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«Faits divers»: jeu de chats et souris entre policiers et bandits

D’un côté, il y a les enquêteurs doués; de l’autre, les criminels sans grande envergure, qui n’ont pas nécessairement les moyens de leurs ambitions.
Courtoisie Radio-Canada

Il y a tout un folklore qui entoure le fait divers, les jeux de pouvoir entre bandits et policiers. C'est de ce classique chassé-croisé dont on s'amuse un brin dans la nouvelle série Faits divers, qui occupera la plage de 20h à 21h, juste après Trop et avant Olivier, les lundis soirs de l'automne, à Radio-Canada. L'enquête démarre ce lundi, 11 septembre.

Cette saga sans répit de Joanne Arseneau (Le clan, 19-2), mise en images avec grand soin par le réalisateur Stéphane Lapointe (La théorie du KO, Lâcher prise, Tout sur moi) défile dans un ton décalé frôlant souvent la comédie noire et grinçante, sans devenir ridicule ou verser dans la sitcom. Ce n'est absolument pas pétillant ou léger, le ton est même souvent au gris et au brun, mais notre curiosité est rapidement piquée et on a hâte de voir jusqu'où mènera le duel.

D'un côté, il y a les enquêteurs doués; de l'autre, les criminels sans grande envergure, qui n'ont pas nécessairement les moyens de leurs ambitions, beaucoup plus grandes qu'eux. Les visages à deux faces se multiplient, les squelettes dans le placard aussi. Les imprévus se dressent sur le chemin initial sans crier gare, et les faux pas de nos brigands pas toujours futés les amplifient à la puissance mille.

Sur la Rive-Nord

L'homme-pivot de toute l'affaire, c'est Mike Pratt (Fabien Cloutier), un loser sympathique, propriétaire d'un commerce de portes et fenêtres, qui fout le feu à sa grange dans l'espoir de profiter de la manne des assurances. Il a comme complice sa comptable, Marlène Charbonneau (Mylène Mackay), laquelle a, pourrait-on dire, plus d'un tour dans son sac.

Près ou loin d'eux gravite toute une brigade de «méchants» qui en verront eux-mêmes de toutes les couleurs : Éric «la bottine» Charbonneau (David Boutin), frère de Marlène, la distinguée avocate-galeriste Anne Dupuis (Marie-Ève Beaulieu), Joël Savard (Francis La Haye) et Yvan-Gilles (Jean-Pierre Bergeron).

Le «cas» Mike Pratt sera rapidement lié à la découverte d'une frissonnante scène de crime, celle de deux cadavres assassinés, gisant dans le champ boueux d'une ferme laitière au petit matin. Et notre pauvre bougre sera prestement dépassé par les événements.

C'est Constance Forest (Isabelle Blais), une superwoman de 37 ans, mère de trois enfants et chef enquêteur du bureau régional de Mascouche, qui héritera du dossier avec ses collègues, dont son partenaire Jonas (Maxime Mailloux) et les quatre «bedaines», c'est-à-dire, quatre policières enceintes au même moment (Emmanuelle Lussier-Martinez, Daphnée Côté-Hallé, Mara Joly et Anna Beaupré) - avec tout ce que cela comporte d'embarrassant et de rigolo - affectées à des tâches administratives.

Le bureau de région sera épaulé des représentants des crimes majeurs de Montréal, Frédérik Bérubé (Émile Proulx-Cloutier) et Antoine Chevrier-Marseau (Fred-Éric Salvail). On comprendra non seulement que Frédérik et Constance ont connu une idylle dans le passé, mais également que les rivalités entre les agents de la banlieue et ceux de la ville sont vives et palpables.

Le prénom de Constance n'a rien d'hasardeux ou d'anodin. Faits divers a d'ailleurs failli s'intituler Constance. Parce que la dame en question évoque la droiture, la solidité et, bien sûr, la constance dans ce tourbillon d'immoralité et de tours de passe-passe sans fin.

«C'est Constance qui a une tête sur les épaules, qui essaie de rester droite et pure dans tout ça, détaille Isabelle Blais. Mais la situation va devenir tellement complexe, à un moment donné, que séparer le travail de sa vie personnelle va devenir de plus en plus difficile. Il faut qu'elle fasse cette séparation, mais elle va vite se sentir coincée dans cette intrigue qui va tout mélanger. Constance n'est pas quelqu'un qui va flancher rapidement ou être corrompue. Elle est tourmentée, mais elle essaie de garder une morale.»

Toutes ces ramifications se déploient sur fond de décors de la Rive-Nord de Montréal, qui est clairement identifiée : Faits divers se campe à Saint-Sauveur, Mascouche, Sainte-Agathe, Mirabel, Laval, Lachute, etc. L'aspect banlieusard de l'intrigue, loin des grands centres, ajoute d'ailleurs à son unicité.

