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Les acteurs brillent dans «Demain matin, Montréal m'attend» (PHOTOS)

Les acteurs brillent dans «Demain matin, Montréal m'attend»
Yves Renaud

Incontournable, le Demain matin, Montréal m’attend que présente actuellement le Théâtre du Nouveau Monde (TNM) dans le cadre des FrancoFolies de Montréal, et dont la première médiatique avait lieu jeudi soir? Franchement, non.

Le spectacle mis en scène par René-Richard Cyr, d’après le texte de Michel Tremblay et les musiques de François Dompierre, accuse quelques longueurs, et la pièce n’est pas la plus flamboyante, la plus percutante ou la plus ébranlante que Spectra et le TNM auraient pu choisir pour saluer les 375 ans de Montréal.

Heureusement, les 75 ans de Michel Tremblay, les 50 ans d’Expo 67 et les 65 ans du TNM servaient aussi de prétexte à la résurrection de ce joyau des planches québécoises.

La production est intéressante, divertissante si on apprécie le genre, mais on ne convaincra pas les détracteurs de comédies musicales ni ceux de Michel Tremblay avec cet appât. Il serait étonnant que cette version de l’œuvre devienne mythique, même si elle s’inscrit dans la lignée de célébrations d’un des anniversaires les plus fastueusement commémorés de la ville. On y relève peu de surprises, peu de moments vraiment mémorables. C’est joli, c’est bien fait, mais on n’y trouve pas de quoi s’émerveiller à outrance.

Évidemment, même campée dans le nightlife des années 70, et montée pour la première fois il y a plus de 45 ans - au Jardin des Étoiles de Terre des Hommes -, l’histoire distille, encore aujourd’hui, d’intéressantes réflexions sur le show-business et ses travers, et la faune bigarrée de personnages plus grands que nature imaginée par Tremblay sera toujours fascinante à voir prendre vie, peu importe le contexte. Toutefois, même si un classique reste un classique, un produit un peu plus vigoureux ou coup-de-poing aurait été de mise en 2017.

La trame, en quelques mots : nouvellement récipiendaire du trophée Lucille-Dumont, arraché dans un concours à la Jeunes Talents Catelli, la jeune Louise Tétrault, serveuse de son état, quitte son village campagnard de Saint-Martin pour faire carrière dans la chanson à Montréal, arrogance aux lèvres et détermination au corps. Son objectif? Devenir une star, rien de moins.

Arrivée à destination, Louise compte sur sa grande sœur, Rita, alias Lola Lee, chanteuse étoile consacrée de revues musicales, pour la propulser haut dans le monde des cabarets. La gamine s’imagine qu’elle n’aura qu’à singer son aînée pour atteindre l’heure de gloire à son tour.

Or, la principale intéressée ne l’entend pas ainsi et n’a pas l’intention de céder son trône. Elle entreprendra donc d’enseigner le revers de la médaille à sa frangine, de lui présenter les plus sombres travailleurs des clubs de Montréal, les aspects les moins reluisants de son métier, pour la décourager de jouer dans ses platebandes. La désillusion, voilà le grand thème qui se dégage de Demain matin, Montréal m’attend.

Sobriété

Rendons néanmoins à César ce qui appartient à César. Habitué de l’univers de Michel Tremblay, René-Richard Cyr a façonné un univers coloré, tape-à-l’œil, sans toutefois exagérer. C’est tant mieux, la sobriété semble ici avoir été le mot d’ordre, question d’offrir un contrepoids à la démesure des protagonistes qui évoluent dans ce récit où naïveté et cynisme se collettent sans arrêt.

Puis, s’il est un élément de cette relecture de Demain matin… qu’on doit à tout prix souligner et féliciter, c’est le jeu des acteurs, tous magistraux, tant dans les numéros parlés que chantés. Personne n’en fait trop ou pas assez, les voix sont en forme, ça déborde de prestance de partout et la cohésion au sein du groupe est palpable. La solidité de la distribution est probablement le principal argument à invoquer pour «vendre» Demain matin, Montréal m’attend au plus grand nombre.

Dans la peau de la Duchesse, Laurent Paquin a le ton parfaitement juste. Ne cherchez pas l’humoriste ici, les aptitudes de comédien de Paquin se fondent dans l’extravagance des habits et du maquillage du légendaire travesti. Ses Lamentations de la Duchesse sont bouleversantes.

Hélène Bourgeois-Leclerc est à la fois détestable et vulnérable sous les traits de Lola Lee, alias Rita, la vedette au sommet aussi vénérée que méprisée. On la maudira un temps de vouloir nuire à sa cadette, puis, au tournant final, on comprendra le labeur investi pour arriver là où elle est, et la nuance s’imposera.

L’attachante recrue Marie-Andrée Lemieux étincelle de mille feux. On la voudrait toujours à l’avant-scène. Sa Louise Tétrault est candide, mais aussi frondeuse. Attendrissante et rêveuse, mais aussi un tantinet exécrable d’inconscience et d’insolence. Plus difficile à rendre qu’il n’en a l’air, le rôle lui sied comme un gant.

Benoît McGinnis n’a plus rien à prouver dans les enchaînements du genre. Dans Demain matin…, il incarne Marcel-Gérard, un journaliste fouineur à l’affût des potins. Un hommage ou un coup de gueule à Michel Girouard, à qui il ressemble comme deux gouttes d’eau, costumes, chevelure peroxydée et démarche inclus?

On se pâme en outre devant Betty Bird, tenancière de bordel ennemie de Lola Lee, que livre une impeccable Kathleen Fortin. Même Michelle Labonté, qui n’apparaît que brièvement en mère Tétrault, est éblouissante et très drôle.

Ce sont tous ces artistes, en plus du chœur de huit voix et des cinq musiciens, qui insufflent la magie à un Demain matin, Montréal m’attend qu’on aurait voulu davantage revisité au goût du jour, plus pétillant et mordant.

Demain matin, Montréal vous attend peut-être, mais seulement si le TNM, Michel Tremblay et cette création légendaire vous tiennent profondément à cœur. Quoi qu’il en soit, la chanson-thème demeure toujours agréable à fredonner...

Demain matin, Montréal m’attend est à l’affiche du TNM jusqu’à samedi, puis le dimanche 25 juin, et y sera reprise en septembre. Tous les détails sont disponibles ici.

Les 29e FrancoFolies de Montréal se poursuivent jusqu’à dimanche.

Demain matin, Montréal m'attend

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