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«La Vieille Province»: le Québec mal préparé pour le défi du siècle

Le Québec vieillit. En 2026, un Québécois sur quatre sera âgé de plus de 65 ans. Mais la province est-elle prête?

Ce texte a été publié dans le cadre du dossier La Vieille Province, une série de reportages sur le vieillissement de la population au Québec.

Le Québec vieillit. En 2026, un Québécois sur quatre sera âgé de plus de 65 ans. Mais la province est-elle prête? Pas si l’on en croit la majorité des intervenants rencontrés dans le cadre de cette série de reportages.

Santé, services sociaux, économie, loisirs, logement, emploi… La province a beaucoup à faire si elle veut combler les besoins des baby boomers, ces retraités nouveau genre qui n’ont pas du tout la même définition du «troisième âge» que les générations précédentes.

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Chronique d’un désastre annoncé

Le vieillissement de la population québécoise est loin d’être une surprise. Entre la fin de la Deuxième Guerre mondiale et le milieu des années 60, le Québec – à l’instar de plusieurs autres sociétés à travers le monde – a connu une hausse marquée du nombre de naissances. Entre 1945 et 1965, le Québec a vu naître 2 722 568 enfants, pour une moyenne de 129 646 naissances par année.

À partir de 1965, le taux de natalité s’est mis à fondre comme neige au soleil, ne connaissant que de faibles sursauts à la fin des années 70, au début des années 90 et durant la deuxième moitié des années 2000. En 2016, à peine 86 400 enfants québécois sont venus au monde.

Le renversement de la pyramide des âges était donc prévisible. Déjà en 2002, le vérificateur général du Québec, Guy Breton, qualifiait le phénomène du vieillissement de «préoccupant» pour la province.

Pourtant, 15 ans plus tard, force est d’admettre que les mesures mises en place par les gouvernements péquistes et libéraux qui se sont succédés depuis n’ont pas suffi à rassurer les experts. Dans son dernier rapport annuel, la protectrice du citoyen Raymonde Saint-Germain ne cachait pas son inquiétude face au manque de proactivité des instances gouvernementales sur la question.

Pointant notamment du doigt une gestion inadéquate du système de santé, Mme Saint-Germain s’inquiétait des conséquences du vieillissement de la population sur la qualité de vie des citoyens québécois. «Là où il y a une détérioration, c'est avec l'augmentation de la demande et les nouveaux enjeux liés au vieillissement de la population pour lesquels les services ne sont pas suffisamment adaptés. On tarde trop à les mettre en place», déplorait-elle dans son rapport.

L’immigration, pas une panacée

Dans le discours populaire, l’immigration est souvent présentée comme la solution miracle au débalancement démographique annoncé. Or, la réalité est beaucoup plus complexe.

Dans un mémoire déposé à l’Assemblée nationale en février 2016, l’économiste Pierre Fortin déboulonne le mythe selon lequel les immigrants pourraient suffisamment gonfler la population active pour pallier le vieillissement de la population native.

Citant une simulation de chercheurs de l’Institut C.D. Howe réalisée en 2009, Fortin explique que pour rétablir l’équilibre démographique, le Québec devrait accueillir 225 000 immigrants par année. Un nombre inconcevable, alors que l’objectif du gouvernement du Québec d’accueillir 51 000 immigrants en 2017 est déjà dénoncé comme étant trop élevé par la Coalition Avenir Québec, le Parti québécois et la majorité de la population québécoise.

Des populations particulièrement vulnérables

Bien que toutes les strates de la société québécoises seront touchées par le vieillissement de la population, certains groupes pourraient en ressentir plus fortement les effets négatifs: les femmes et les Autochtones, notamment.

Selon Statistique Canada, la proportion des personnes âgées de 65 ans et plus au sein de la population autochtone pourrait presque tripler entre 2011 et 2031. Même si, dans l’ensemble, la population autochtone sera significativement plus jeune que le reste de la population québécoise, il convient de se demander si les Premières Nations disposeront des ressources nécessaires pour prendre en charge tous ces nouveaux aînés. Compte tenu des conditions de vie difficiles des communautés autochtones, leurs besoins particuliers risquent de présenter un défi de taille, notamment dans le milieu de la santé et des services sociaux.

La situation des femmes, qui représentent désormais la majorité des têtes grises de la province, mérite également d’être étudiée de plus près. Celles-ci ont une espérance de vie plus élevée que les hommes. En 2031, l’espérance de vie des femmes sera de 86 ans, tandis que celle de leurs compatriotes masculins sera de 81,9 ans. En 2061, 71% des centenaires devraient appartenir à la gent féminine.

Tout cela n’est pas sans conséquence, puisque les femmes se retrouvent souvent, encore aujourd’hui, dans des situations financières plus précaires que leurs homologues masculins. Si la situation s’améliore lentement, l’équité salariale a encore des allures de voeu pieu au Québec. En 2016, la rémunération des hommes et des femmes affichait toujours un écart de 2,93 $ l'heure

De plus, comme elles représentent 59 pour cent des proches aidants au Québec, les femmes ont plus de chances de voir leurs revenus diminuer au cours de leur vie active parce qu’elles s’occupent d’un proche âgé. Par conséquent, elles sont plus à risque d’être dans une situation financière précaire lorsqu’elles atteindront elles-mêmes l’âge de la retraite. Et comme elles peuvent ainsi mettre moins d’argent de côté pour une retraite plus longue, c’est le reste de la société qui doit régler la note.

Vidéo et montage: Philippe-Olivier Contant

Images additionnelles: Hugo Jolion-David

Avec la collaboration d’Agnès Chapsal

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