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Les réfugiés syriens au pays sont morts d'inquiétude

Les réfugiés syriens au pays sont morts d'inquiétude
Hagop Manushian, a Syrian refugee who arrived earlier in the morning is reunited with his granddaughter Rita at the Armenian Community Centre of Toronto in Toronto, December 11, 2015. REUTERS/Mark Blinch
Mark Blinch / Reuters
Hagop Manushian, a Syrian refugee who arrived earlier in the morning is reunited with his granddaughter Rita at the Armenian Community Centre of Toronto in Toronto, December 11, 2015. REUTERS/Mark Blinch

Lorsqu'elle a appris jeudi soir les représailles américaines à l'attaque chimique de mardi en Syrie, le coeur de Maha Alio s'est arrêté de battre.

La réfugiée syrienne de 25 ans, arrivée depuis peu au Canada, craint maintenant que le pire reste à venir. Elle s'inquiète plus que jamais du sort réservé à ses parents et amis qui se trouvent toujours là-bas.

"Nous ne faisons pas confiance à l'Amérique parce qu'après six ans de conflit, nous ne faisons plus confiance à personne", soutient Mme Alio, arrivée à Toronto en janvier dernier avec sa mère de 63 ans. Son père était resté à Lattaquié, une ville relativement sûre de la côte syrienne, afin de s'occuper de sa mère malade, aujourd'hui décédée. La soeur de Mme Alio se trouve quant à elle à Antioche, en Turquie.

"On ne sait pas si (les bombardements de jeudi) constituent une bonne nouvelle, on ne sait pas ce qui va arriver maintenant", laisse tomber, inquiète, Mme Alio. "Mais ce qu'on sait, c'est que ce sont toujours les enfants et les civils qui écopent."

La jeune réfugiée tente maintenant de faire venir son père et sa soeur au Canada; en attendant, elle souffre de ce que les psychologues appellent le syndrome de culpabilité du survivant. Un de ses amis lui disait même cette semaine qu'il voulait rentrer en Syrie pour mourir avec les autres victimes de cette guerre civile. "Pourquoi eux et pas moi ? Pas toi ? Pas nous ?", demandait-il.

Le personnel responsable de l'accueil des réfugiés entend souvent ce mélange d'anxiété et de culpabilité, qui peut même retarder le processus d'intégration au pays. Les mauvaises nouvelles en provenance de la mère patrie peuvent raviver des plaies de violences et d'exactions pas si lointaines, et peuvent ralentir les progrès vers l'intégration professionnelle et sociale.

"Ils sont assis en classe mais leur tête est ailleurs", souligne Sally Ghazal, conseillère en intervention de crise à Mississauga. "Les traumatismes ont de multiples effets, notamment des difficultés à se concentrer et à mémoriser." Et ces effets sont souvent beaucoup plus difficiles à vivre lorsque des proches dépendent de votre succès.

Mme Alio reçoit des nouvelles de son pays par l'entremise de Facebook et d'autres immigrants. Ces nouvelles sont souvent beaucoup plus difficiles à regarder que ce que les médias traditionnels canadiens acceptent de diffuser. Mais Mme Alio a ainsi l'impression de communier davantage avec son peuple, afin de pouvoir l'aider éventuellement.

Gilan Abdelaal, conseillère clinicienne dans un centre pour immigrants de Toronto, raconte que plusieurs de ses clients sont tellement habitués aux horreurs de la guerre que l'attaque chimique de mardi ne les a guère surpris. Mais l'accumulation de ces horreurs peut exacerber les symptômes de dépression, d'anxiété ou de stress post-traumatique.

Mme Alio, elle, a décidé cette semaine de consulter un psychologue.

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