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Le Gala «Juste engagé» n’a pas refait le monde...

On n’a relevé aucune prise de position incendiaire et, mis à part Donald Trump, aucune personnalité influente n’y a réellement goûté!
La Presse canadienne/Mario Beauregard

On n'a pas refait le monde, loin de là, au Gala «Juste engagé» du Festival Juste pour rire, mardi. Vrai qu'avec les animateurs Laurent Paquin et Jean-Luc Lemoine et des invités comme Dominic et Martin, Mélanie Couture et François Massicotte, on s'attendait à un résultat plus doux-amer que franchement décapant, mais Paquin s'est déjà montré plus corrosif, et des visages comme Fabien Cloutier, Virginie Fortin, Jean-François Mercier et Emmanuel Bilodeau n'ont pas nécessairement la réputation de faire dans la dentelle.

Mais on n'a relevé aucune prise de position incendiaire et, mis à part Donald Trump, aucune personnalité influente n'y a réellement goûté.

Bon ou mauvais, le spectacle? Somme toute généralement intéressant, un peu longuet, avec quelques fantastiques trouvailles et une ou deux déceptions, dont un cacophonique segment de clôture qui nous a donné envie de sortir de la salle au plus vite.

Le Gala «Juste engagé» est présenté à nouveau le mercredi 19 juillet, à 18h30 et 21h30, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts.

Nos coups de cœur de la soirée: Fabien Cloutier, Mélanie Couture, Virginie Fortin

Nos déceptions: François Massicotte et Jean-François Mercier

Les animateurs

Le numéro d'ouverture des animateurs Laurent Paquin et Jean-Luc Lemoine n'a rien cassé, même si la chimie entre les deux hommes est toujours palpable et dégage énormément. Paquin a ardemment voulu convaincre son pote Lemoine de faire son coming-out, avant de comprendre avec stupéfaction que celui-ci n'est pas gai. Tous deux se sont ensuite adonnés au jeu des réponses spontanées à l'évocation de sujets controversés (environnement, guerre, avortement, etc). Du déjà vu qui fut correctement amusant, sans plus.

Plus tard, ils ont beaucoup fait rire la foule en lisant de faux commentaires mesquins sur les réseaux sociaux. Autre bon coup, cette saynète avec Anthony Kavanagh, se déroulant dans une manifestation. «Le Français moyen passe plus de temps dans la rue que nos prostituées», a vociféré Laurent Paquin à propos de l'obsession de nos cousins pour les revendications. «Peut-être, mais votre gouvernement vous baise plus que nos putes», a riposté Jean-Luc Lemoine.

Kavanagh a joué les sympathiques et hilarants trouble-fêtes dans cette joute verbale, où il a été question d'ITS, de Nutella et de Mère Teresa, et dont on retiendra particulièrement le slogan «Justin, on le sucerait bien» (Trudeau, oui) et ces nombreuses allusions à la vie sexuelle de Marine Le Pen.

On a déjà oublié le clin d'œil des maîtres de cérémonie à l'aspect «écoresponsable» du gala, carrément tombé à plat.

Puis, désireux de lancer un (faux) organisme visant à faire rire pour oublier la misère, «Humoristes sans frontières», Laurent Paquin et Jean-Luc Lemoine avaient fait appel à une chorale pour chanter l'espoir d'un monde meilleur à la tombée du rideau. Passons sous silence (ça vaut mieux) les fausses notes de Jean-Luc Lemoine et ce délire désordonné qui a conclu l'enchaînement, et qui n'était absolument pas nécessaire.

Dominic et Martin

Dominic et Martin ont offert un numéro consistant et fort efficace portant sur les différences. Martin Cloutier a déploré les misères de son surplus de poids («Dix livres de plus, les deux genoux me fendent et je me promène en triporteur», a-t-il exagéré), tandis que Dominic Sillon a aligné plusieurs bons gags en détaillant sa condition d'handicapé, lui qui est privé d'un œil. «Moi, la chanson de Passe-Partout, J'ai deux yeux... Ta yeule! J'ai jamais pu la chanter au complet!». S'improvisant porte-parole des personnes handicapées en réclamant plus de commodités, il a entre autres exigé de ne plus être dépassé par la gauche sur l'autoroute. «Moi, mon angle mort, crisse qu'il est mort!» Le tandem a traité ces sujets délicats de belle manière, en restant fidèle à son style léger.

