquoi vouloir débusquer la moindre inégalité et se taire face à la plus spectaculaire d'entre elles? Pourquoi livrer les citoyens de culture ou de confession musulmane, vivant en conformité avec les mœurs des pays qui les ont accueillis, aux intégristes les plus réactionnaires faisant primer les lois de la charia sur toute autre considération? Pourquoi se taire sur le fanatisme islamique alors qu'il n'a jamais été aussi présent, aussi conquérant et aussi meurtrier à l'échelle du monde?

Pourquoi des féministes célèbrent-elles chaque année la mémoire des disparues de la tuerie de l'École polytechnique de Montréal, et se taisent sur le despotisme ordinaire qui est à l'œuvre à travers le voile islamique? Faudra-t-il que des islamistes promènent leurs femmes en laisse pour que les hommes politiques réagissent?

Ne pas dénoncer cette idéologie d'extrême droite qui travaille en profondeur les démocraties occidentales, comme s'y refuse pour des raisons obscures une large part de la gauche intellectuelle et politique, est une véritable trahison. Car aujourd'hui, force est de constater que nombre de progressistes et de féministes ne combattent plus l'intégrisme religieux. Ils ne font que l'accompagner, voire l'encourager.

Rien n'est plus absurde et criminel qu'une tolérance aveugle à l'égard des intégrismes religieux, quels qu'ils soient. L'affaire Zunera Ishaq n'a rien d'anecdotique. La pluralité religieuse inhérente à toute démocratie ne saurait inclure ce qui s'apparente, quoi qu'on en dise, à des sectes.

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