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Décortiquer le «privé» en santé

Il y a plusieurs façons pour le privé de venir en appui au système public unidimensionnel actuel. Ainsi, le privé peut s'impliquer dans la propriété ou dans la gestion d'hôpitaux en conservant la gratuité pour le patient.
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J'ai participé récemment à un débat télévisé sur la question suivante: devrait-il y avoir plus de privé en santé ou moins de privé en santé au Québec?

Le débat a démontré qu'il existe une confusion, savamment entretenue par les tenants du public-à-tout-prix, sur la signification véritable de privé en santé. Je tenterai ici de la dissiper en me concentrant sur les soins fournis à l'hôpital.

Le modèle mur-à-mur actuel

Actuellement, nos hôpitaux fonctionnent sur un modèle unique. C'est le modèle hôpital gouvernemental. Tous les hôpitaux appartiennent au gouvernement. L'argent pour opérer les hôpitaux vient du gouvernement et les employés sont, indirectement, des employés de l'État même s'ils ne sont pas des fonctionnaires. Les patients bénéficient de la gratuité puisque les soins sont payés par le gouvernement.

D'autres choix pour les patients

Je propose d'offrir d'autres choix de modèles aux patients.

Le deuxième modèle qui pourrait être introduit au Québec est celui qui s'appelle hôpital en gestion privée : les immeubles hospitaliers appartiennent toujours au gouvernement, les patients bénéficient toujours de la gratuité des soins, mais la gestion de l'hôpital est confiée au secteur privé suite à un appel d'offres. L'exploitant privé paiera les salaires des employés et gérera les soins. Il sera rémunéré par l'État selon une formule de paiement par activité (discutée ci-dessous). Si l'hôpital est propriétaire de l'immeuble, c'est un autre modèle qu'on peut appeler hôpital en propriété et gestion privée.

Enfin, un quatrième modèle, appelé hôpital privé-privé, prévoit que les hôpitaux appartiennent au privé. Ils sont gérés par le privé et les employés sont payés par le privé. Dans ce modèle, le patient doit débourser pour se faire soigner. C'est le seul modèle où l'État ne paie pas pour les soins.

Prérequis

Pour que le modèle privé-privé puisse fonctionner, il faut donner aux patients le droit de souscrire à une assurance privée pour couvrir les frais des soins obtenus. Tout en continuant à payer ses impôts pour financer les autres modèles où les soins sont payés par l'État, le Québécois moyen aura alors une vraie alternative pour se payer, pour lui et sa famille, des soins dans le privé-privé. La loi prohibe actuellement une telle assurance.

Il faut aussi donner aux médecins le droit de travailler là où ils le veulent. Ainsi, après avoir offert une prestation minimum dans les systèmes où l'État paie pour les soins (hôpital gouvernemental, hôpital en gestion privée et hôpital en propriété et gestion privée), les médecins pourraient offrir du temps additionnel dans l'hôpital privé-privé (ce qui n'est pas permis sous la loi actuelle). C'est ce qu'on appelle la mixité de la pratique médicale.

Contrairement à l'opinion reçue, il y a des ressources disponibles inutilisées qui peuvent desservir le volet privé-privé sans affecter les autres modèles. On estimait en 2008 que plus de la moitié (51%) des médecins spécialistes étaient prêts à travailler 4 heures par semaine dans le modèle privé-privé, soit l'équivalent de 790 médecins spécialistes les jours de semaine. De la même façon, 54% des infirmières se montrent ouvertes à travailler pendant les jours de semaine dans un tel modèle en supplément à leur tâche habituelle. Cela correspond à l'embauche de plus de 3 730 infirmières en équivalent plein temps de jour.

Le paiement par activité

Quand l'État paie pour les soins, je propose d'adopter le paiement par activité, comme on le fait en Angleterre ou en Scandinavie. Actuellement, dans le modèle hôpital gouvernemental que nous connaissons au Québec, l'État octroie annuellement à chaque hôpital un budget basé sur des raisons historiques, peu importe qu'il performe bien ou non, que les patients soient bien soignés ou non, qu'ils attendent 1 heure ou 17 heures à l'urgence, que les chambres soient propres ou sales. L'hôpital n'est pas récompensé s'il est bon ou pénalisé s'il est mauvais.

Si on paie par activité, l'argent suivra le patient et les hôpitaux seront incités à accroître leurs activités afin de soigner davantage de patients. Cette formule encouragera en outre les hôpitaux à réduire les coûts inutiles et la durée de séjour, libérant ainsi des ressources pour traiter davantage de patients. La croissance de l'activité qui découle d'une telle approche signifie aussi que les patients seront traités plus rapidement, ce qui améliorera d'autant l'accès aux soins de santé pour ceux sur les listes d'attente.

Le financement à l'activité mène-t-il les établissements de santé à rogner sur la qualité des services afin de réduire les coûts? Bien au contraire. Dans la mesure où les revenus des établissements dépendent du nombre de patients qu'ils attirent, il devient impératif pour eux d'offrir des services de qualité et de préserver une bonne réputation.

Pour éviter que l'État n'ait à payer pour des services non nécessaires, la facturation de l'hôpital sera auditée régulièrement. De plus, les soins prodigués par les hôpitaux seront garantis pendant une certaine période de temps de sorte que si un mauvais traitement nécessite une nouvelle visite à l'hôpital, celle-ci sera au frais de l'hôpital et non de l'État.

Conclusion

Il y a donc plusieurs façons pour le privé de venir en appui au système public unidimensionnel actuel. Ainsi, le privé peut s'impliquer dans la propriété ou dans la gestion d'hôpitaux en conservant la gratuité pour le patient. S'il est payé à l'activité, il aura tout intérêt à faire plus avec moins. De plus, le privé offre une alternative aux patients qui le désirent de payer pour les soins de leur famille. Dans un tel cas, les assurances privées peuvent fournir du financement à ces patients pour qu'ils puissent s'offrir à coût raisonnable le modèle privé-privé.

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