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La comédienne Janine Sutto est décédée à l'âge de 95 ans (PHOTOS/VIDÉO)

La comédienne Janine Sutto est décédée

Elle a fait rire et pleurer plusieurs générations. La comédienne Janine Sutto est décédée à l'âge de 95 ans. Sa carrière artistique, commencée au début de la Deuxième Guerre mondiale, aura duré près de 75 ans.

Mireille Deyglun, la fille de la comédienne, a confirmé que sa mère était décédée tôt ce matin entourée des siens. Mme Deyglun est revenue sur sa carrière en évoquant la fougue avec laquelle elle s'était donnée au monde du théâtre. « C'était une femme passionnée. Son métier a été tellement important dans sa vie [...] elle a toujours fait toutes les choses avec passion ».

Notre-Dame-du-Théâtre, comme l'avait surnommée Gilles Latulippe, était une artiste polyvalente, campant des centaines de personnages, autant populaires que classiques, sur scène, à la radio et à la télévision.

Sa jeunesse

Janine Sutto est née à Paris, en avril 1921. Ses parents travaillent tous les deux pour les studios de cinéma Pathé. Son père est l'associé de Charles Pathé, puis il devient distributeur de films, alors que sa mère est la secrétaire particulière du producteur de cinéma. Janine a un frère, André, de neuf ans son aîné.

La famille part pour l'Amérique en 1929, après avoir été ruinée à la bourse. Elle s'installe à Montréal, où Léopold Sutto et son épouse deviennent vendeurs d'articles religieux.

Janine Sutto

Une vie de théâtre

La carrière de la comédienne prend sa source dans le théâtre. Janine Sutto débute sur les planches en 1940, dans une pièce jouée par la section française du Montreal Repertory Theater, une troupe mi-amateur, mi-professionnelle, où elle décroche plusieurs petits rôles. Elle joue ensuite régulièrement au Théâtre l'Arcade, qui présente des pièces de boulevard qui changent toutes les semaines, et elle obtient aussi des rôles au Théâtre Saint-Denis, qui présente un répertoire plus classique.

Au fil du temps, les rôles au théâtre s'additionneront les uns aux autres, et ce, jusque dans les années 2000. Janine Sutto aura finalement joué dans plus d'une centaine de pièces au cours de sa longue carrière, du théâtre classique au théâtre d'été, sur toutes les scènes de Montréal et d'ailleurs au Québec.

«Le public s'imagine que les acteurs ont une vie glamour. Ils n'ont pas idée comment ça peut être dur. D'abord parce que c'est un métier qui sort de toi. T'as besoin d'une grande santé physique et mentale pour l'exercer. Mais je ne suis pas une martyre. J'ai aimé passionnément ce métier.» - Janine Sutto

Janine Sutto est notamment des toutes premières pièces du Théâtre du Nouveau Monde, lancé en 1951 avec L'avare, de Molière. Elle participe aussi, en 1968, à la première lecture publique des Belles-soeurs, de Michel Tremblay, et prend part à la deuxième production de la pièce, en 1969, trop occupée pour être de la première. Quarante ans plus tard, en 2010, elle sera par ailleurs de la distribution de la comédie musicale adaptée de la pièce, qui a connu un énorme succès à travers le Québec et à Paris.

Janine Sutto aura reçu plus d'un honneur pour la récompenser d'une carrière si fructueuse, dont le Prix du gouverneur général pour les arts du spectacle, en 2014.

De Miss Radio...

La carrière radiophonique de Janine Sutto prend son envol presque au même moment que ses débuts au théâtre. Les radioromans sont à la mode dans les années 1940 et 1950, et la comédienne participera à une multitude d'entre eux, dont certains des plus populaires, comme Jeunesse dorée, à Radio-Canada, et Rue Principale, à CKAC.

Elle est élue Miss Radio en 1945.

... à Miss Télévision

Fidèle à son bagage professionnel, c'est dans un téléthéâtre que Janine Sutto fait ses débuts à la télévision. Elle sera par la suite de la distribution de nombreuses pièces adaptées pour le petit écran.

On pourra également voir la comédienne dans une multitude de téléromans. Un de ses rôles les plus marquants sera probablement celui de Mademoiselle L'Espérance, une vieille fille qui aime les hommes, dans la comédie Symphorien, de Marcel Gamache, diffusée de 1970 à 1977. Ce rôle lui vaudra le titre de Miss Télévision en 1972.

De 1956 à 1969, Janine Sutto incarne Prudence Pothier dans Les belles histoires des pays d'en haut.

