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Coincées plus de 14 heures dans leur voiture ensevelie

Coincées plus de 14 heures dans leur voiture ensevelie

Deux femmes originaires de la Gaspésie sont restées prisonnières de leur voiture durant plus de 14 heures au cours de la nuit de mardi à mercredi à Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, près de Montmagny, à quelques centaines de mètres seulement de la camionnette à l'intérieur de laquelle Mikael Fiset et Pierre Thibault sont morts en attendant l'arrivée des secours. L'une d'elles a accepté de raconter sa mésaventure à Radio-Canada.

Un texte de Louis Gagné

Julie Plourde et sa collègue de travail Martine Dionne venaient d’assister à une formation à Québec, mardi soir, lorsqu’elles ont pris l’autoroute 20 en direction de Rimouski, où elles avaient un rendez-vous le lendemain matin.

« La route était quand même belle lorsqu’on a quitté Québec et puis on suivait un peu les indications [concernant l’état des routes] sur le site 511. Donc, on savait qu’il y avait une tempête, mais ça allait quand même bien jusqu’à un certain moment où là, la visibilité est devenue pratiquement nulle », relate la résidente de Gaspé.

Les deux femmes décident alors de réserver une chambre dans un hôtel de Montmagny. Guidées par un appareil GPS, elles empruntent la sortie 369, située à la hauteur de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, pour se rendre à l’hôtel. Une lame de neige située au milieu de la route, dans la sortie, les oblige toutefois à s’immobiliser.

«On ne s’est pas aventurées plus loin pour ne pas rester prises, mais on n’a pas voulu faire demi-tour non plus parce qu’on ne connaissait pas le coin. La visibilité était tellement nulle qu’on avait peur de tomber dans le fossé, donc on a préféré rester là et contacter les secours.» - Julie Plourde

Appel au 911

Il est alors 20 h 15. Ayant aperçu une pancarte indiquant qu'un hôpital se trouve à proximité, Julie Plourde en déduit que la route sera déneigée sous peu étant donné qu’il s’agit d’une voie prioritaire.

« Mes parents font du déneigement, j’ai été élevée là-dedans, donc je connais un peu comment ça fonctionne […] et je savais que la route qui mène à l’hôpital, généralement, c’est la route qui est toujours déneigée. Je me suis fiée un peu là-dessus. »

Julie Plourde et Martine Dionne sont restées prisonnières de leur voiture ensevelie durant plus de 14 heures. Photo : Mario Théberge

Par mesure de sécurité, les deux femmes composent le 911 afin de signaler qu’elles se sont immobilisées au milieu de la chaussée. Leur appel est transféré à la Sûreté du Québec (SQ), qui les informe que leur voiture a été repérée à l’aide d’un GPS et qu’une déneigeuse sera bientôt sur place.

Au bout de quelques heures, l’aide annoncée se fait toujours attendre. Julie et Martine décident de contacter à nouveau les policiers. Il est à ce moment 1 h.

Ils nous ont dit : “On sait où vous êtes, mais il n’y a plus aucune déneigeuse qui a accès à l’endroit où vous êtes situées. Vous allez avoir des nouvelles de la SQ bientôt et vous allez devoir être escortées.”

Policiers « paniqués »

Vers 2 h, deux agents de la SQ vêtus de combinaisons de motoneige cognent à une fenêtre de leur véhicule, une Dodge Caravan. Les policiers, qui semblent « un peu paniqués », s’informent sur l’état de santé des deux femmes, leur demandent si elles sont au chaud et si elles ont encore de l’essence.

Rassurés, les agents leur conseillent de rester à l’intérieur du véhicule et de toujours laisser une fenêtre ouverte afin d’éviter l’intoxication au monoxyde de carbone. On leur recommande également de sortir régulièrement de la voiture pour s’assurer que la neige n’obstrue pas le pot d’échappement.

Selon Julie Plourde, les deux policiers étaient à ce moment-là à la recherche de la camionnette à bord de laquelle se trouvaient Mikael Fiset et Pierre Thibault, ce qui expliquerait pourquoi ils n’étaient pas en mesure de s’occuper immédiatement d’elle et sa collègue.

«On nous a questionnées : “Voyez-vous un véhicule près de vous? On nous indique sur notre GPS qu’il y a probablement quelqu’un qui est à cinq mètres de vous”, mais on ne voyait rien. On nous demandait aussi : “Avez-vous vu quelqu’un marcher?”» - Julie Plourde

L’attente se poursuit

Les policiers repartent afin de poursuivre leurs recherches. L’attente se poursuit pour les deux femmes, qui s’efforcent de ne pas tomber endormies. Lorsque le jour se lève, la tempête de neige fait toujours rage autour d’elles.

Les heures passent quand un des deux policiers les rappelle pour les aviser qu’ils sont en route pour venir les chercher. Quelques minutes plus tard, les agents arrivent à leur voiture.

« Ils sont rentrés dans la van puis ils nous ont expliqué ce qui s’en venait pour nous. Ils nous ont dit : “Là, on s’enligne pour une marche d’un kilomètre. Ça ne sera pas l’fun. Vous avez une butte de 22 pieds à traverser. Habillez-vous chaudement. Préparez-vous.” », relate Julie Plourde.

Les policiers et les deux collègues de travail se mettent alors en route. Après avoir marché un certain temps, le cortège vient à la rencontre d’un autre automobiliste qui a lui aussi été forcé de s’immobiliser.

La troupe se remet en route et atteint la fameuse butte de neige. Plutôt que de l’escalader, les policiers demandent aux rescapés d’aller se réfugier à l’intérieur d’une maison située à proximité.

« On a cogné puis les gens nous ont accueillies très gentiment et on a passé toute la journée avec eux. Il était environ 21 h hier soir [mercredi] quand on a quitté la maison », raconte Julie Plourde.

Ce n’est qu’à ce moment que les deux femmes ont finalement pu se rendre à l’hôtel où elles avaient réservé une chambre la veille.

« Je n’ai pas vraiment eu peur »

La rescapée affirme ne pas avoir craint pour sa sécurité, à l’exception, peut-être, d’un court instant, lorsque les policiers ont cogné à la fenêtre de leur voiture pour la première fois.

« J’ai eu un doute quand j’ai vu les policiers vers 2 h, 2 h 30. J’ai senti que… mon instinct m’a dit que quelque chose ne fonctionnait pas, mais ma collègue qui était avec moi n’avait pas eu ce sentiment-là. Donc, je vous dirais que je n’ai pas vraiment eu peur », confie Julie Plourde.

Avec le recul, elle réalise toutefois que la situation aurait pu être plus grave. « Je vous dirais que si on avait senti que la voiture [s’enlisait] totalement, ç’aurait été probablement une autre situation », dit-elle.

Avec les informations de Pascal Poinlane et Marie Maude Pontbriand

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