Ni blanc, ni noir

Est-ce plus rose du côté des forces de l'ordre? On devine qu'il n'y a rien de réellement tout blanc ou tout noir, dans Faits divers, et que les révélations continueront de jaillir tout au long des 10 épisodes.

Déjà, la sphère privée de Constance n'est pas nécessairement un paradis : son père, Serge Forest (Guy Nadon), un ex-musicien irresponsable, trempe dans des affaires louches et la manipule allègrement. La sœur de Constance, Zoé (Alexa-Jeanne Dubé), qui s'occupe à temps plein des enfants de sa frangine et du motel jadis tenu par leur père, est moins sensible à la cause du patriarche.

Puis, Sylvain Lauzon (Patrick Hivon), l'ex de Constance et père de ses marmots, un ex-policier devenu ripoux, voudrait bien renouer avec elle, mais il n'a rien d'un enfant de chœur non plus. Lui aussi sera aspiré dans la galère qui occupe Constance et son équipe.

Alors que, souvent, les suspenses policiers nous montrent davantage l'aspect procédural des opérations des enquêteurs, entraînant le public dans le mystère, dans Faits divers, non seulement celui et celle qui regardent ont une perspective des deux côtés de la joute, mais le téléspectateur a également toujours une longueur d'avance sur les protagonistes, sait qui a fait quoi et comment.

«Il y a des méchants, mais on ne voit pas tellement de violence, signale Sophie Deschênes, de la boîte Sovimage, productrice de Faits divers. C'est tordu, parce qu'on entre dans un univers criminel, mais ce n'est pas rebutant du tout. Ce sont plutôt des gens qui se font manipuler, qui ont des secrets à cacher, qui veulent s'en sortir et qui s'enfoncent, tranquillement, pas vite. Plus vite la police essaie de les attraper, plus ils veulent cacher des preuves et des indices. C'est un tourbillon sans fin pour nos personnages et ça nous fait sourire. Ils vont se retrouver dans des situations comiques, mais eux ne les vivent pas de façon comique du tout!»

Ton Fargo-esque

Faits divers, un produit extrêmement intelligent, plaira aux amateurs du genre policier qui pullule par les temps qui courent sur nos écrans, mais soyez avisés : il faut être attentif pour ne rater aucun soubresaut et ainsi rester accroché à l'histoire. Il y a beaucoup de personnages et les revirements sont abondants.

«Il y a des liens partout entre les personnages, comme on peut voir en région. Tout le monde se connaît, tout le monde a des liens avec tout le monde», illustre Sophie Deschênes.

Puis, on est parfois dérouté dans cette fresque à l'incessant deuxième degré. Tenez-vous prêts, vous pourriez sursauter en voyant siffler dans l'air une jambe coupée ou être saisi par une sournoise attaque à la poêle...

Spontanément, certains auront une pensée pour le film et la série Fargo en visionnant Faits divers. Ce n'est pas un hasard, mais il ne s'agit pas d'un calque non plus, nous jure-t-on.

«Fargo, ce sont de petits criminels qui se mettent le doigt dans l'engrenage et qui, tranquillement, descendent. C'est un peu ce qu'on voulait faire», explique Sophie Deschênes, en insistant sur le fait que Faits divers n'est pas un remake, une copie ou une inspiration de Fargo.

«C'est un coup fourré, cette affaire-là. C'est pour ça qu'on dit que c'est un ton Fargo-esque...»

Maître d'œuvre de ce coup fourré, Mike Pratt ne se fera pas nécessairement haïr des Québécois, estime son interprète, Fabien Cloutier, qui vante la finesse et les nombreuses qualités esthétiques de Faits divers lorsqu'on lui demande ce qu'il affectionne du projet.

«Je crois qu'il est sympathique, fait valoir Cloutier en parlant de Mike Pratt. C'est un homme qui est pris dans quelque chose de plus grand que lui. Ce n'est pas quelqu'un dont les intentions étaient clairement méchantes au début. Il voudrait simplement améliorer son sort, avoir plus dans la vie, mais il est extrêmement malhabile. Il a la tentation du côté obscur, mais c'est un monde dans lequel on peut se brûler assez vite. Et lui, il se fait brûler pour la peine!»

Isabelle Blais, pour sa part, perçoit-elle sa Constance comme une héroïne dans le plus brut sens du terme?

«C'est une héroïne dans la mesure où elle essaie de rester droite malgré tout, mais en même temps, c'est une femme bien ordinaire, qui essaie de faire sa job de mère comme il faut et son travail d'enquêtrice. Elle n'est pas parfaite. C'est juste une femme normale avec de bonnes valeurs», indique la comédienne.

Faits divers, le lundi, à 20h, à Radio-Canada, dès demain, 11 septembre. Les abonnés de Tou.tv Extra pourront voir en primeur l'épisode de la semaine suivante après chaque diffusion.

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