Par ailleurs, les enfants du début des années 1970 peuvent voir la comédienne dans la série jeunesse Le major Plum-Pouding.

La notoriété de Janine Sutto prend encore de l'ampleur avec la comédie à succès Poivre et sel, qui sera diffusée de 1983 à 1987. Elle y partage la vedette avec Gilles Latulippe, avec lequel elle forme un couple de septuagénaires.

Toujours prête à relever de nouveaux défis, elle deviendra à 80 ans chroniqueuse de sexe à l'émission Fun noir, animée par Normand Brathwaite.

Des rôles au cinéma

La comédienne fera une vingtaine d'apparitions au cinéma. Elle sera notamment de Deux femmes en or, de Claude Fournier, en 1970, et de Kamouraska, de Claude Jutra, en 1973. Plus récemment, on a pu la voir dans Congorama, de Philippe Falardeau, en 2006, et dans Route 132, de Louis Bélanger, en 2010.

Quelques mises en scène

Janine Sutto s'essaie pour la première fois à la mise en scène en 1978, au Théâtre du Rideau Vert, avec Sonnez les matines, de Félix Leclerc.

Elle monte aussi les deux pièces écrites par Janette Bertrand, d'abord en 1981, Moi Tarzan, toi Jane, qui met en vedette Louise Turcot et Raymond Legault, puis en 1983, Dis-moi-le si j'dérange, où la comédienne Juliette Huot est seule en scène.

Partage d'expérience

Dans les années 1970, Janine Sutto se met à offrir des cours particuliers d'art dramatique à de jeunes comédiens qui veulent se lancer dans le métier ou préparer leurs auditions d'entrée dans les écoles de théâtre.

Elle enseigne ensuite à l'École nationale de théâtre et aux cégeps de Saint-Hyacinthe et de Sainte-Thérèse.

Elle sera aussi entraîneuse de l'équipe des verts de la Ligue nationale d'improvisation, de 1978 à 1984. Elle est d'ailleurs intronisée au Temple de la renommée de la Ligue nationale d'improvisation en 2002.

Janine Sutto aura reçu plus d'un honneur pour la récompenser d'une carrière si fructueuse, dont le Prix du gouverneur général pour les arts du spectacle, en 2014. L'organisme de bienfaisance MU a inauguré en 2016 une murale en hommage à la grande comédienne dans le quartier Centre-Sud, à Montréal.

Une passionnée

Janine Sutto a eu une vie personnelle et amoureuse complexe.

En 1944, elle épouse à 23 ans le comédien et metteur en scène Pierre Dagenais, avec lequel elle avait fondé une troupe de théâtre deux ans plus tôt. Cette union durera toutefois moins d'un an.

Ses histoires amoureuses se succèdent ensuite, jusqu'à ce qu'elle rencontre l'auteur Henry Deyglun, qui est alors marié à la comédienne Mimi d'Estée. Janine Sutto et Henry Deyglun sont amants pendant six ans, avant d'emménager ensemble en 1953, et de se marier en 1961. Henry Deyglun mourra 10 ans plus tard.

Janine Sutto vivra ensuite une liaison passionnée avec un comédien marié et père de famille, dont le nom n'a jamais été prononcé officiellement pour ménager sa famille, mais qu'elle nommait par la lettre D.

La mère qui fait de son mieux

En 1958, Janine Sutto donne naissance à des jumelles, Mireille et Catherine.

La première, Mireille Deyglun, deviendra elle aussi une comédienne connue. Catherine, de son côté, est affligée du lourd handicap de la trisomie 21, mais sa mère refuse de la placer en institution et décide de s'occuper d'elle à la maison, même lorsqu'elle devient mère de famille monoparentale. Catherine s'éteindra finalement à 52 ans et sera restée presque toutes ces années avec sa mère.

Faisant un bilan de sa vie en 2015 avec l'animateur Franco Nuovo, elle affirme alors que ce ne sont pas les épreuves qu'elle a traversées qui lui apparaissent les plus cruelles, mais plutôt la vieillesse.

Dans une grande entrevue en 2016, l'animateur et comédien André Robitaille lui pose la question suivante : « Qu'est-ce que je dis à tout le monde dans 10 ans, 15 ans, 20 ans sur vous? » La réponse de la comédienne : « Elle a beaucoup parlé, elle a emmerdé beaucoup de monde, mais elle a beaucoup aimé ses camarades et ce métier. Ça, c’est certain. »

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