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Au repère des Barr Brothers

Le groupe lance vendredi son tout nouvel album «Queens of the Breakers».
Richmond Lam

Dans une arrière-cour d'un duplex situé aux confins de Parc-Extension et du Mile-Ex : une petite table, quatre chaises et un seau contenant quelques cannettes d'eau pétillante aromatisée aux agrumes. Au milieu du décor, les frères Brad et Andrew. La raison de notre rencontre est fort simple : le groupe montréalais The Barr Brothers propose un troisième long jeu fastueux titré Queens of the Breakers.

Inspirés par les jours anciens des deux frangins américains (âgés de 40 et 42 ans), l'album est en quelque sorte un voyage dans leur jeunesse. C'est aussi un trip d'harmonies vocales soignées (Song That I Heard), de douces mélodies folk (Look Before It Changes) et d'arrangements rock rugueux (It Came To Me).

«Nous sommes allés au Wild Studio à Saint-Zénon pour créer l'album», affirme d'entrée de jeu Andrew avant que son frère ajoute que cet endroit a été synonyme de retraite paisible. «Le bâtiment est beau et la nature qui l'entoure est magnifique. Nous pouvions pêcher... S'éloigner de la ville et de nos responsabilités était une nécessité après les deux années de tournée associées à l'album Sleeping Operator (2014).»

«Sarah (Pagé, complète le groupe officiel) était aussi avec nous au studio. L'idée était d'expérimenter, de s'étendre et peut-être de faire des découvertes. Nous sommes allés à Saint-Zénon à deux reprises, en novembre 2015 et en février 2016.» Aux dires d'Andrew, le batteur, la moitié des chansons (Look Before It Changes, Maybe Someday, Queens of the Breakers, Hideous Glorious, You Would have To Lose Your Mind) du nouvel opus sont nées durant des sessions d'improvisation. Le reste s'est imbriqué par la suite aux textes et aux fragments musicaux composés par Brad, qui est également le chanteur et guitariste du groupe.

Le trio a également composé ou fignolé des pièces dans leur studio situé au coin de l'avenue du Parc et de la rue Villeneuve, à Montréal. «Le morceau Kompromat, par exemple, était au départ une proposition de 45 minutes. Nous l'avons réduit à son format final dans notre studio de Montréal. Pour l'enregistrer, nous sommes allés au Studio Mixart, à l'hiver dernier.»

L'enfance américaine

Questionné quant à la signification du titre de l'album, Brad raconte qu'elle prend sa source dans son enfance vécue au Rhode Island, aux États-Unis. «C'était d'abord le titre qui accompagnait une chanson du disque, qui évoque une période de ma jeunesse. The Breakers est un manoir situé à Newport, construit au XIXe siècle par la famille Vanderbilt, l'une des plus riches de l'époque en Amérique. Aujourd'hui, c'est un musée très populaire.

«Six amis et moi avions l'habitude de faire des choses assez étranges à l'adolescence, y compris des drogues psychédéliques. Nous enfilions des costumes féminins et allions dans le coin du manoir pour faire les fous, pour attirer l'attention. Dans mon esprit, Queens of the Breakers représente une bande d'amis qui tripent sur le domaine The Breakers. À ce moment, Andrew était juste un peu trop jeune pour être avec nous, mais il connaît bien l'histoire... C'est une période durant laquelle je vivais mes premières expériences en tant que personne indépendante. C'est aussi le temps des premiers shows rock... C'est une belle période.»

Richmond Lam

Un album personnel

Bien que Brad Barr ait ressassé des souvenirs du passé, la nostalgie n'a pas été un carburant important pour créer l'album, selon lui. C'est plutôt le thème de l'amitié qui a inspiré son écriture. À cet égard, le chanteur mentionne que ce disque renferme les chansons les plus personnelles qu'il ait écrites au cours de sa carrière.

«Ce saut dans le passé m'a forcé à prendre mon temps, car c'était plus difficile d'écrire. C'est comme si je n'arrivais pas saisir ce que je voulais raconter. Ultimement, il s'en dégage des thèmes plus près d'Andrew et moi : les racines, la famille, les copains, la maison...»

Defibrillation, par exemple, s'inspire d'un séjour inquiétant de leur mère à l'hôpital. « À la suite d'une chute, elle s'est mise à saigner, explique Brad. À l'époque, nous avions été inquiétés. Nous avons réalisé que notre mère prenait de l'âge, qu'elle était vulnérable. Cela a fait jaillir des sentiments nouveaux à propos de l'attachement et du vieillissement. Bien entendu, elle OK aujourd'hui.

«Bref, cette histoire m'a donné l'idée d'écrire une sorte de lettre à mon fils, qu'il pourrait lire quand il aura lui-même mon âge. Je tente de lui présenter qui je suis, en fait. Disons que c'est impressionniste.»

Ainsi, la parentalité a eu un impact sur le processus créatif de Queens of the Breakers. «Mon nouveau rôle de père a rendu la composition et l'écriture beaucoup plus difficile, avance Brad. Je ne peux plus m'asseoir sur le divan ou me coucher sur mon lit la nuit pour jouer de la guitare et inventer... Je dois trouver de nouveaux lieux et des moments plus adaptés à mon mode de vie familiale.»

Également père d'un bébé, Andrew renchérit : «C'est justement pour cette raison que nous sommes allés au Studio Wild. Il fallait prendre une dizaine de jours afin de retrouver un mode plus propice à la création.»

À cet instant, Brad continue la phrase de son frère...

«Ensuite, j'ai réalisé que j'étais moins intéressé par ce que j'avais à dire. Ma lecture du monde (sur la politique, la société, l'amour) n'avait plus d'importance face à cet enfant si vivant. De toute évidence, mon bébé a fait naître en moi de nouvelles préoccupations. Mon centre d'intérêt a changé. C'était donc nécessaire de me retrouver avec Andrew et Sarah pour retrouver mes anciens réflexes de musiciens...»

Une propension rock

Contrairement à Sleeping Operator, qui misait sur des arrangements essentiellement folk-blues, Queens of the Breakers ouvre la porte au genre rock. Celui qui habitait justement la jeunesse des deux frères. Outre la musique de Grateful Dead, «que les frérots écoutaient souvent avec un joint de cannabis aux lèvres, Andrew et Brad Barr ont laissé s'exprimer, consciemment ou non, les influences d'artistes qu'ils respectent beaucoup depuis des années : Led Zeppelin, The Rolling Stones, Tom Petty ou encore The War On Drugs.

Bien entendu, le folk demeure un style de prédilection. Les harmonies vocales aussi sont abondantes. Nous ne pourrions passer à côté de leur admiration pour le travail de Paul Simon (de Simon and Garfunkel), qui déteint sur quelques pièces, dont la belle Song That I Heard.

«Quand nous avons eu 20 ans, Paul Simon était l'un de nos artistes favoris», lance Andrew.

Vraiment, tout est dans tout.

D'ici à ce que le trio donne un spectacle au Mtelus de Montréal, le 24 novembre, la formation The Barr Brothers assurera la première partie de 16 concerts du groupe américain The War on Drugs, en Europe.

L'album Queens of the Breakers est disponible dès aujourd'hui via Secret City Records.

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