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Polémique à Fort Boyard: une association pour malades psychiatriques porte plainte contre l'épreuve de «l'asile»

«Oserait-on monter une attraction sur le thème d'une autre maladie?»

Des parents d'enfants atteints de troubles psychiques n'ont pas du tout apprécié l'une des épreuves diffusées samedi 24 juin dans l'émission "Fort Boyard" sur France 2.

Ils ont décidé de porter plainte pour "injures publiques" et "discrimination", selon le Parisien. Ils visent le jeu baptisé L'Asile qui consiste à habiller un candidat avec une camisole de force sur laquelle pendent des boules rouges et blanches, puis à le mettre dans une cellule capitonnée et à le laisser se démener pour détacher les boules.

Des parents déterminés

"Dans cette cellule d'un autre âge, meublée d'une paillasse au sol, d'une cuvette de toilettes et du combiné seau-balai-serpillière, le candidat se contorsionne dans tous les sens, et marche même au plafond dans cette pièce qui tourne sur elle-même", écrivait l'Unafam, dans un communiqué daté du 28 juin. "Aux murs savamment mis en scène, continue l'Unafam, on lit les mots: 'Help', 'SOS', 'No future', 'Fool'..."

Les parents sont déterminés à aller en justice, choqués par l'image ridicule que cette épreuve pose sur les malades. Regroupés dans le collectif Promesses qui lutte contre la stigmatisation de la schizophrénie et au sein de l'Unafam (l'Union nationale de familles et amis de personnes malades et handicapés psychiques), ils expliquent vouloir déposer la plainte ce mercredi 5 juillet.

La cofondatrice de Promesses, Bénédicte Chenu, est mère d'un fils atteint de schizophrénie. Elle dit au Parisien: "Je sais qu'il faut avoir de l'humour. Mais la chambre d'isolement, c'est une réalité aujourd'hui! Je n'ai pas envie d'en rire."

Les conséquences de la stigmatisation selon les parents

Dans une lettre ouverte à la présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte, l'association dénonçait une épreuve anxiogène, "mais surtout totalement stigmatisante pour les personnes vivant avec des troubles psychiques et la psychiatrie."

"Oserait-on monter une attraction sur le thème d'une autre maladie (sida, cancer, sclérose en plaques...)?", demande l'Unafam. À l'heure où les idées fausses sur la psychiatrie sont légion, comment lutter contre la stigmatisation avec un tel 'divertissement' sur une chaîne publique? Les médecins se battent pour que les jeunes soient pris en charge le plus précocement possible pour éviter des retards de diagnostic de 5 à 10 ans en moyenne actuellement. Comment convaincre un jeune de consulter avec une telle image de la psychiatrie?"

Entre 2001 et 2006, Fort Boyard avait déjà créé une épreuve intitulée "L'Asile", mais la mise en scène n'était pas aussi poussée.

Redonner de la dignité aux patients

D'autres voix influentes dans le monde de la psychiatrie se sont élevées. Le site "Comme des fous" a enclenché la polémique le 27 juin, en écrivant: "Il faut savoir que la psychiatrie concerne 2 millions de personnes en France et que 80% des personnes sont soignées au plus près de leur domicile et ne sont jamais hospitalisées. L'hospitalisation en psychiatrie reste une épreuve traumatisante dont il est difficile de se relever, notamment du fait de la stigmatisation et du regards des autres."

L'un des auteurs du site raconte que son enfant lui a demandé, à la suite de cette diffusion: "ça se passe comme ça à l'hôpital psychiatrique?". Il propose ensuite des "clés de lecture" pour dédramatiser l'hospitalisation et redonner de la dignité aux patients. Il explique ainsi que "l'asile comme lieu d'enfermement arbitraire, la chambre capitonnée et la camisole sont révolus mais les pratiques d'isolement et de contention sont courantes et réglementées en France, souvent considérées comme nécessaires en cas de crise".

Depuis, le producteur artistique de l'émission a tenté d'éteindre la polémique. Au Parisien, il explique avoir pris en compte les critiques pour les prochains épisodes. "Les références au monde hospitalier ont été supprimées, certains commentaires des candidats et les cris dans la cellule coupés, le mot "asile" remplacé par "cellule capitonnée". Et la mention Docteur Muraille évacué."

Ce texte a été publié originalement dans le HuffPost France.

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