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Lutte contre le sida: les compressions américaines inquiètent

Historiquement, la contribution des États-Unis dans la lutte contre le sida est majeure.
utah778 via Getty Images

À l'ouverture, dimanche, de la conférence internationale de recherche sur le sida à Paris, l'ombre des États-Unis plane sur la lutte contre le virus. Les organisateurs de l'évènement ont appelé l'administration Trump à rester engagée financièrement à la cause. Le plus important contributeur a en effet annoncé une réduction importante de son appui monétaire.

Historiquement, la contribution des États-Unis dans la lutte contre le sida est majeure. L'an dernier, elle était de 6 milliards de dollars canadiens, soit les deux tiers du financement gouvernemental mondial.

En 2018, ce montant pourrait toutefois être réduit d'une valeur d'un milliard de dollars, selon l'organisation Health Gap, si les compressions proposées par le président Donald Trump sont acceptées par le Congrès.

En mai, le président américain avait affirmé que les États-Unis devaient « réduire les financements de plusieurs programmes de santé, dont certains concernent le sida, en considérant que d'autres donneurs devraient augmenter leur contribution ». Donald Trump souhaite, entre autres, réduire de 17 % l'apport américain au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

Des compressions qui inquiètes. « Les Américains représentent un financement essentiel dans ce domaine et nous avons besoin qu'ils restent engagés », rappel Linda-Gail Bekker, chercheuse au Desmond Tutu HIV Centre, en conférence de presse.

Avant même l'inauguration de la conférence internationale de recherche sur le sida, les organisateurs avaient publié une « Déclaration de Paris » pour exprimer leur inquiétude. Plusieurs spécialistes estiment d'ailleurs que les compressions envisagées par l'administration Trump entraîneraient une véritable tragédie.

On ne parle pas d'un simple risque de ralentissement de la lutte contre le sida : ces compressions budgétaires pourraient entraîner un vrai revirement par rapport aux progrès que nous avons faits. Linda-Gail Bekker, présidente de l'International AIDS Society (IAS)

C'est un avis que partage Ken Monteith, directeur général de la Coalition des organismes communautaires québécois pour la lutte contre le sida.

« Ce n'est pas le moment de prendre un recul sur la disponibilité de ces traitements. Il faut avancer. Nous avons une opportunité magnifique en ce moment, nous avons tous les outils. Ça prendrait plus de ressources, mais on peut mettre fin au VIH », estime-t-il.

Il faut dire que la recherche contre le sida a déjà porté ces fruits. Ceux qui ont accès aux traitements et qui les suivent assidument ne transmettent pas le virus et peuvent vivre une vie relativement normale.

Le sida en 2016

  • 36,7 millions de personnes vivent avec le VIH
  • 19,5 millions de personnes ont accès au traitement antirétroviral
  • 1,8 million de personnes ont été nouvellement infectées par le VIH en 2016
  • 1 million de personnes sont mortes de maladies liées au sida (soit la moitié moins qu'en 2005)

Source : Onusida

830 000 patients privés de traitements

Quels seraient les impacts concrets de telles compressions? Selon l'organisation spécialisée en politique médicale Kaiser Family Foundation, ces compressions priveront 830 000 patients de traitements antirétroviraux, qui empêchent le développement du VIH, et entraîneront 200 000 nouvelles infections.

Les conséquences seraient les plus désastreuses en Afrique, là où la lutte se fait pressante. L'an dernier, au moment de la conférence internationale de la recherche sur le sida, le virus y était la première cause de mortalité chez les 10 à 19 ans.

Difficile pour les spécialistes de voir une issue à ces compressions. Dans leur « Déclaration de Paris » les chercheurs proclament : « pas de fin du VIH sans la recherche et pas de recherche sans des investissements pérennes ».

Les Nations unies espèrent qu'en 2020, 90 % des personnes vivant avec le VIH connaîtront leur statut, que 90 % de ces dernières seront sous traitement, et que 90 % auront une charge virale indétectable. Pour atteindre ces objectifs, le montant mondial alloué à la lutte contre le sida devrait être de 32,9 milliards de dollars canadiens, selon l'organisation. L'an dernier, l'enveloppe était de 24 milliards.

Nous maximisons l'usage de chaque dollar disponible, mais il nous manque toujours 7 milliards [américains] Michel Sidibé, directeur général de l'Onusida

Un avenir incertain

Pour l'avenir de la lutte contre le sida, plusieurs questions restent toutefois sans réponses. On ne sait pas, notamment, ce qu'il adviendra du budget du PEPFAR, le plan d'urgence américain contre le sida, initié par George W. Bush en 2003, qui permet à plus de 12 millions de patients de bénéficier de traitements antirétroviraux.

Des regroupements de lutte contre le VIH ont aussi souligné l'absence à cette conférence du président français Emmanuel Macron, estimant qu'il s'agit d'un désengagement « comparable à celui de Donald Trump ».

Quelque 6000 spécialistes sont réunis jusqu'à mercredi pour débattre des enjeux de la lutte contre le sida à Paris. Cette année, les discussions s'orientent notamment sur les avancées de la recherche et sur le financement.

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