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Voici ce que vous devez savoir pour passer la frontière américaine

Voici ce que vous devez savoir pour passer la frontière américaine

Vous allez aux États-Unis? Attendez-vous à ce que les douaniers exigent des preuves du fait que vous ne planifiez pas d'y rester. État des lieux en questions-réponses.

Au cours des dernières semaines, plusieurs Canadiens qui voulaient se rendre aux États-Unis ont eu des problèmes aux postes frontaliers. Ces incidents soulèvent des inquiétudes. À quoi faut-il donc maintenant s’attendre lorsqu’on veut traverser la frontière américaine?

« À tout et à rien », répond l’avocate torontoise spécialisée en immigration Heather Segal. En entrevue à l’émission de CBC Metro Morning, l’avocate a expliqué que le dernier décret du président américain signé lundi « allait être interprété comme un accord tacite à toutes sortes de choses qui peuvent ou non être légales ».

« Je pense qu’il est important que les gens connaissent bien leurs droits, afin de savoir à quoi s’en tenir une fois à la frontière », note l’avocate. Toutefois, elle souligne que les voyageurs, dans bien des cas, sont à la merci des douaniers : « Ils ont les pleins pouvoirs ».

Qu’arrive-t-il aujourd’hui aux Canadiens à la frontière?

Dimanche dernier, la Canadienne Manpreet Kooner a été refoulée à la frontière. Elle s’est fait dire par les douaniers qu’elle avait besoin d’un visa d’immigrant pour entrer aux États-Unis.

Les déboires de la jeune femme s’ajoutent à ceux subis par plusieurs autres Canadiens qui ont essayé de traverser la frontière.

C'est aussi le cas de Fadwa Alaoui, une résidente de Brossard, qui s’est fait poser des questions sur sa religion et son opinion sur le président Trump avant d’être refoulée.

En janvier, Joseph Decunha et Sasha Dyck ont connu le même sort alors qu’ils tentaient de se rendre à Washington pour la Marche des femmes.

Les Canadiens ont-ils vraiment besoin d’un visa pour aller aux États-Unis?

Non, les Canadiens n’ont pas besoin de visa. L'avocate Heather Segal trouve bizarre la mésaventure vécue par Manpreet Kooner. Elle croit toutefois que d’autres citoyens canadiens pourraient bien se trouver un jour dans la même situation.

L’avocate explique que les douaniers se donnent le droit, en vertu d’une réglementation plutôt vague, d’empêcher les gens d’entrer aux États-Unis s’ils croient que ces citoyens ont besoin d’un visa. Les Canadiens n’y échappent pas, même s’ils n’ont habituellement pas besoin de visa.

Les douaniers ont-ils le droit de poser des questions sur la religion ou encore les affinités politiques?

Oui. Les douaniers américains peuvent vous poser n'importe quelle question concernant votre voyage.

« Ils ont le droit de vous poser toutes sortes de questions, incluant votre affiliation politique. Ils vont aussi à tout coup vous demander quel est le but de votre voyage aux États-Unis », explique Caily DiPuma, avocate pour l’Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, en entrevue à l’émission de CBC As It Happens.

Elle précise que lorsque les douaniers vous interrogent, ils doivent le faire sans intention discriminatoire. Les services d’immigration américains ont assuré qu’ils n’allaient pas refouler les gens sur la base de la religion, de la race, de l’ethnie ou de l’orientation sexuelle.

Les voyageurs peuvent-ils refuser de remettre leur cellulaire ou leur ordinateur aux douaniers?

Les agents frontaliers pourraient vouloir inspecter vos appareils numériques, et vous pouvez leur dire non. Toutefois, attention aux conséquences. Les douaniers ont demandé à Fadwa Alaoui de donner le code de sécurité de son cellulaire. Elle l’a fait. Si elle avait dit non, on lui aurait probablement refusé à l’avenir l’entrée aux États-Unis, fait valoir Caily DiPuma. L'avocate rappelle que les échanges avec les douaniers sont documentés tant du côté canadien que du côté américain.

Les douaniers américains sont aussi autorisés à saisir votre téléphone s’ils le jugent nécessaire. Ils peuvent également faire une copie des données qui se trouvent dans votre téléphone pour les analyser.

Les téléphones sont-ils souvent fouillés?

Il est encore plutôt rare que les douaniers américains fouillent les appareils numériques, selon le New York Times. Le journal rapporte que 4444 cellulaires et 320 autres appareils électroniques ont été inspectés aux douanes en 2015. Il s’agit d’une très faible proportion des quelque 383 millions d’entrées au pays cette année-là. En 2016, les douaniers ont réalisé 23 000 inspections.

Comment se préparer à passer la frontière?

L’avocate Heather Segal conseille d’apporter la preuve que vous ne planifiez pas de rester aux États-Unis pour de bon. Ayez en main les dates de vos réunions d’affaires ou encore vos billets pour des activités touristiques.

Préparez-vous à répondre aux deux questions habituellement posées aux voyageurs :

  • Quel est le but de votre visite?
  • Combien de temps durera le voyage?

Apportez seulement ce dont vous avez besoin. L’Electronic Frontier Foundation, un groupe de défense des droits numériques basé en Californie, conseille aux voyageurs de faire une copie des données qui sont sur leurs appareils électroniques. La fondation propose aussi aux voyageurs d’envisager le cryptage des fichiers dont ils ont besoin. Il y a aussi la possibilité de crypter et d’entreposer vos données dans un nuage informatique, pour ensuite les récupérer une fois que vous êtes arrivé à destination.

Est-il plus facile de passer les douanes à l’aéroport ou à un poste frontalier?

L'avocate Heather Segal croit que c’est plus facile à l’aéroport. « Quand vous passez les douanes à l’aéroport, vous avez toujours la possibilité de vous en aller à tout moment. Les douaniers ne peuvent pas vous arrêter si vous décidez de partir, précise-t-elle. Au poste frontalier, vous n’avez pas ce droit. Donc si vous vous inquiétez, allez donc à l’aéroport. »

« J’ai été refoulé. Que dois-je faire? »

Le département américain de la Sécurité intérieure a un processus d’appel, le DHS Traveller Redress Inquiry Program, pour les gens qui ont eu des problèmes à la frontière. Mais au bout du compte, l'acceptation ou le refus des voyageurs se font à la discrétion des États-Unis. « Ce n’est pas un droit, c’est un privilège », rappelle Me Segal.

Pourquoi tout cela arrive-t-il maintenant?

Le resserrement du contrôle aux frontières s’est fait à la suite des attaques du 11 Septembre, explique l’avocate. Les douaniers ont obtenu le droit de fouiller les ordinateurs portables en 2008.

« Les États-Unis sont devenus très stricts sur de nombreuses questions d’immigration, et la sécurité primait », poursuit Heather Segal. « Les douaniers américains sentent qu’ils ont le droit de prendre des décisions qui ne sont pas toujours justes ou légales, au nom de la sécurité. »

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