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Lance Stroll est un symbole de la «V.I.P.-isation» du sport professionnel

Comme le disait un slogan populaire: «L'argent ne fait pas le bonheur, sauf que...»

Comme le disait un slogan populaire: "L'argent ne fait pas le bonheur, sauf que..." il ouvre parfois plus facilement les portes du sport professionnel.

Selon le professeur titulaire et expert en marketing du sport à l'École de gestion de l'UQAM, André Richelieu, il faut s'inquiéter de cette tendance qui émerge depuis quelques années d'écarter les jeunes provenant de familles québécoises "ordinaires" du sport professionnel, et d'autant plus dans une discipline aussi 'glamour' que la course automobile.

"Dans notre jargon, nous appelons ça la 'V.I.P.-isation du sport', c'est autant le sport spectacle que la pratique du sport qui deviennent prohibitifs, tous sports confondus, a expliqué M. Richelieu. La course automobile représente la pointe de l'iceberg et, dans une certaine mesure, un cas extrême, puisqu'il s'agit d'un sport pour gens très aisés."

Lance Stroll n'est pas le seul à avoir profité de la fortune familiale pour faciliter son cheminement vers le sport professionnel: le pilote de course Kami Laliberté, entre autres, de même que la joueuse de tennis Eugenie Bouchard proviennent eux aussi de familles aisées de la société québécoise.

Le père de Stroll, Lawrence, est un milliardaire propriétaire du circuit de Mont-Tremblant, notamment, tandis que le père de Kami, Guy, est le fondateur du Cirque du Soleil. Quant aux parents d'Eugenie, ils ont géré sa carrière et élevé leurs enfants dans une maison cossue du secteur Westmount.

Lance Stroll

Tout n'est cependant pas rose lorsqu'on vient d'une famille aisée et qu'on tente de percer dans le sport professionnel. Cette bénédiction est souvent accompagnée d'un stigmate - surtout au Québec, où la relation à l'argent est tabou. D'ailleurs, en juin dernier, Jacques Villeneuve, le dernier pilote québécois en F1, avait déclaré que Stroll n'était qu'un "fils de riche". Et il n'est pas le seul à le dire.

L'impression que Stroll a gradué en F1 grâce à l'argent a été amplifiée par les nombreuses rumeurs qui ont circulé vers la fin 2016 selon lesquelles son père aurait versé des dizaines de millions $ à l'équipe britannique pour faciliter son embauche.

Hugo Mousseau, qui a été le gérant de Stroll pendant neuf ans, a confié avoir abordé cet enjeu avec son protégé.

"Une fois, j'avais discuté de ça avec Lance, a-t-il reconnu. Nous avions évalué qu'il y avait en karting environ 6 à 7 millions de pilotes de tous âges à travers le monde, et donc qu'il devait y en avoir plusieurs milliers qui avaient du talent et dont nous n'entendrions jamais parler.

"Ce que nous avons réalisé, c'est qu'il n'y a pas de mauvais pilote en F1. C'est la crème de la crème, a-t-il ajouté. Même ceux que les gens qualifient de 'mauvais' _ par exemple Pastor Maldonado, qui a la réputation d'être casse-cou et de provoquer de nombreux accidents _ est un excellent pilote. Peut-être pas le meilleur en F1, mais il fait partie des meilleurs au monde."

Évidemment, Mousseau n'a pas caché que l'argent avait permis à Stroll de se développer plus rapidement que d'autres pilotes moins bien nantis, surtout après leur décision de faire le saut en Europe ensemble en 2010. Il n'a pas caché non plus qu'il fallait beaucoup, beaucoup d'argent en course automobile afin d'aspirer aux plus grands honneurs.

"Ça dépend ce que tu recherches comme succès, a-t-il dit, après avoir pris une longue pause pour réfléchir. J'ai déjà vu des gens franchir de nombreuses étapes sans mettre autant de moyens financiers que d'autres (pilotes). Mais ceci étant dit, c'est très, très rare aujourdhui.

"Chaque pilote doit être appuyé par des personnes aisées, ou encore par des commanditaires aux reins solides. Dire que le père de Lance est milliardaire et que c'est pour cette raison qu'il est en Formule 1, c'est faux. Pour percer en F1, le pilote doit être excellent."

Stroll entame sa première saison en carrière en F1 ce week-end avec la présentation du Grand Prix d'Australie, à Melbourne.

L'argent, le nerf de la guerre

Selon l'ex-pilote de course Patrick Carpentier, l'omnipotence de l'argent en course automobile est indéniable.

"C'est beaucoup plus difficile que ça ne l'était à l'époque, surtout depuis qu'ils ont décidé de retirer toutes les compagnies de tabac. Le retrait de Player's en 2003, ç'a tellement fait mal au sport automobile, a-t-il souligné.

"Moi, par exemple, je n'ai jamais pu aller courir en Europe parce que je ne venais pas d'une famille archi-riche, a fait remarquer l'homme de 45 ans originaire de LaSalle. Je ne pouvais pas y penser, sauf si j'étais parvenu à me trouver un commanditaire majeur. Donc, je me suis rabattu sur le NASCAR."

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