Fabien Cloutier

Fameuse tirade de Fabien Cloutier, qui a obtenu beaucoup de succès et une chaleureuse ovation debout en traitant des inégalités d'un angle bien spécial, celui de la comparaison entre êtres humains et animaux. Difficile de reproduire ici ses lignes extrêmement inspirées, Cloutier maniant toujours son verbe et son récit avec grâce et acuité, en n'ayant pas peur d'en envoyer une bien vulgaire à l'occasion, mais jamais gratuitement. Du grand art. On ne verra plus jamais du même œil les pauvres poissons qui se nourrissent d'excréments d'hippopotames et qui cracheraient sur un festin de Martin Picard concocté spécialement pour eux (il a de l'imagination, Fabien Cloutier...)

Mélanie Couture

«Team rides» ou «Team gros cul» pour les femmes de 40 ans et plus? Mélanie Couture a atteint la cible d'entrée de jeu en établissant un judicieux parallèle entre les deux calamités qui guettent la gent féminine. Son matériel, quoique très grivois et salé, n'est à peu près jamais tombé dans la facilité. Entre deux grands éclats de son rire caractéristique, elle a réglé le cas des «mononc' cochons» et a été très drôle en détaillant comment «un Québécois de 90 ans, c'est un vieux crisse, et un Chinois de 90 ans, c'est un vieux sage».

Roman Frayssinet

On avait annoncé la présence de Guillaume Wagner à la représentation du gala de 18h30, mais c'est finalement le Montréalais d'origine française Roman Frayssinet qui s'est pointé. Pas du tout dans la même veine que Wagner, Frayssinet n'a néanmoins pas déçu en décriant le peu d'élégance de l'organe reproducteur masculin et en hurlant de colère envers les pieuvres considérées intelligentes parce qu'elles peuvent ouvrir des pots de confiture. Son charisme et sa conviction – sa hargne contre les pieuvres était on ne peut plus sentie! – lui valent quelques étoiles de notre part. Très réussi.

François Massicotte

Terreau fertile que celui de la famille pour François Massicotte, qui est aujourd'hui papa de cinq enfants et qui puise abondamment dans cette source depuis quelques années pour dérider ses parterres. Hélas, l'humour du vieux routier n'a pas toujours volé très haut mardi avec des plaisanteries faciles sur la liste d'accessoires scolaires à acheter (on voyait venir à plusieurs kilomètres à la ronde sa blague sur les boîtes de kleenex), l'obésité de Gaétan Barrette (encore, vraiment?) et l'épineuse tâche que constitue désormais la composition des boîtes à lunch du midi. Sa meilleure boutade? Celle, pleine d'autodérision, sur l'inscription de sa progéniture à l'école publique. «J'en ai cinq, je ne fais plus d'annonces de Sponge Towels, ils vont aller au public!»

Virginie Fortin

Accueillie par une salve d'applaudissements nourris, Virginie Fortin a expliqué «comment [elle] est devenue une humoriste engagée», cette année, et a discouru de son féminisme, elle qui s'est récemment fait traiter de «fémi-nazie». Elle a tourné en dérision avec habileté les gens qui pourfendent le mouvement féministe. Messieurs, vous ne voulez pas avoir affaire à une «fémi-nazie» selon la description qu'en fait Virginie Fortin, soyez-en certains. Sa proposition de sortir les garçons des écoles – appuyée d'un raisonnement tout à fait logique! – a beaucoup fait réagir!

Jean-François Mercier

L'explication de Jean-François Mercier sur les faits alternatifs était pas mal du tout. Pourquoi, alors, commencer son monologue avec pareille grossièreté? «Il paraîtrait que Philippe Couillard n'aurait pas de trou de cul, c'est pour ça qu'il est plein de marde...», fut notre entrée en matière. Mercier a rapidement rectifié: notre premier ministre a plutôt «26 trous de cul», qui forment son conseil des ministres. Ah bon. Avec pareil apéro, on est restés un peu de glace devant la suite, même si le fondement du numéro (faits alternatifs versus mensonges, Trump versus Obama, Bombardier) était très juste. Décidément, la finesse ne sera jamais la marque de commerce de Jean-François Mercier.

Emmanuel Bilodeau

Pour ses 35 ans, le Festival Juste pour rire nous invite à replonger dans nos souvenirs lors des galas en proposant des reprises de numéros qui ont jadis obtenu de fortes réactions, des «classiques». Mardi, Laurent Paquin avait invité Emmanuel Bilodeau à raviver un personnage acclamé en 2011 (et récupéré ensuite dans son one man show), celui d'un politicien qui jongle mal entre français et anglais. Adaptée à la sauce 2017 (avec des références à Despacito, Donald Trump, Jean-François Lisée et Justin Trudeau), l'allocution s'est éteinte dans un pastiche non dissimulé et bien rendu de René Lévesque par celui qui l'a déjà interprété au petit écran. La salle a adoré, et Bilodeau a reçu l'ovation debout la plus chaleureuse de la soirée.

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